Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

31 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 12


Qu’est-ce qu’une « belle chanson » ? Qu’est-ce ? et qui ? lui donne l’estampille ? A l’âge où se forme mon goût, une belle chanson est ce que Maman et mes sœurs appellent ainsi. Elles-mêmes ne font qu’entériner l’avis général. Il y a une dizaine d’années entre mes sœurs et moi. Quand elles ont vingt ans, j’en ai dix. Elles chantent douloureusement « on n’a pas tous les jours vingt ans » pendant les banquets, chanson bien adaptée à leurs vingt ans rayonnants. La chanson est d’autant plus vraie que ma sœur aînée est couturière.
« L’atelier de couture est en fête … on oublie l’ouvrage un instant … » Suffit de changer la Marinette du compositeur par le prénom de ma sœur. Et le tour est joué. Car, une belle chanson , c’est une chanson sur mesure, qui nous raconte et nous fait vibrer. Elle a très vaguement quelque chose qui colle avec nous. Nous ne mettons pas en doute la vérité des chansons. C’est notre école de philosophie.
Si je me suis mise à faire des chansons ajustées à mon histoire unique c’est sans doute pour ce petit doute qui se levait alors en moi quand j’écoutais religieusement « Les roses blanches ». Serais-je capable d’aller fleurir la tombe de ma maman chaque dimanche ? J’aimais encore mieux qu’elle vive et que je ne sois pas héroïne de l’amour filial, en détresse mais à la hauteur !
Une belle chanson c’est forcément une chanson triste. Une chanson qui pleure et fait pleurer. Une chanson d’amour en deuil d’amour. Une chanson de vie en lamentation de mort. A l’heure du « Disque des Auditeurs » nous sommes toutes quatre dans la cuisine sous prétexte de préparer le repas du dimanche matin. Qui du voisinage sera nommé pour qu’on lui dédie une chanson ? Qui se cache derrière le pseudonyme de l’adresse ? Avec Le disque des Auditeurs, avec la radio, les chansons, comme les anges mais plus rapidement et sûrement, sont arrivées jusque dans nos campagnes. Des voix superbes de femmes non retenues par la bienséance. Puissantes comme celles des hommes. Déferlantes comme les vagues. Des femmes aux voix libres. Oh il nous arrive bien de les trouver immodestes, voire vulgaires. Nous aurons quelque mal à accepter Piaf. Mais la môme sait vaincre nos réticences. On l’envie. En voilà une qui a réussi à « se sortir de devant » ! Dans la cuisine, en dehors du dimanche, quand je suis seule, je m’exerce à toutes sortes de goualantes, je descends les escaliers des voix graves. C’est plus difficile dans les aigus. Ça tombe bien ! Chez Nous on n’aime pas les « kiles » (le cochon « kile », crie, quand on le tue) Les kiles = les sopranos, les maniérées, les voix trafiquées de l’opéra. D’ailleurs il n’y en a pas au Disque des Auditeurs. Les voix comme les chansons sont populaires. Comme nous ! Un idéal que mes sœurs sont tout près d’atteindre. Mon Dieu comme je les admire ! Elles en ont de la chance d’être grandes, elles ! Elles vont au bal danser … L’une épousera un musicien de l’orchestre à trois musiciens ( accordéon, batterie, saxo).

J’ai commis une ou deux chansons, (allez ! trois ou quatre !) avec ce qu’il faut de trémolos. Je me régale à les chanter surtout en vase clos où tout m’est permis. L’une s’appelle « Madame la Postière », noire à souhait, c’est tout juste si je n’en pleure pas. Pourtant je crois n’avoir jamais été postière ! Mais d’avoir tremblé de solitude et de peur de la mort Oui ! Sinon, comment serait-elle arrivée jusqu’à moi ?

Ah Monsieur le curé
J’attendais votre visite
Je l’espérais je crois
Certes devant l’église
Je passais un peu vite
Je ne sais pas pourquoi
Mais ce soir je pars
Dites une prière
Dites une chanson
Un J’vous salue Marie
Avec un Notre Père

Je payerai l’addition …

30 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 11

Ce matin c’est une chanson de Francis Poulenc qui se réveille en même temps que moi. Peut-être a-t-elle même une longueur d’avance, peut-être s’était-elle nichée déjà dans le rêve. Car les chansons sont comme les oiseaux : elles nichent. Elles croient automatiquement, du seul fait d’être au monde et de la seule présence d’un soleil de printemps, à leur capacité de reproduction.
Celle-ci n’est pourtant pas très optimiste
« Chemins de mes amours
je vous cherche toujours
Chemins perdus
vous n’êtes plus … »
Est-ce de l’avoir entendue deux dimanches de suite au concert, chantée par deux voix différentes : la première, amateur éclairée, la deuxième professionnelle au sommet de son art, qu’elle s’est inscrite si habilement en moi.
Pourtant je ne me sens pas spécialement en quête du chemin de mes amours aujourd’hui. Comme si de l’avoir chanté souvent ce chemin sinueux, incertain parfois, parfois lumineusement droit et clair, me dispensait de partir à sa recherche.
Ce qui est curieux ce ne sont pas les bifurcations de l’amour mais l’étonnante conjonction de toutes les amours en un seul. Vous avez remarqué n’est-ce pas les subtilités de l’amour, des amours, en Français : Masculin et pragmatique au singulier, Féminines et poétiques au pluriel.
J’ai reçu autrefois comme balancier de vie une chanson d’amour, en plein rééquilibrage sur la corde raide. Je l’ai adressée dès ses premiers balbutiements, du fond du cœur, et l’écoutant très attentivement au fond de mes entrailles, à celui qui était alors mon mari. A l’époque c’était un phénomène très rare qu’une chanson m’arrive ainsi et j’étais consciente du miraculeux de cette présence. Je l’ai donc retenue par répétitions internes jusqu’à ce qu’elle devienne indélébile

Je ne veux rien que te donner
Ni t’apprendre à aimer
Ni t’apprendre à apprendre
Ce que je sais …

Plus tard, je l’ai chantée avec un compagnon de chant, de toute mon âme, confiante en l’harmonie qui peut naître quand une voix de mezzo s’accorde avec une voix de ténor … certains auditeurs crurent qu’elle était un aveu.

Elle est revenue à mes lèvres une autre fois, à des années de différence, un beau jour d’été - ( encore les fesses dans l’eau comme à Calla d’Orzu. Décidément il y a de subtiles corrélations entre le haut et le bas dans mes chansons !) et je l’ai chantée à un autre encore, en nageant, comme si je venais de la trouver, comme si cet amour naissant était bien le premier. Il n’y avait pas d’hypocrisie de ma part, j’en suis bien sûre. La chanson conjugale pouvait devenir une chanson amante sans tromperie.

Je ne veux rien pour toi et moi
Que l’instant où tu veux te regarder en moi
Etre là simplement
Et apprendre à attendre
Que tu veuilles de moi …

Je suis parfois prise d’un doute terrible. Est-ce que j’aime pour pouvoir chanter ? Est-ce que je chante pour mieux aimer ?

Je ne veux rien que te donner
Le fruit mûr ou la fleur
Que tu avais aimé
Et si tu n’aimes plus
Je ne veux rien que m’en aller
Sur la pointe des pieds

Heureusement l’amour partagé, la chanson reprise de voix en voix, ont ceci de commun qu’ils ne doutent de rien dans l’instant où ils s’accomplissent.
Espérant élucider tout à fait la question j’ai rassemblé 7 fois 7 chansons sous le chapiteau de « L’Amour aux Sept Couleurs ». J’ai planté le dit-chapiteau en plusieurs lieux, jusqu’à Paname … Maintenant il est replié (mais pas usé, toujours disponible !)

L’amour aux sept couleurs
Est entré dans mon cœur
Il est tombé du ciel
L’arc-en-ciel !

Supprimez les chansons d’amour du répertoire et la SACEM fait faillite.

J’ai cru comprendre par sa correspondance amoureuse que Francis Poulenc, - Poupoule comme il signait ses lettres – avait trouvé le long de sa route beaucoup de chemins. Mais ne mènent-ils pas tous à Rome ?

29 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 10


1/1000 de ce qui me trotte par la tête rapporté en ce lieu ? N’exagère pas trop G. 1/10 à ce jour sur l’établi ce n’est pas si mal. En particulier demande-toi comment passer de l’émergence d’une chanson telle que « Ah faire l’amour avec la mer » à sa réalité chantée pour quelques-uns, et même plusieurs, et même … - allez ! disons une centaine à ce jour peut-être plus - personnes qui forment donc un public.
En fait la chanson s’est fixée sous le nom de Calla d’Orzu, je ne sais trop pourquoi. Réajustement au Corse authentique je crois. Quelques années plus tard nous la retrouvons harmonisée à deux voix, accompagnée à la guitare et propulsée dans une merveilleuse fête de la musique champêtre d’abord puis sur d’autres scènes.
Claude et moi avons en commun de faire des chansons et de les chanter. Nous nous sommes avisé en 2005 puis 2006 que plusieurs de ces chansons surfaient sur les mêmes thèmes ( la femme, la mer, le vent, la liberté …) Nous avons donc décidé de les travailler d’abord en parallèle, une des siennes, une des miennes dans une rigoureuse parité mais en les chantant les unes et les autres tous les deux. Nous avons ajusté, répété fort sérieusement, Claude étant un maître exigeant, avant de les offrir aux oreilles bienveillantes. C’est un régal pour moi. La contrainte devient de plus en plus acceptée pour le plaisir du résultat. « Calla d’Orzu » fut d’emblée retenue par Claude. Pardi ! Ça lui plaisait de faire l’amour avec la mer ! Il connaissait déjà ça ! Pour lui la rencontre eau salée et chantée eut lieu en Grèce. Entre la Grèce et la Corse il n’y a qu’un pas. Ou qu’une brasse comme on voudra !
Nous allons reprendre en février le tandem chantant. Ajouter de nouvelles chansons à la dizaine de celles déjà bouclées.
Une autre particularité avec Claude, c’est qu’il a mis en musique un de mes textes « La femme Toute ». Franc succès un 8 Mars dans un Lycée mixte ! Paroles féminines, musique masculine pour célébrer les femmes !
« Que c’est merveilleux d’être femme
Que c’est beau que c’est doux
Le saviez-vous la belle ?
La belle le saviez-vous ? »

A propos de cette même chanson je l’ai reçue enregistrée sur cassette par une jeune fille avec la manière - jeune fille d’aujourd’hui - de chalouper les rythmes, de syncoper les syllabes. Hum ! des trucs comme ça c’est du nan-nan. Pas parce que c’est VOTRE chanson ( enfin un peu !), parce que c’est un bonbon au miel qui fond dans la bouche ! Du Nan Nan !

Quand le livre qui s’ouvre chuchote, parle, rit
Jusqu’à prendre ta main pour écrire ta vie
Le savais-tu la belle ?
N’être que ce frisson, ce chant, cette voix-Elle
Ce doux balancement aux hanches de l’esprit
Te suffira la belle …

Et l’évocation du bonheur qu’a une chanson d’être choisie par d’autres que sa maman pour être renouvelée, réinventée suffira à la dame qui raconte l’histoire.
Bonsoir !

28 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 9

« Ah ! Chanson vive ! … hélas ! pour recueillir sa voix,
C’est au lieu de l’air juste un faux air que je trouve,
Et je cherche, et l’accent que je risque parfois,
Celui qui vibre en moi toujours le désapprouve.

Elle chante … et je laisse échapper de ma main
Les mots flottants qu’elle me jette à la volée,
Si j’en ramasse un ample, il m’en fallait un fin …
Elle chante et sera tout à l’heure en allée. »

Nous approchons de la fin du poème de Marie Noël. C’est donc le moment d’évoquer cette chanson venue en Corse, qui flamba dans le soleil, l’eau, avant de venir se résoudre sur la plage.

Je reprends mon cahier que j’emmenais jusque sur le sable. C’était les premiers jours du séjour.

« La Corse m’a permis il y a vingt ans de m’arracher à des rivages permis et répertoriés pour nager vers le large, vers la chanson du large, comme hier sur la plage de Copabia.


Cette chanson donc n'a pas encore de titre mais pourrait prendre le premier vers de sa lancée :
« Ah ! Faire l’amour avec la mer »
Ou garder son localisme corse « Copabia ». Elle m’est venue en une brasse, en un éclair, une fois le premier contact un peu frisquet avec l’eau, accepté. Il a suffi que je sorte de l’eau pour en griffonner le début et laisser à deux ou trois reprises une suite s’inscrire. Mais j’ai le sentiment que le couplet qui s’est irrémédiablement noyé était le plus beau. Il nageait si bien, il venait si naturellement au cerveau … Tant pis ! Encore un couplet immortel retourné à la mer sans les microsillons du partage.
J’ai ramassé des morceaux de la mélodie sur le petit flûtiau écossais joint au matériel de plage.
Depuis deux jours, trois bientôt, la chanson m’a choisie pour livret. Elle est là à chaque convocation, de jour et de nuit, définitivement mémorisée, elle est là quasi à l’improviste pour matérialiser le bonheur, « le bonheur au point mort » qu’elle suggère précisément.
Hier, en remontant du rivage vers le sentier bétonné qui rejoint la route d’Acqua Doria, elle s’est déroulée avec grand orchestre : instruments à eau et à vent, depuis les rochers du bas jusqu’aux touffes du maquis … Je l’ai distinctement entendue avec Claire à la flûte, Pierre à la clarinette, Aldo au piano, Pierson à la guitare … et même « Jacques à la batterie ! » m’a suggéré Pierre. Mais c’est hautement improbable avec les occupations de Père Jacques. Qu’importe la marge de réalité qui sera la sienne ! Elle était dans le bonheur de la découverte et dans l’harmonie du paysage. Elle était, donc elle sera.
Le paysage, le moment, Pierre devant moi ou à côté de moi, étaient si présents, si réels que je n’avais vraiment pas de soucis. Je me suis fait la réflexion philosophique capitale : C’est le bonheur !
Le bonheur, c’est cette adéquation parfaite à l’instant que tu vis par toutes tes fibres. Et, ce pensant, ce me le disant, je pouvais faire gaffe à ma marche, à mon escalade, comme lorsque nous avons découvert une petite plateforme en bois installée par quelque autre amoureux face à la baie. Je m’y suis assise, Pierre s’y est accoudé. Pas un humain à crête de vague ou à sentier découvert. La mer, le maquis et nous ! Si ! Un oiseau, ni mouette ni gabian, a traversé l’horizon pour nous indiquer qu’au-delà, c’était encore plus grand, plus beau, plus vert, plus bleu, plus blanc d’écume, plus chuchotant de vent …

27 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 8

Comme le soleil avec la neige, l’un pétillant de l’éclat de l’autre.

On me demande souvent comme ça se passe quand je crée une chanson. La musique puis les paroles ? Les mots avant l’air ? Non ! je réponds toujours : en paquet cadeau. Un mot qui attache l’air. L’air qui entraîne l’expression. Le coup de foudre. L’urgence pour l’un et l’autre de trouver l’union.
A de rares fois j’ai composé une musique sur un texte, un texte sur une musique.
Par exemple quand une compagne de l’APA me propose son texte pour le mettre en chanson. « Sur les marches du silence je viens / Par la porte dérobée te chercher … » Il y avait de quoi être intéressée par le passage de cette porte. J’ai composé une musique inhabituelle au dire de Claire pour ce texte qui n’était pas de moi. Je l’ai beaucoup chantée au piano, je l’ai envoyée mais la sympathie s’est dissoute et la chanson est morte derrière la porte du silence.
Sur un texte arabe très troublant de Qasim Al Chabbi (1909-1934) j’ai aussi mis une musique dans les mêmes accords mineurs que la porte dérobée. J’ai inclus cette chanson dans « L’amour aux sept couleurs » lui donnant la tonalité « indigo » pour moi toujours un peu incertaine entre le bleu et le noir

« Cette vie est une cithare
Et c’est la cithare de Dieu
Ceux qui s’en vont au long des jours
Brodent sur elle une chanson … »



De temps en temps je la reprends et j’ai les mêmes frissons. Le poète est mort très jeune, cette mort continue d’habiter ses mots laissés en témoignage. Y a-t-il dans l’espace de curieuses rencontres entre la musique de l’être et sa traduction vocale ?

« Et la nuit sinistre caverne
Offre un sépulcre à la chanson
Condamne à mort le clair écho
En étouffant sa pauvre vie »

L’inverse se passe mieux. Sur l’air de « Les Vieux » de Jacques Brel j’ai écrit et chanté « le temps se riquinille » ( se rétrécit). Le texte sans sa référence à la musique a été inclus dans un recueil de poésie « Le panier de jarboui ». Je viens de l’en sortir pour lui faire prendre l’air une dizaine d’années après la parution. Il clora « De choses et d’autres ». J’ai prévu d’abandonner le clavier pour le chanter seule à voix nue au milieu de mes chers objets anciens. Comme l’on chantait à la fin des banquets. Sans musiciens, sans technique de sons, sans broderies aucunes.

Le temps se riquinille
A me riquiniller avec lui je ne peux
Vraiment pas obtenir
de doubler au tournant ceux qui partir devant
Aussi c’est par devoir autant que par plaisir
Que j’ai fixé depuis
L’horloge de cuisine sur l’aiguille encore fine
D’un temps libre aux désirs

Allez va ! J’ai tout dit
Au revoir les enfants, Au revoir pas adieu
N’oubliez pas de rire
N’oubliez pas de boire quand le vent est furieux
N’oubliez pas ces mots
un peu simples et fragiles Qui viennent de si loin
A vous les tendre encore
j’ai voulu par malice Toucher encore vos mains.

Ce sera ma conclusion au spectacle. Peut-être que j’entendrais rire le Grand Jacques qui me réclamera des droits de compositeur. Bof ! Je prends le risque.

26 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 7

« Mais comme un écolier qui prend trop bas, trop haut,
La note qu’on lui donne et suit mal la mesure,
J’hésite, à plusieurs fois tâtant le son qu’il faut,
Accrochant ça et là ma voix gauche et peu sûre. »

J’en suis là du poème de Marie Noël et de ma tentative d’élucidation. Ce n’est pas tant sur une chanson à faire que j’hésite : en général ça se passe dans l’assurance et le bonheur que je tiens « le son qu’il faut » mais ici même, dans ce boulot que j’ai entrepris avec vous, autour, à l’intérieur de la chanson profonde.

Ah retrouver la chanson bien douce
La chanson vague sur la mer
La chanson bleue des soirs d’hiver
La bonne chanson familière !

Comme l’écolière que je fus avec tant de conviction et si longtemps, j’hésite. J’hésite la nuit, cette nuit. Vous n’aurez une retranscription que du 1/1000 de mes hésitations nocturnes mentales. Parler de mon père comme je l’ai fait c’est aussitôt entendre ma mère réclamer sa part de mémoire. Parler de la première chanson qui me vint dans mon premier poste d’instit c’est entendre l’avant-première, au jardin, ou sur le chemin pendant que je promène ma première fille dans son landau

Alors ma guirlande j’ai passé
autour du cou de mon bébé
là pour c’qui fut d’la rime en é
y’avait pléthore en vérité

Sans compter celles qui n’ont pas été écrites, fixées, et qui croient en cet instant leur heure venue. Sur le fameux cahier noir je retrouve seulement ces deux mots de démarrage qui n’ont jamais été suivis de quoi que ce soit … puis la moitié du cahier blanche, muette, abandonnée … en instance

Dis maman

Je n’ai jamais pu chanter cette question insatiable à ma mère quand il était encore temps pour qu’elle me réponde. Si j’ai pu, après sa mort, chanter mon père, la chanson de ma mère reste inachevée. Après sa mort je sais que j’ai tiré de mes larmes un petit refrain
Ma rose, Ma rose à moi …
c’est tout ce dont je me rappelle, avec l’air sur lequel je chantais en silence ma douleur.

Déflagration.
C’est évident : La chanson-mère, la chanson-fille.

Je ne peux reprendre, deux heures plus tard, que la suite de l’ancienne chanson déposée dans le cahier il y a bien ? … longtemps. Le tourbillon émotionnel s’est éloigné. Je suis calme. J’aime.

Ah quand le chemin s’allonge sur le tard
Ah retrouver son pas et avec lui l’espoir
Au rythme d’un refrain attacher ses semelles
D’un pas de mirliton danser la ritournelle
Ah quand le passé dans le brouillard s’efface
Quand le présent n’a plus ni goût ni grâce
Retrouver la chanson fétiche
La médaille d’argent qu’on serre entre ses doigts
Petit porte-bonheur pour ceux qui n’en ont pas
Réchauffante étincelle, gentille goutte d’eau
Un air de Mère Michel et de Petits bateaux
Ah ! Voyageur sans bagages
D’un train fantôme sur un quai désert
Emporter la chanson
Douce et familière
La chanson vague sur la mer
La chanson bleue des soirs d’hiver
Et puis s’en aller prendre l’ai ai ai r …

25 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 6

Des matins calfeutrés de neige. Ces retrouvailles sur la piste aux chansons si agréables avec vous. J’aime glisser ça ne fait pas de doute et en compagnie amicale encore plus ! Hier matin, après le blog, je me suis saoulée avec « merci M’sieurs dames » au piano. Je cherche et j’ai presque trouvé une deuxième voix. Puis j’ai repris les textes que je destine à « De choses et d’autres ». « Dessous mon chapeau » m’a retenu un long moment : je me suis régalée à faire le pitre avec un chapeau de musicien de fanfare début du siècle déniché à Sète dans une brocante. Il a une petite mandoline brodée sur la tranche. Sacrée coïncidence dont je ne me rends compte qu’en vous la disant ! J’ai une photo de Papa à 20 ans, avec les conscrits du village, une mandoline dans les bras. C’est de la frime ! Papa n’avait pas d’instrument de musique et ne savait jouer d’aucun. Du coup je bondis vers le désir d’être accompagnée, au moins une fois, par une mandoline. Je sais où trouver la mandoliniste : Mireille, je vais l’appeler … Et l’occasion sera également bonne d’un montage photographique avec celle qu’une autre brocante m’a procurée. J’y cours.
Un vieux monsieur qui m’avait beaucoup appris sur le patois : Jean Richerd, des Avenières ( je donne son identité car il ne reste que son nom aujourd’hui) avait tenté de m’apprendre la mandoline et j’ai encore quelque part une feuille de doigtés de sa main.

Dessous mon chapeau
je ne crains plus rien
Je ne crains plus ni
le soleil ni la lune
Dessous mon chapeau
Je ne crains plus rien
J’ai le crâne au chaud
dessous mon chapeau …

Pour l’unité du thème de ce jour, est-ce que Marie Noël penche aussi parfois du côté de la mandoline ? Mais, oui ! Ecoutez ! Entendez-vous le petit griselis, le rire gamin de la mandoline ?

« Moi, j’écoute … Je ris quand l’une rit au jour ;
J’ai les larmes aux yeux quand l’autre est bien touchante
Quand elle est tendre, ô Dieu, j’ai le frisson d’amour …
J’écoute et ce qui chante en moi je le rechante. »

J’écoute et ce qui chante en moi je le rechante …

24 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 5

Sur la neige épaisse ce matin mais sur le bruit pétaradant de la tondeuse à neige s’installe dès le réveil ce projet de m’expliquer ma chance aux chansons. Le démarrage m’est donné par le mot d’Aben « je chantais, minot, à la fin des repas » Le « minot » qu’il était, le petiot qui avalait tout goulûment ce que la vie lui montrait d’attrayant, c’est bien ce frérot d’enfance que j’avais détecté tant dans le vocabulaire que dans les souvenirs. Aussi c’est pour Aben en premier que je vais évoquer ce creuset de ma « vocation » !



La longue table familiale de la salle à manger a été équipée de toutes ses rallonges + la table de la chambre des parents qui n’est pas petite non plus. Sont venus, selon l’occasion, les voisins, les cousins … Le repas copieux est terminé, Maman va pouvoir revenir de la cuisine, s’asseoir. La vaisselle attendra. Je bous d’impatience. Allez ! Arrêtez les parlottes ! On n’a pas que ça à faire ! Il faut chanter.
Chanter ! La pause dans une vie bien remplie, toujours occupée au travail : les bêtes à soigner, les récoltes, la maison à entretenir. On fait tout soi-même à cette époque. La famille est une entreprise à gagner sa vie. Mais une fois que le pari est tenu, qu’on a le ventre plein, on peut chanter, non ? Papa se lève, repousse la chaise contre la table et les blés d’or viennent se coucher sous le vent de sa belle voix. Il est entendu que Papa « chante bien ». Naturellement, puissamment, amoureusement, comme il vide son verre de vin … Lyrisme des mots bon marché qui glorifie la belle vie saine paysanne et puis, immanquablement, goualante des pauvres gens. La lune nous regarde mais sa lumière, n’en doutons pas, est blafarde et les pauvres femmes qui s’y laissent brûler dans l’enfer des villes ne pourront plus la regarder en face. La mort, la pauvreté, la déchéance : tout y passe à côté des grands boeufs de nos étables.
Les uns après les autres, dignes rejetons de notre père, nous repoussons la chaise en gestuelle de chanteur d’opéra. « Allez Gie monte sur la chaise ! » Moi, la petite, grimpe alors sur la scène, là où je pourrais être mieux vue, là où ils veulent que je me montre. Et j’exulte. En renouvelant l’acrobatie je ne cherche aujourd’hui qu’à retrouver cette éminente position sociale et familiale.
Mon succès est très franc dans les années 45 quand, enrôlée par mon parrain dans les rangs des partisans, j’affirme :
« La DCA tire mais ne touche rien
Les Boches se retirent
Comme des petits lapins … »
Car notre chanson est patriote. Elle véhicule nos intérêts, nos conditionnements, nos espérances … Elle tend déjà la trame de mes chansons futures.
« l’printemps, les fleurs, les p’tits oiseaux, l’amour
Voilà ce que toujours l’on chan an an te
… Voilà ce qu’on chante … TOUJOU OU OU RS !
Ah qu’elle est magnifique l’affirmation finale, l’insistance de fin de refrain, la pose de la voix qui se grise de son chant sur la dernière syllabe. C’est qu’il s’agit de démontrer qu’on a « du coffre » ! Comme le papa !

« Vieux poète, oiseleur, tends-moi comme un filet
Ta mémoire, et prends-moi ces belles que j’écoute.
Retiens dedans surtout ce brin de mot follet
Qui danse au bord mouvant de ma pensée en route. »

Le poète, l’oiseleur du poème de Marie Noël, je n’ai pas à m’interroger sur son identité. C’est Le papa, notre Papa, le Phonse, bien sûr. Cependant quand Claire, récemment, m’a suggéré d’inclure ma chanson sur mon père dans le spectacle de plein air que nous préparons je lui ai aussitôt répondu « oh non ! j’peux pas ! » Je ne peux chanter cette chanson-là que dans le huis clos d’une salle et la distance que crée la scène. C’est déjà beau que ma voix ne se casse pas à la fin.

Pas la chanter en plein air, non ! mais avec vous, mes amis de tablée, murmurer son premier couplet

Il avait des yeux outremer
Je passais outre à sa colère
Et j’en bus toute l’eau salée
Il avait le cœur outre ciel
J’y plongeais mes deux mains pareilles
Entre les doigts le fit couler
Comme du lait …

23 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 4


« Et toutes je les veux, et toutes à la fois
- la dernière surtout dont j’ai le plus envie -
Je vais les mettre en cage et leur lier la voix
Ou je ne dormirai plus jamais de ma vie. »

C’est pour les serrer toutes dans mon espace vital, mon tabernacle d’écriture, ma cage volontaire de repli et d’extension, que j’ai entrepris d’organiser des classements, de remplir des classeurs, des dossiers d’ordinateurs, des cassettes audio, des CD. Le premier cahier collecteur des premières chansons avec sa couverture fatiguée en carton noir, de tous m’est le plus cher ! Je n’ai eu qu’un petit bond de côté à faire pour le tenir.
La première inscrite, si ce n’est gravée dans la pierre au moins dans ma voix, a un embryon de partition. Notation de croches et de noires, numérotées selon les lames d’un xylophone
1-3-3-2-1 …
C’était bien ce que je pensais hier en la trouvant dans un dossier d’ordinateur. C’est bien la toute première. Le cahier qui m’a suivi pendant 45 ans l’atteste. J’ai perdu des meubles, des bijoux, des papiers administratifs importants, des porte-monnaie et des valises, des chapeaux et des chaussures, des maris … pendant ces années de chambardement, de déménagement, d’exode mais pas de chansons ou très peu.

LE VENT DE L’HIVER

Le vent de l’hiver
souffle sur tes doigts
Prends garde à toi !

Le vent de l’hiver
écaille les bouleaux
As-tu pris ton manteau ?

Le vent de l’hiver
chasse les moutons blancs
Demain peut-être

Le vent de l’hiver
aiguisera ses dents
sur les tuiles de ton auvent

C’est vraiment une toute petite chanson. C’était l’époque de mon premier poste rural. J’avais une toute petite fille dans un berceau, des élèves de plusieurs sections dans une même classe. Je commençais tout à la fois, persuadée de mon bon droit à l’invention et de la valeur de mes diplômes. J’ai pris le temps tout de même pour une chanson. Je remercie celle que j’étais alors d’avoir eu ce réflexe conservateur. Il faut remarquer que cette première envolée était prémonitoire. Toute courte et de petite mine qu’elle soit elle insiste : Il faut se prémunir du vent qui envole les amours, les bonnes intentions, les meilleurs dons. Il faut garder ses doigts au chaud.
Ma manière de tenir compte de l’avertissement a donc été de faire-chanson avec les coups de froid comme avec les coups de chaud.

Voici pour l’une : la première. Pour l’autre : la dernière, vous savez tout.
Merci M’sieurs dames !

22 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 3


Forte de vos encouragements continuer le pèlerinage (ou les pérégrinations) sur la route aux chansons et tout d’abord reprendre le pas de Marie Noël ( nom de famille : Noël comme Arbre de Noël)

« Ah ! Je veux de ma main pour les garder longtemps,
Je veux, pour retrouver sans cesse ma trouvaille
Toutes les attraper avant que le printemps
Les emporte de moi qui me fane et s’en aille

Toutes, oui ! L’une est gaie et mon cœur joue avec ;
L’autre, jeune, mutine et qui fait sa jolie,
Malicieuse un peu, le taquine du bec …
Mais l’autre me l’a pris dans sa mélancolie ;

L’autre frémit autour de moi comme un baiser
Si doux que j’en mourrai si ce chant continue
Et qu’au bord de mon cœur où son cœur s’est posé
Une faiblesse après demeure et m’exténue.

Non ! Je vous assure, elle n’exagère pas Marie Noël ! Il y a bien une captation, un ravissement dans le sens de syncope. Une petite mort pour une renaissance.
Mallarmé :
Vertige ! Voici que frissonne
L’espace comme un grand baiser
Qui, fou de naître pour personne
Ne peut jaillir ni s’apaiser

Tout y est, dans Mallarmé comme dans Marie Noël : l’étourdissement, le baiser. Le besoin d’union, d’unité. Sûr que la chanson est alors extase lyrique, désir sexuel de brûler. Souvent liée à un amour charnel, commanditée par lui, elle a besoin de dire, de crier la joie d’aimer ou la détresse du manque.
La chanson, ma chanson : un bisou voluptueux, un amour de bisou qui se pose sur les lèvres et chatouille jusqu’en bas du dos …
Toutes ? Pas au même titre. Il y a des chansons-pinsons qui se contentent de picorer le point du jour et puis vont voir ailleurs … Il y en a aussi - quelques-unes sur toute une carrière ! - qui sont des oiseaux-lyres. J’en garde le souvenir ébloui de la rencontre. Je vous en raconterai une. « Calla d’Orzu » Souvent ces chansons-là ont une force émotionnelle canalisée qui les font adopter par ceux qui les écoutent. Ils ne se trompent pas sur leur intention. Il ne s’agissait pas de montrer son nombril sur la plage, non ! Il fallait aller nager, voler en pleine mer, boire la mer jusqu’à mourir et puis revenir avec l’oiseau sur le sable. S’y déposer.

« Ah faire l’amour avec la mer
En long en large et en travers …
En diagonale et en quinconce … etc

Mais ce n’est pas le jour de « Calla d’Orzu » ! L’eau est trop fraîche ! Souvenons-nous seulement de cette promesse de récit avec grand orchestre.
Toutes ? Combien sont-elles ? On me pose souvent la question. Je ne sais que répondre ? Je suis depuis toujours brouillée avec les chiffres. J’ai bien tenté un inventaire mais il n’aboutit jamais.

« Je n’peux pas j’ai trop à faire, j’ai les peupliers
les grands peupliers ma chère, les grands peupliers
… »
On suggère :100 ? je réponds « Oui, peut-être. » Peut-être plus. En bonne année de six à 1O nouvelles et plus de 10 années de pratique sérieuse. Décimalement il devrait y avoir ce compte rond mais est-ce que ça compte le nombre des chansons que j’ai faites ? Que le compte soit rond ou carré ce qui compte c’est qu’elles tournent.

« Ah tournez tournez tournez donc
pauvres manèges, pauvres manèges
ah tournez tournez tournez donc
Avec vous je tourne en rond …

A demain où je vous parlerai de l’une ou de l’autre …

21 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 2


Je ne sais si le thème à poursuivre va me turlupiner toutes les nuits jusqu’à ce que je lui ai réglé son compte, mais cette nuit est décidément bien insomniaque. Peut-être l’effet du trop de Clairette de Die au repas municipal hier à midi. L’ivresse (légère) a pourtant été dissipée par une promenade après dîner dans les prés en compagnie des amis à qui j’ai annoncé la première de DE CHOSES ET D’AUTRES pour le 8 février. Ils viendront, m’ont-ils promis. Du coup j’ai la frousse. S’ils allaient trouver ça mauvais ? Le soir, au lieu de m’endormir, je révise dans ma tête tous les textes, je peaufine les transitions. C’est ensuite, après un bon travail de mémorisation dans le noir, la valse des idées folles, le méli-mélo chansons, souvenirs, projections, regrets … Ce n’est pas une, deux, quelques personnes … qui vont m’aider à sortir au grand air tous mes airs obsédants, c’est toute une armée qu’il me faut. Venez les amis- Blog ! Venez les voisins du lotissement ! Venez mes enfants, mes petits enfants ! Oh oui venez ! Même les morts ! Arrivez pour me rassurer ! Je joue ma dernière cartouche !
Ce serait si commode si au lieu de les chanter moi-même je pouvais les vendre. Comme des salades. Mais il me faut tout faire, les paroles, la musique. C’est moi seule qui doit les prendre en main, les mettre en bouche. Et comme, par dessus le marché, elles me racontent c’est à moi de juguler l’émotion qu’elles me procurent encore pour les servir avec le maximum de « métier » froid et lucide. Je me souviens de ce que me dit Jean-Pierre Meyrand avec qui je fis des stages pour « chanter comme un soleil ». Quand je lui exprimai mon désir, vague mais lancinant, de chanter en public, il me répondit simplement « Et bien vas-y ma fille ! » Tout était dans ce « ma fille » plus que dans le « vas-y ». Jean-Pierre est bien plus jeune que moi. Il pourrait être mon fils. Il joua le rôle du Papa, mon Papa que j’admirais tant quand il chantait. Ce ton d’évidence, voire d’urgence, presque de commandement, que Jean-Pierre a employé m’a convaincu que j’avais les ressources pour y aller.
Alors j’y vais !
Jean-Pierre qui, quand tout se passe bien, ne dit pas « Vous avez bien chanté » mais « ça chante ». Quelque chose chante en vous. Quelqu’un peut-être est là qui vous accompagne dans votre chant. Ne cherchons pas à nommer ce « ça » qui ouvre les vannes, déploie les ailes. Contentons-nous de lui obéir !
Surtout qu’elles sont bien plus futées que moi mes chansons. Elles sont sans questions. Elles choisissent le meilleur moment. Elles imposent leur présence avec une gentille obstination. Elles transgressent les interdits et les mauvais souvenirs.

« Je ne sais pas de quels oiseaux, en quels pays
De buissons creux et pleins de songes elles sont nées …
Elles m’ont rencontrées et moi je m’ébahis
D’entendre battre en moi leurs ailes étonnées.

Mais comment, à la file, en est-il tant et tant
Et tant encor, chacune à la beauté nouvelle,
Comme une abeille après une abeille sortant
Du petit coin de miel que j’ai dans la cervelle ? »

20 janvier 2007

LES CHANSONS QUE JE FAIS 1


« Les chansons que je fais , qu’est-ce qui les a faites ? …

Souvent il m’en arrive une au plus noir de moi …
Je ne sais pas comment, je ne sais pas pourquoi
C’est cette folle au lieu de cent que je souhaite. »

Ce poème ouvre le recueil « Les chansons et les Heures » de Marie Noël. Quand je suis allée le chercher, pensant à Mariel pour lui faire connaître la poétesse (1883-1967) je l’ai relu jusqu’aux larmes et au rire, tant il paraissait coller à ma peau. J’ai l’intention de vous le distiller peu à peu en vous parlant de mes chansons.
La dernière arrivée, « comme ça !», même pas sur la pointe des pieds mais en fanfare, juste entre le petit déjeuner et la salle de bains, est cette LULLABY que me réclamait David dans ses vœux de Noël. Quel bonheur pareille demande ! Je suis allé consulter l’Harrap’s : Lullaby = Berceuse. A proprement parler ma chanson, étant du matin ensoleillé et d’un rythme guilleret, n’est pas une berceuse, plutôt une réveilleuse. Mais j’ai trop de plaisir à m’emparer d’un mot qui chante déjà si bien.

Hier au soir je l’avais glissée, la chanson lullaby or not-lullaby dans mon sac et je l’ai servie à l’apéritif de notre assemblée générale d’Alentour, confrérie de chanteurs musiciens. Jean-Claude, sur le dernier couplet a rajouté un refrain « Merci Madame ! » C’est la Madame, Jean-Claude qui doit remercier quand on l’écoute. Un poème peut se satisfaire de la voix murmurante, de l’intimité avec soi qu’il a créée. Mais une chanson a besoin d’être entendue ! Et quand on la voit ouvrir aussi bien les yeux que les oreilles, le sourire que la tristesse, comme on est heureux de cette arrivée impromptue acceptée ! Car pour qu’une chanson éclose j’ai souvent remarqué trois conditions :
- Je suis seule.
- Il fait bon chez moi. Chez moi est vraiment chez moi. Tout attend dans la quiétude ( pour les chansons gaies) Pour les tristes il y aura aussi cette connivence du dehors avec le dedans. Il y a dans l’air cette attente de la vérité du moment, encore inconnue mais qui s’annonce par des signes ténus en soi et autour de soi.
- J’ai du temps devant moi. Même si j’ai des projets, je les ferai passer après. Quand la chanson vient, il faut se donner toute à elle et elle vous le rend bien. Arrivée sur un petit air, une phrase, un mot, elle attrape un papier dès le deuxième couplet, elle se répète l’air et tout s’enchaîne à merveille. Oh je sais ! D’autres considèrent qu’une chanson se travaille, se reprend sur le métier, se peaufine, se juge avant de s’en aller chercher reconnaissance. Moi, c’est rare que ça se passe comme ça. Elle se dévide, se déride, se glougloute d’un seul coup. Jusqu’à la fin. Ne me demandez pas pourquoi elle est finie. Non ! Elle est finie c’est tout ! Je peux aller faire ma toilette. Et si Pierre téléphone je peux lui annoncer
- Ah tiens ! J’ai une nouvelle chanson Ecoute le refrain ! Il est très compliqué ! « Merci m’sieurs dames ! »
- C’est tout !
- Ben oui !
Si le soir, quand il rentre, il oublie de me demander « Et alors cette chanson ?», je suis très vexée et je lui en veux beaucoup.

« Dites-moi … Mes chansons de toutes les couleurs,
Où mon esprit qui muse au vent les a-t-il prises ?
Le chant leur vient – d’où donc ? – comme le rose aux fleurs,
Comme le vert à l’herbe et le rouge aux cerises. »

19 janvier 2007

LE LENDEMAIN



Proposition de l’atelier d’écriture ; on connaît le code : 1500 signes, une heure au plus.

Pourquoi est-ce que je pense automatiquement "le lendemain elle était souriante" J'ai tout oublié de la référence mais il se trouve que si "ELLE" est moi, comme si souvent ! je suis souriante ce matin. C'est le lendemain d'une après-midi d'animation à l'orgue de Barbarie. Nous étions conviés à Ecully près de Lyon. Plaisir de cette invitation lointaine. Ennui de faire la route et ses kms mais le très certain plaisir que notre réputation animante soit connue en dehors de nos frontières limitées. Donc, nous chantons, nous contons. Le public est celui d'un club "d'anciens", une centaine dans une salle étirée, basse de plafond. Nous y avons trouvé la sono tout installée. Un intervenant est prévu avant nous pour proposer des services " à la personne". Les spectateurs sont là bien avant l'heure et nous n'avons pas pu faire les essais de sons correctement. Les débuts sont un peu difficiles. Mr Larsen s'est invité. Les conversations de retrouvailles bruissent de tous côtés. Je me sens prise d'une énergie de conquête. Allons-y ! Suffit de trouver la bonne position pour les différents micros. Pour la première histoire je m'installe sur ma chaise de paysanne roublarde et ça marche. Le silence se fait de plus en plus complice. Tout va bien se passer, tout se passe bien. A leur tour les chanteuses se font connaître, les danseurs réclament un tour de valse. Un très vieux monsieur de 92 ans, élégant et disert mais sourd, retient fermement mes mains dans les siennes. Amoureux !

18 janvier 2007

HIER/AUJOURD'HUI


Je suis passée par A. pour rentrer à St Nizier. Le portail de M est ouvert. Tant mieux : je vais pouvoir m’arrêter pour lui souhaiter la Bonne Année. Justement voici le museau de sa voiture qui va sortir. Garage un peu risqué. Embrassades. Un saut au supermarché à l’opposé de la petite ville pour aller chercher le pain et le journal de sa voisine. Pourquoi si loin ? Parce qu’il est moins cher de quelques centimes, le pain. M. aime toujours autant rendre service, se mettre au service de … Je risque un « elle exagère ta voisine ! » De quoi je me mêle ?
Le pain livré, nous déjeunons ensemble au kebab. Mais oui ! il y a un kebab à A. Nadia entre. Elle m’a été annoncée. Peut-être est-ce une ancienne élève. Non ! Elle a eu comme prof ma remplaçante. Ça me fait plaisir de l’entendre parler avec enthousiasme de cette prof d’histoire-géo qui la passionnait. Le patron du kébab lui aussi aimait l’histoire-géo. Il est arrivé gamin à A. Maintenant « grâce à Dieu » ça va. Il ne doit rien à personne. Il y en a qui ont mis vingt ans avant de passer la porte de son petit restau. à cinq tables. Les Français, c’est pas facile de comprendre leur mentalité.
Nadia n’aime pas les oignons dans le sandwich. Moi, c’est le poivre de la viande qui ne me convient pas. Qu’à cela ne tienne ! Je lui passe mon assiette, le patron me trouve une pomme et une orange sans poivre. La conversation roule allègrement de Untel à Unetelle, des maladies incurables aux déménagements hors de la région. J’apprécie d’être liée à cette conversation par des liens affectifs anciens et des préoccupations actuelles. La sympathie circule. Il n’y a pas de barrière. On se raconte, on se montre les photos. Le patron offre un thé turc qui se trouve être de la poudre d’orange chaude très agréable.
Avant de nous quitter, M et moi, si nous allions rendre une visite impromptue à S ? Le portail fermé à clé s’ouvre pour nous malgré la méfiance. S a 86 ans. La solitude est lourde à porter. Là encore la conversation se précipite. Elle nous raconte pêle-mêle ses enfants, ses petits enfants, ses arrière petits enfants. Je n’oublierai jamais que j’ai chez moi une veste que S m’avait tricotée en laines multicolores quand j’habitais à A. Je la garde dans mon armoire bien qu’elle je ne la porte jamais. Un don d’amitié précieux quand S. tenait la bibliothèque et que j’habitais juste à côté …
J’ai un peu mal à la tête quand je quitte A. Le brassage des souvenirs ? L’abondance de mots ? La vieillesse des choses et des êtres dont je perçois les douleurs ? Et pourtant cette halte non programmée fut le cadeau de la journée. Avec le thé turc. Une découverte aussi. La génération de mes élèves a l’âge des responsabilités. Nadia travaille dans un établissement psychiatrique. Le patron procure aux actifs, ouvriers, jeunes, en recherche d’emploi … un repas au chaud et bon marché.
« Grâce à Dieu » souligne notre hôte … ça ne va pas si mal sous le soleil de France, surtout ce jour-là de janvier où on se souhaite encore des vœux. Quel Dieu ? Celui des uns ou celui des autres ? Apparemment celui des hommes et des femmes de bonne volonté.

16 janvier 2007

TIMOLEON ET LES ECUREUILS

Maintenant qu’ils viennent de paraître dans la revue municipale je me sens autorisée de vous transmettre un sonnet d’Ernest. Vous avez beaucoup de sonnets en réserve, je n’en doute pas, mais combien dont la chute est patoise ? Sur écran vous ne pourrez apprécier l’accent, le bel accent du terroir, ni la malice dans les yeux d’Ernest. N’empêche ! J’espère qu’il vous parlera, ce sonnet, autant qu’il me parle. Et quant à parler, même de nos douleurs, et à en rire, vaut mieux ça que de rester au lit, non ?
Peu ou prou, un sonnet ça fait du bien par où ça passe !
***

De douleurs tout perclus, comme on dit dans les livres,
Faisant bien piètre tâche à l’aune des longs jours,
Le vieux Timoléon sait conserver l’humour
Qui l’aide à supporter son inconfort de vivre.

Ne pouvant guère aider aux travaux agricoles
Il prend ses deux bâtons, rassemblant son courage
Pour entreprendre encor un tour de son village
Qu’il allonge ou restreint sans aucun protocole …

Il sait où s’arrêter quand ses membres sont lourds :
Le mur vers la fontaine ou le porche du four ;
Ce matin, dans le cèdre, il a vu le poil roux

De plusieurs écureuils en folie de voltiges …
Une larme a coulé embuant son vertige :
« Ah ! ce qui z’ant de rest, é m’aigari ben prou ! »*

*douleurs : terme générique réservé le plus souvent aux rhumatismes
* Ah ! Ce qu’ils ont de trop m’arrangerait vraiment bien »

15 janvier 2007

"OCCASION DE PENSER"


nuages : occasion de flotter ?

Proposition de l’atelier d’écriture:
OCCASION DE PENSER
Toute occasion de penser est-elle bonne à prendre ? Mais qu'est-ce que "penser" ? Quand les mots tournent en la cervelle, ricochent les uns sur les autres, appareillent pour un voyage nouveau, poétisent, prophétisent, abordent sur un rivage inconnu ... est-ce qu'ils pensent ou se laissent simplement aller à respirer ? Quand je me saisis de ces mots, qui viennent de tout un passé, de toute une culture, de toutes sortes d'influences et de croisements, est-ce qu'ils me servent à penser, est-ce qu'ils renouvellent ma pensée ? Quand je confie ces mots, plus ou moins de hasard, à un papier, à un écran, à une trace qui les fixent pour un lecteur ... est-ce que je cherche à me rendre intéressante, immortelle avec eux ? sachant bien que les papiers brûlent, que les écrans s'éteignent.
Cet atelier est à la fois une occasion de penser et une illusion de pensée, une réalité cependant.
Certains voient sous les mots des courants souterrains. Ce ne serait pas le contenu exprimé qui compte mais les analogies, les rencontres, les rejets qui agitent la matière verbale ... Sans doute, peut-être ...
En tout cas, en tout état de choses, je veux que cette prose, la mienne, secrète ou limpide, soit plus qu'un moment "sympa". Je lui confie la tache de me disposer à penser au moment choisi. Plus d'interrogations que de réponses ? Pas d'importance ! Je veux, comme à 20 ans, comme à 40, à 10, à 1 peut-être - Quand commence la pensée ? Avec les mots ou avant eux ?- qu'elle me lie, qu’elle me lise.

14 janvier 2007

SE RECHAUFFER L’ARDEUR


Dans le froid, le vent, lancées vers vos montagnes
Se confiant à leur rougeur,
Point d’ailes comme les vôtres, mes grives en décembre,
Moi je baisse la tête et j’amarre à la rive,
Coureur de vertes eaux originairement ;
Oui, nous sommes pareils lorsque la peur nous crible
De son savoir jamais usé.

Le soleil disparut sur sa palette étroite,
Taisant son lendemain fatal.
Nous ouvrîmes de guerre lasse,
Sur la terre enfantine l’échec d’un bref sommeil.

René Char
Le gisant mis en lumière

( Je recopie le texte avant de le donner à Emmanuel et Odile, en pensant plus particulièrement à Mariel)

13 janvier 2007

LULLABY (more especially for David)

Pour la compagnie sur la route
A petits pas
A grande enjambée, en déroute
En entrechat
Pour l’heure préparée à la table
A boire le thé
Pour les mots doux, pour les vocables
Enrubannés

Merci m’sieurs dames !

Pour, ne serait-ce qu’un mirage
Au ciel couvert
Cette éclaircie avant l’orage
Juste un éclair
Pour la carte encore postale
Encore postée
Votre main sur tous les pétales
De l’amitié

Merci m’sieurs dames

Pour ce petit rien qui rassure
La nuit tombée
La botte de foin sous l’aiguille
Empoisonnée
La lampe ouverte quand le froid gagne
Le deuil soudain
Et la musique de Cocagne
Pour les matins

Merci m’sieurs dames

Vous avez réparé mes routes
Mes pull over
Vous avez ri devant mes doutes
Surtout l’hiver
A gorge déployée vous mangeâtes
Quoi m’étouffait
Si je vais bien c’est grâce aux strates
De vos buffets

Merci m’sieurs dames

Dans nos étapes provisoires
Vous avez mis
La halte auprès de l’abreuvoir
Et l’eau au puits
Retenu mon nom sur vos lèvres
Posé baisers
Si je vais bien c’est que je rêve
Au ciel d’été

Que vous m’avez déjà montré

12 janvier 2007

BANDITS MANCHOTS


Nous sommes allés, Marie et moi, au Casino d’Uriage pour voir une exposition d’une peintre-calligraphe que nous avions déjà eu l’occasion d’apprécier en un autre lieu.
Soleil sur la petite ville de cure, Casino flambant neuf aux murs orangés rutilants. Bon c’est normal ! Il faut réveiller la petite ville somnolente, ses pâtisseries, son petit casino avec petit c, ses rues quasi désertes en cette période où les Thermes sont fermés.
Mais au Casino il y a foule. Nous devons montrer cartes d’identité avant de franchir le pavillon. Deux cerbères à la porte du paradis. N’entre pas qui veut !
Salles de jeux dans l’ombre, basses de plafond. Nous zizaguons entre les postes. Une personne, deux, quelquefois trois rivées à leurs machines. Nous atteignons en contraste la salle de restaurant ruisselante d’or et de rouge. Je prends une photo prudente du lustre et de son reflet, non sans avoir levé le petit doigt en signe de demande, mais un autre gardien du temple intervient. Je lui montre ma photo pour lui indiquer que je ne suis pas en chasse journalistique et que l’identité des joueurs m’importe peu. Je n’en connais aucun. Je les connais tous : retraités en rêve de confortables retraites, chômeurs en rêve d’emploi, femmes esseulées en rêve de piment pour assaisonner la longueur de leurs journées mornes …
Et dire qu’il fait si beau dehors !
Nous découvrons finalement les tableaux, accrochés à des piliers. Le piano à queue est fermé. La musique d’ambiance insipide et la serveuse du bar vraisemblablement payée au smic ! J’aimerais bavarder avec elle mais qu’en penserait la direction musclée ?
Je ne me trompais pas sur l’ambiance. Je lis dans Le Canard de cette semaine ces précisions :
« avec 193 maisons de jeux la France est championne d’Europe/…/ le produit des jeux (plus de 2,7 milliards en 2006) continue d’augmenter /…/ A Enghien on est passé de 130 à 350 machines à sous /…/ dans les casinos la loi anti-tabac ne s’appliquera qu’en 2008, 75 pour 100 des employés sont payés au smic et surtout ( ce qui me fout en rogne) « le protocole en question prévoit un contrôle généralisé à l’entrée »
Bien qu’il ne soit pas encore signé les établissements se sont empressés de l’appliquer « à titre expérimental ». J’aurais pu refuser de montrer ma carte.
Vous ai-je dit que, si je voulais, je pourrais avoir gratuitement une carte d’accès permanente qui m’éviterait de stationner dans les chicanes d’entrée ? Intéressant non ! Je vais peut-être me la faire faire cette carte et gagner le jack pot, comme cet ami lointain qui, après cela, a flambé sa vie au jeu. Qu’est-il devenu ? Je pense à lui dans ce lieu trouble.
Je pense à toi F. Tu jouais bien de la guitare. Tu étais joyeux et amoureux de la vie.
Casinos : bandits pas manchots, bras multiples, gros bras.

11 janvier 2007

ça marche !


Duplicata ! mais l'amie ne m'en voudra pas, puisqu'elle a déjà pris connaissance de l'original et m'y a déjà répondu

ça marche les e-mail, c'est merveilleux ! Quand il y en a !
Mais j'aime toujours autant les lettres de ta main douce. Douce au coeur, douce à l'âme.
Alors tu as voulu faire cramer ta cuisine ? Comme je connais la situation ! Laisser sur le feu pendant que dans l'esprit on a déjà mis quelque chose d'autre « sur le feu » ! Ah ces filles toujours dans la lune avec leurs histoires. Si j'étais ta mère je te filerai une bonne fessée.
J'ai tapé trop vite, le clavier avait enregistré "filmerai" amusant le lapsus non ?
L'autre jour je demande au dico de l'ordi pourquoi il me souligne en rouge " zigzaguant" et sais-tu ce qu'il me propose en changement ? ZIZOUNETTE! No comment ! J'ai rigolé ! Qu'un ordinateur connaisse mes plus secrètes pensées zigzagantes ...
Je me suis réveillée quand cinq heures sonnaient. J'ai mariné un peu dans mes rêves. Pas marrants mais intéressants ( comme tout ce qui vient de ma cervelle !) Encore un abandon au milieu d'une ville inconnue. Où suis-je ? Je ne retrouverai pas le chemin. Où est-il, lui ? Je reviens en arrière à un carrefour, ah le voilà " Je l'appelle !" Il a son imperméable. Il se retourne, je m'approche, ben non ce n'est pas Lui ! Comment vais-je retrouver le bon chemin et il fait froid et je n'ai pas de manteau, etc ... etc ... Trente ans après je l'appelle encore pour me sauver ! Et j’ai encore froid !
L'imperméable du rêve est celui de Mr Ex qu'il portait à 16 ans quand il me charriait sur son vélomoteur, c’est bien le même que dans la réalité.
La réalité d'hier était sans angoisse. Rien que du bonheur. Rien que du bon gros vrai. Ta lettre, une de Jeannette du Jura ... Je suis allée voir Sylvia et Marie-Laure à Engins. Je découvre un hameau nouveau superbe en dessus de la route principale, juste après les gorges. La route est sèche. La neige a fondu. Il fait beau. Je trouve tout-de-suite la "maison pointue" ( une maison dont le faîte imite la ligne des sommets). Je prends deux photos. J’apporte à Sylvia "mes syncopes" ( veux-tu lire?) J'amène aussi cinq chansons dont la petite dernière de la veille pour qu'elles choisissent celle qu'elle veulent chanter toutes deux cette année. Je leur parle aussi de mon projet tout juste bouclé " DE CHOSES ET D'AUTRES" que je lance le 8 février sur la grande scène de "L'atelier" ( au moins 30 personnes !) Puis je vais à Villard rejoindre le groupe de conteurs qui se met en place …
Etc ... Etc ...
ça marche, ça roule. Pour toi, pour moi.
Va falloir que j'aille à Grenoble chez l'olphtalmo. 7H 45 le rendez-vous, pris il y a trois mois !
Je t'embrasse gros fort. J'ai été toute guillerette de commencer la journée avec toi.

10 janvier 2007

PIANO-GARAGE



Bien que grands-parents branchés ( ou s’efforçant de l’être) nous avons encore dans la maison quelques jouets archaïques (dînette, crayons de couleur … petites voitures. ) Dimanche, pendant le repas, c’est d’elles, les autos, que se souvient Théotime pour les réclamer aussitôt et aller quérir la boîte dans le placard.
Je les retrouve rangées sur le piano. Prêtes au départ. Les Buick en Do, les Chrysler en mi, Les Peugeot en sol etc …De quoi jouer sur le piano-garage une sonate en sans-plomb 95 ou 98.
Siméon proteste contre les obligations du solfège( il suit un cours de batterie et croit pouvoir s’en passer ) J’essaie de le convaincre qu’il vaut mieux s’atteler au solfège à 11 ans qu’à 50, comme je l’ai fait. Il proteste mais je le retrouve copiant sur papier-musique le « Noël Blanc » que j’ai commenté et joué pour lui en application des bons principes. ( Mais non ! ce n’est pas si difficile. La musique c’est comme les maths, suffit de s’y mettre !)
J’ai dû être éloquente. Un moment après j’entends la mélodie qui s’échappe du piano, redevenu piano.



Elouan réclame ciseaux, carton, papier, couleurs pour composer un cadeau à Papa. Règle du secret absolu. Défense de se pointer dans l’atelier de l’artiste. Il y a de tout dans cette œuvre, des trophées de hockey, une jupe de femme suspendue dans les airs, beaucoup de flocons de neige : de quoi remplacer leur absence en ce moment ( mais il a tout de même pu faire un vrai bonhomme avec l’indispensable carotte pour le nez pas encore mise sur la photo, une vraie carotte qu’il choisit attentivement : non, pas celle-là, une plus longue) C’est moi qui découpe les dessins à coller sur le tableau final pour gagner du temps avant le départ. Mais l’’essentiel est l’emballage avec du beau papier brillant. ( pas celui qui a déjà servi et que je lui propose, « Non ! le beau, les étoiles ! »)
Pourquoi je raconte tout ça ? Pardi ! Plaisir de grand-mère, si heureuse de les avoir dans les jambes qu’elle prolonge la séance par le souvenir. Même si, quand ils s’en vont, le premier réflexe est de m’asseoir pour souffler !

09 janvier 2007

MADAME BISOUS

Madame Bisous n’a pas attendu l’année nouvelle pour s’en aller ; pourtant elle aurait eu de quoi être heureuse au moment des vœux …
Son mari était en train de fermer les volets avant de partir en promenade. Il s’est retourné : elle était morte.
Une belle mort, disent les voisins. Surtout avec ce qu’elle avait ( la maladie d’Alzheimer).
Elle était toujours souriante, joviale, accompagnée de son mari. Je la rencontrais sur le trottoir devant l’immeuble. Elle me réclamait des bisous bien que nous nous connaissions à peine.
Je l’avais baptisée ainsi. Quand je rentrais je disais « ah ! je viens de voir Madame Bisous » Je l’avais incluse dans l’histoire de cet été « Jusqu’au môle ». Elle était devenue une voisine bavarde du gamin. Sans autre rapport avec la réalité que cette réclamation de baisers.

A « Soleil d’automne », ce 2 janvier au matin, tant de femmes et d’hommes privés de bisous. Immobilisés dans un lit, assis prostrés dans la chambre, dormant affaissés devant une télé dans un salon. La personne que je viens voir, je ne sais si elle me reconnaît mais elle se met doucement à rire, à rire en balbutiant des onomatopées … J’écarte ses protections pour l’embrasser. En cet instant je n’ai ni peur, ni chagrin. Juste cet élan de lui faire des bisous sur sa peau fripée. J’aimerais l’enlacer, la prendre toute dans mes bras pour la soulever jusqu’à moi. Je suis heureuse de sa présence même diminuée.

En quittant la maison de retraite, je pleure soudain. Comme je pleure encore en racontant.

08 janvier 2007

BONNES ADRESSES

Bonnes adresses
dominique-barbier.net

http://london-maria.blogspot.com

deux amies qui écrivent
deux sources ardentes de passion de vie

07 janvier 2007

FRIPOUILLE

Fripouille conduit la marche. Elle sort sa maîtresse chaque jour. Elle n’aime pas les jours vraiment trop orageux, couverts de brume, à ne pas mettre un chien dehors. Elle n’aime pas sa tristesse à Elle, bien qu’elle attende patiemment, couchée à ses pieds, qu’elle passe.
La marche ouvre les horizons. On descend aujourd’hui en direction de la ferme Durand. C’est un bon parcours qui domine la vallée. On prend les sentiers qu’un paysan entretient encore pour conduire ses bêtes au pré. Ça et là des ficelles bleues, des fils de fer, un arbre tombé mais le passage se fait quand même en se courbant, en escaladant, en zizaguant à travers les obstacles. Elle a pris son bâton de marche, ses grosses chaussures. Nous irons le plus loin possible aujourd’hui. Jusqu’au pylône EDF. On s’arrêtera là, elle se reposera. La beauté de la vallée, le soleil qui la baigne, une trace de biche dans la neige. Elle regardera loin devant. Elle arrêtera sa conversation intérieure avec celui qui ne nous accompagne plus jamais. Elle s’arrêtera peut-être de maudire le ciel de le lui avoir pris. Elle pleurera peut-être un peu. Ça lui fera du bien.
Là où nous allons il n’y a plus de promeneurs à cette heure-ci. On lui dit qu’elle devrait se méfier. Et si elle prenait un malaise, faisait une chute ? Surtout qu’elle sort toujours par derrière sa maison à l’abri des regards. Sa fille s’inquiète, téléphone aux voisins. Mais ça lui est bien égal. Elle n’écoute pas les conseils de prudence depuis longtemps, surtout depuis …
Fripouille a quinze ans. On l’a trouvé abandonnée dans des bois en Savoie. On l’a conduite au vétérinaire. On a mis des annonces. Elle avait un an. Personne ne l’a réclamée et parce qu’elle revenait toujours manger avec les chiens on l’a appelée Fripouille et on l’a gardée.

C’est un cadeau Fripouille. Un cadeau du ciel sourd.

06 janvier 2007

PEAU DE CHAT

Sylvie tousse. Elle a demandé à sa fille de fixer sur sa poitrine et son dos des cataplasmes. Il ne faut pas les garder plus de deux jours.
- Qu’est-ce qu’ils contiennent ?
- Ce doit être de la farine de moutarde
Du temps où on faisait les cataplasmes soi-même on mettait de la farine de lin. Bien sûr que l’on n’achetait pas les cataplasmes.
On faisait aussi les ventouses pour dégager les bronches. Il ne fallait pas se rater, sinon on brûlait la peau du catarrheux. Dans toute bonne maison, il y avait les verres à ventouses rangés dans l’armoire. A ne pas confondre avec les verres à vin. Ils étaient larges, au bord lisse. Je ne me souviens pas d’avoir vu appliquer les ventouses à mon père. Travail secret et attentif dans la chambre, loin des gosses. Je crois qu’on faisait brûler une torche dans le verre avant de le retourner et le poser. Pour une désinfection ? Il fallait « tirer le mal » avec ce procédé. Comme avec des frictions d’eau de vie. Externes ! A l’intérieur c’était pour réveiller les morts !

Sylvie regrette que Gène ne soit plus là pour attraper un chat et le dépecer. Il utilisait la peau de chat dans les métiers à tisser mais c’était aussi avec une de ces peaux de chat que Sylvie protégeait sa fille des grands froids. Eh bien la fillette n’a jamais rien eu tant qu’elle portait cette peau. Maintenant qu’elle n’obéit plus elle est beaucoup plus fragile.
Je garde de mon enfance la hantise de « prendre froid ». Ma mère fut marquée par la mort par tuberculose de nombreux camarades. « LA maladie » prenait parfois le nom doctoral de pneumonie, bronchite … broncho-pneumonie, bref ! la « crève » en général. « Habille-toi bien ! Tu vas attraper la crève. » Ça ne voulait dire que"le rhume" ou "la grippe", sans qu’on sache très nettement ce qui les différenciait. Il fallait aussi, bien se couvrir : écharpes, cache-nez, passe-montagne, bonnets, « quèques » ( une bande de tricot cousu pour l’arrière et terminant en écharpe. On peut en voir encore à la mode aujourd’hui. )
J’ai eu des moufles en peau de lapin recouvertes de tissu bleu et fabriquées par ma mère. Je m’en souviens très bien. Je les perdais souvent, les retrouvais heureusement avant sanctions.



J’ai repéré dans la vase d’un fossé une bouteille de Pulmosérum. C’était le médicament que mon père, qui n’en avalait aucun, consentait à prendre s’il « carcassait à fendre l’âme » (toussait beaucoup). Je l’ai extirpée de sa gangue, nettoyée, presque ramenée à la transparence. Le bouchon cabossé s’est dévissé.
La voici, à défaut de peau de chat, comme témoignage d’un temps révolu. Un temps à "AUTOMEDICATION" qui ignorait son nom et le Trou de la Sécu.

05 janvier 2007

RIEN PREPARE !


Rien préparé pour mon blog. Aucun projet pour lui, à moins de lui raconter tous les autres, par exemple ...
- DIRE MERCI. Merci, merci bien, pour l'e-mail "ma" Solange, pour les comments Aben, Julie, Mariel, pour la convocation à assemblée et à agapes générales, Claude, Denis ... Merci, merci, merci ...
Merci pour les bisous mon chéri, plus tu y penses et plus je les aime, et plus je t'aime toi aussi. Pour ce besoin que tu as de me parler et moi de t'entendre. Faut dire que c'est super la retraite quand on a du temps pour les bisous à gogo. Et qu'il n'y en a jamais assez à nos âges ...
Merci pour l'interwiew Eric-Emmanuel Schmitt. Quand je pense que je vous ai dénigré un petit peu l'autre jour ."OUI, c'est bien, mais c'est toujours la même chose non ? Un bouquin toutes les années comme Bobin en son temps. L'amour, la foi, la confiance ... Un bon fond de commerce.
Je m'en veux de cette suffisance. L'autre nuit j'ai traversé le maringot de la nuit noire grâce à ce E-E-S.
" J'ai envie de raconter à mes lecteurs que la vie est infiniment plus riche et surprenante qu'on le croit. Mon rôle c'est l'espérance : aller au devant de la vie avec appêtit."
Ma seule certitude : Dieu est chez tout homme, au minimum sous la forme de sa question.
Le monde est dur et nos vies finissent mal, mais je refuse de consentir à la dureté et à la violence du monde"
- METTRE EN FORME cette proposition de spectacle avec CLAIRE, lui faire dépasser le stade de la préparation même si elle continue en s'amériorant chaque mois, le proposer pour affirmer sa réalité et soutenir l'exigence. Un titre : CHEMINS DE TERRE, LIGNES DE VIE ...
- FRAPPER encore et encore, sans peur et sans reproches, aux portes fermées de qui me refuse. Un jour peut-être s'ouvriront-elles ... Une année ... Cette année ...

Et jeter dans le vent cette photo immense qui ne fane pas comme la fleur de Soldanelles séchée dans l'herbier du blog dont Solange me renvoit un pétale attentif.
Comme le champignon FAIRE souche ... C'était à La Loue le premier Janvier que je continue d'appeler LE JOUR DE L'AN comme dans mon enfance. J'allais à pied faire la visite des voeux auprès de mes vieilles voisines, Maria, Syvie, quand le champignon m'a souri. Possible que j'ai remarqué ce sourire à cause de la photo bleue d'Aben.
Faire de chaque jour UN JOUR DE L'AN.

04 janvier 2007

GRAND SILENCE


Silence blanc ce matin. Interrompu par l’arrivée intempestive d’une « privée de téléphone ». Qu’à cela ne tienne ! Laissons entrer le flot des mots, pressés d’en finir avec le silence !
Vu au cinéma LE GRAND SILENCE ; le film se passe au monastère de la Grande Chartreuse. Comptant sur la beauté du lieu, de la neige sur les toits, de la palpitation des brins d’herbe dans le vent, de l’offrande des visages à la caméra, de la proximité de cette caméra avec les signes extérieurs d’une présence habitée, il dure presque trois heures. De longs passages sans sons aucuns. Je me suis souvenue d’un film pakistanais, vu il y a longtemps, mais qui m’avait fort impressionnée par cette même lenteur, l’immobilité des images, l’absence de distraction pour l’oreille.
Je n’ai pas trouvé le temps long. Dans la salle une écoute s’installe, parfois un soupir, un petit ronflement, des toux, des raclements de gorge … Mais au fur et à mesure que l’on entre dans la vie quotidienne des moines, le silence gagne. La salle, bien que pleine à craquer, ( beaucoup de monde à Grenoble pour ce film de voisinage) entre dans le respect de ce silence intérieur. A la sortie les questions fuseront à même la rue. Tribunes de discussions, refus véhéments … Elles se poursuivront aux tables du réveillon. Comment un tel choix est-il possible ? A quoi sert-il dans le vacarme du monde ? Est-il fuite ou arrimage dans un réel recomposé ?
Ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas ont besoin, une fois de plus, de faire le point. Ce grand silence volontaire de quelques-uns rompt celui que la plupart des personnes se font sur l’essentiel de ce qui trouble.
Les alentours du monastère m’évoquent plusieurs voyages en groupe à la Grande Chartreuse. Le premier : un jour d’élection avec « L’Amicale Laïque » de mon village vers les années 50. Le candidat : Le grand Jo, était avec nous et nous avons fêté au retour son entrée au Conseil Général. J’étais gamine, joyeuse de faire partie de cette assemblée-là, mortelle, mais si vivante. La Libération avait laissé une soif de vivre ardente. Les murs de clôture ne me renvoyaient aucune inquiétude métaphysique. La montagne était si belle en Juin qu’elle apaisait mes soucis d’intégration à la grande assemblée des servants du bonheur. Avec un car qui roule, un chauffeur rien que pour soi, « Merci Chauffeur Merci ! », le pique-nique au soleil, les chants collectifs en écho, son institutrice avec soi et un futur conseiller général de son cru … que peut-on craindre de l’avenir ?
Le dernier voyage en groupe fut avec l’association Grenoble-Oxford. Je ne me souviens que du compliment sur ma veste élégante, que j’ai perdue d’ailleurs, c’est dommage je l’aimais bien. Sûr que j’ai de terribles difficultés à gérer une garde-robe importante, plus qu’à ravauder une robe de bure. Mais bon ! ça devrait aller encore une année !
Quelques gouttes tombent du toit. La neige fond. Le petit bruit rythmique accompagne les touches d’ordinateur. Sans vous pour le dire, cette paix des champs n’aurait aucun intérêt tant j’ai besoin encore et toujours d’affirmer ma foi sincère, et cultivée régulièrement, dans les mots de vent et de pluie.
« A vouloir tout dire, on perd le dire » affirme René Char
Mais à vouloir ne rien dire que ne perd-on pas ?
Je vous adresse le salut d’hier au soir pour accompagner mon verbiage d’aujourd’hui, heureux de filtrer dans le quasi silence du matin clair.
Une photo, ça ne fait aucun bruit ? Bof !

03 janvier 2007

D'AMOUR ET DE PLEINE LUNE




appareiller pour mon retour "at home" la pleine lune et le plein poème de Verveine qui m'attendait dans la boite aux lettres

Je voudrais bien vivre d’amour
Jusqu’à la fin des jours
Vivre le soleil sur les feuilles
et le miroir de l’eau au seuil
de mon enfance
Moment où tout se danse
Aimer tout le café et le thé
le réel et jusqu’à l’excentricité
Me souvenir de toi de ton doigt sur mes lèvres
d’une commune fièvre
de ta main sur mes reins
du dernier soir et du premier matin
Comprendre que la vie ce ne sont pas les infos
les crimes les délits d’initiés les gogos
mais tant et tant de printemps
d’automnes et de fuite des ans
Et ravivant l’éclat des souvenirs fanés
Oui je veux vivre et veux mourir d’aimer

02 janvier 2007

le temps change !


Ah vous aviez cru vous en tirer comme ça ! Sans neige et vent, sans crampons à chausser, sans pneus adoc ! Ah vous aviez cru toute l’année parler en vieux pieux, pardon en vœux et contre tout ! Erreur ! Grossière erreur !
Au deuxième jour de l’année que donnerai-je à ma mie ?
Nulle perdriole qui va , qui vient, qui vo o le
Mais la pie, la pie bien grasse, en note sur la portée du ciel qui se couvre de brume !

Bref ! La voiture ne veut pas démarrer. C’est l’affaire du spécialiste qui doit monter de la vallée mais qui se fait tirer l’oreille
- Vraiment vous n’avez pas de garage Renault plus proche de votre domicile ?
- Eh non cher monsieur ! Vous êtes la providence la plus proche ! Faites un effort !

Au deuxième jour de l’année que pourrai-je chanter ?
Avec Claire ce tantôt cet appel au printemps que nous prévoyons avec flûte et piano et même l’accordéon. Il faut que j’aille réviser le conte de la galère volante.
Elouan a retenu le beau mot nouveau de VŒUX, qu’il ne cerne pas encore très bien. Est-ce qu’on les offre ? Est-ce que la personne concernée se les fait toute seule « Fais-toi des vœux ! » ? Est-ce qu’on veut les vœux ou est-ce qu’on les achète ? En tout cas c’est un légume de saison souvent accompagné de cadeaux.

Portez-vous bien !
Meilleurs voeux !

01 janvier 2007

NOUVEAU MESSAGE


NA BOUNA ANO
NA BOUNA SANTO
Alo plan plan !
A qué ser de se presso ? é ne ser à rin !
A poué c'lo que son presso qu'y coraïsse

(UNE BONNE ANNEE, UNE BONNE SANTE
ALLEZ DOUCEMENT
A quoi sert de se presser ? ça ne sert à rien
Quant à ceux qui sont pressés qu'ils courent donc !