Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

29 août 2006

FURTIVEMENT

Furtivement

Furtivement
Petit instant de bonheur passe
A quatre sous dans sa besace
Quignon de pain

A tout son temps

Pose un tout petit baiser
Pas besoin de manger les lèvres
N’a pas de loi, pas de projet
S’arrête pour cueillir une herbe
Prend un roseau, le fait siffler

Aurait pu passer à côté
Mais non !
A choisi le chemin qui passe
L’air qui respire
Le goût du blé
A tout son temps dans sa besace

C’est ici
Pas besoin de garder l’adresse
Juste fixer sur le papier
un point de liesse
Furtivement
Pépites de mots étincellent
Grillons grésillent

Et la nuit belle
Du jour entr’ouvre le battant

25 août 2006

FAIRE

Déjà cité je crois H.J DUPUY mais retrouvé ce matin :

« Quand les mots courent plus vite que la pensée
Quand la flamme fait la roue sans se soucier de la mèche
Quand l’herbe attise les grillons,
quand la rivière qui chancelle de ciel
et ce vent de mai qui te cogne de plein fouet
mettent en grève l’atelier de la raison raisonneuse,
a défaut de construire,
tu jouis
tu fais l’amour avec la vie
qui rit du même rire que toi »

Voilà qui s’accorde avec Henri Thomas dont je suis en train de mettre un texte sur le piano (faire l’amour avec le piano)
« Plutôt dépose ta raison
Ta main pourra toucher
Le bord de l’horizon »

Et de Gelzy soi-même quand l’eau de la Méditerrannée la submerge :
« Ah faire l’amour avec la mer
En long, en large et en travers
En diagonale et en quinconce
Ah faire l’amour le cul dans l’eau
Et la tête dans les oiseaux
Qui goélandent et vagabondent
Ah faire l’amour sans y penser
Quand la vague vient vous chercher
C’est pourtant pas très difficile … »
etc … etc …

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23 août 2006

ET FINIR


Et finir un cahier d’une année retenue
C’est encore regarder avec ses lunettes
C’est essuyer les verres d’une buée perdue
C’est retenir l’été et retarder l’hiver

Du Portugal lointain au Rhône sous le pont
J’ai trempé le pinceau dans l’eau de mes images
Jusqu’à ce qu’elles impriment en clair sur une page
Que le soleil fidèle revient après l’orage

J’ai attaché la fleur sur la tige qui tremble
Ensorcelé l’oiseau pour qu’il reste au nid
J’ai guetté le clocher par dessus les fourmis
Et j’ai voulu du jour apprivoiser la nuit

Ce n’est rien qu’un album qui dans mes mains se loge
Mais quand j’ouvre au hasard ma mémoire en papier
Je serre un caillou dans le fond de ma poche
Et je le lance au loin dans l’eau des ricochets

D’avoir pu partager quelques-uns des rebonds
Je fais signe aux vivants encore et encore
Eh ! Les copains d’amour, ce n’est rien, tenez bon !
J’ai besoin de vous tous pour mieux narguer la mort.

22 août 2006

COMMENCER


Commencer un cahier
c’est comme commencer
à l’envers du ciel
une chanson nouvelle …
C’est entendre un refrain
en lorgnant les couplets …
C’est un remous de l’eau
jusqu’à la terre ferme.
Un bateau vient passer
juste au bord d’une ligne …
Accrocher un poisson
- Hameçon du hasard-
c’est comme faire signe
et répondre au bonjour
avant qu’il soit trop tard …
Une voix qui commente
sur le bateau touriste
ressuscite, on dirait,
des bateliers perdus …
Les nuages se fripent
comme une vieille jupe
Peut-être va-t-il pleuvoir
avant que le soir vienne …
Peut-être que la vague
Vient d’ourler mes orteils …

21 août 2006

LE BRAS LONG



Réveillée par le gong ? Non ! Sortie du rêve sur une image très nette et un projet précis. Des bras humains qui sortent de l’arbre. Très intéressant ! Il faudrait photographier ça ! Représenter. Tableau, cinéma ?
Croise alors au large l’expression : le bras long.
Comme ce serait commode ! Atteindre sur la table le pot à eau, la bouteille de rosé, le sel … sans déranger. Et pour les étagères dans la cuisine, le bureau. Plus besoin de chaise, d’escabeau. Je dois commencer à me méfier des escabeaux, surtout branlants. X ou S aux esca-beaux ? Escarres. Hôpital hôpitaux.
Un bras téléscopique. Deux. Pour se gratter la plante des pieds, couchée dans la chaise, longue elle aussi. Au sens propre et au sens figuré. Gratter, longuement. Cette année à moustiques est insupportable. Intervenir sans hâte et sans gêne, au Liban, dans les histoires de famille. Faire cesser. T’atteindre quand l’envie est trop forte de sortir de l’arbre, de l’attente de la forêt sans loups.
Que faire pour l’acquérir ce bras long des projets à long terme, des remises en question à la longue, fatigantes ?
Descendre au blog. Alors les bras de l’arbre me prendront.

20 août 2006

SI VOUS SAVIEZ


Si vous saviez … dit la chenille
Comme j’ignore le papillon
Si vous saviez … dit la vieille dame
Comme je pense encore souvent
Aux rosées de la fiancée …
Arrive un grand coup de vent
La chenille en est envolée
La vieille tombe à cropetons
CQFD
+++++
Les vieille dames
racontent aux fleurs et aux oiseaux
comme elles sont heureuses de vivre
On peut pas dire que les humains
s’intéressent aux grands sentiments
mieux vaut en rire !
Les vieilles dames
participent encore à la fête
à coups de pioche et d’aiguille …
Elles écrivent aussi des poèmes
que personne ne lira ici
Qui sait ? Au ciel …
Elle pètent sans se retenir
Parfois elles rêvent
quand elles n’étaient encore que mères …
Tous comptes faits : c’était facile.

19 août 2006

LETTRE à


Mes amoureux écrivez-moi
D’où que vous êtes
Mes amoureux j’ai mal de moi
Mal à la tête
Dites-moi que je suis encore
En photo dans votre giberne
Un souffle dans votre vieux cœur
Un cheveu dans la boîte à sel

Mes amoureux seule je suis
Ce jour est rose
J’aurais aimé dans votre lit
Faire quelque chose
Mais votre couche est bien fermée
Si loin de moi et de mes rides
Que je vais aller promener
Ma solitude et mes années
Du côté de la poèle à frire

Mes amoureux rejoignez-moi
Pour mes lunettes
Que j’ai perdu encore une fois
Vraiment c’est bête
Sans vous je ne saurais plus voir
Ni me conduire
Je suis condamnée à sourire
Dans le boudoir
En attendant votre arrivée
Allez … Pressez !

Mes amoureux si vous saviez
Comme je vous aime
Vite vers moi vous voleriez
Vers mes poèmes
Quand vous aurez mangé et bu
Soyez amène et à même …
Tiens ! J’entends ton pas dans la rue
Je vais vite aller réchauffer
Le repas dans la poèle à frire
Il est déjà midi passé
Cessons de rire !

Allons manger !

18 août 2006

ALEXANDRINS


Ce vieux corps fatigué qui geint à ses jointures
Qui n’arrive qu’à peine à joindre les deux bouts
Souviens-toi de ses fastes, de toute sa voilure
Quand il naviguait vent debout !

Cette mémoire comble qui te joue les Cassandre
Sans cesse te répète « Tu n’es plus Cendrillon ! »
Oublie de l’enfiler dans un coin de ta chambre
Laisse-la sur le paillasson !

Et puisqu’il fait matin, qu’il a plu cette nuit
Que l’été va finir et que l’automne vient
D’un pas alexandrin Va jusqu’à ton jardin
Réaccorde ta pioche aux notes d’aujourd’hui !

Puisque l’alexandrin garde tes habitudes
Mets un pied devant l’autre jusqu’à toucher le soir !
A petits coups de plume, à petits coups d’espoirs
Ils sauront te porter de douze en douze lunes !

Je n’ai d’autres conseils à te dire ma chérie
Souviens-toi des amours qui t’attendent au tournant
Invente un jour de plus à offrir aux amis
Attrape un jour de moins à jeter dans le vent !

OGM


J’aime les ponts quand ils voyagent
Sur les rivières et sur les mers
Et joignent les deux bords de l’eau
Oh Oh Oh
Mais j’aime pas les OGM
J’aime le riz et les rizières
Le blé, le maïs, le soja
Et les galettes de Quimper
Ah Ah Ah
Mais j’aime pas les OGM
J’aime marcher le long des routes
J’aime chanter à l’unisson
J’aime faucher toutes moissons
Crénom de nom
Mais j’aime pas les OGM
J’aime les génoises aux airelles
Les cakes à l’orange, aux raisins
Les choux farcis et le lapin
Crénom d’un chien
Mais j’aime pas les OGM

J’aime pas qu’on me les modifie
Mes plants, mes semences, mes fruits
Mes neurones et mes abattis

J’aime qu’ils continuent gentiment
Et selon leur tempérament
Tels que Dieu nous les a donnés

J’aime qu’ils s’évertuent en été
A tenir promesse d’un printemps
Génétiquement de tout temps

Sans avance sur consommation
Risques majeurs et stock options
Ailleurs que chez moi codifiés

Enfin ... j'aime, faut-il le dire
que mon amoureux m'aime aussi
sans viagrer mes vides et ses pleins
calins

17 août 2006

VAUNAVEYS

C’est une maison douce
Comme sa propriétaire
Quand on vient de Sète
On n’entend d’abord
Qu’un silence bleu

Bleu comme les pinsons
Quand ils chantent aux clairières
Et comme les oies
Quand elles cacardent
Dans le fond des bois

A Vaunaveys la Rochette
A Vaunaveys nous étions deux

Bleu comme les grands bols
Du café que l’on vous sert
Et comme les yeux
Des dentelles bleues
Sur les étagères

Un silence profond
Comme des années-lumière
Et lorsqu’on l’entend
On se sent devenir
Un petit bébé

A Vaunaveys … deux

Même dans la rue
Pour dire le chemin de Crest
Un panneau tout bleu
Invite à se taire
Et à admirer

A Valnaveys … deux Heureux

FIGUE


J’ai volé une figue
Elle était défendue
Défendue par les scribes
Et les anges velus
Et j’ai mangé la figue
Jusqu’au dernier pépin
Elle était si légère
Et je la valais bien

Derrière le cimetière
Qui regarde la mer
Qui se dore au soleil
Qui se tait au grand air
Le figuier affichait
Ses intentions goulues
De prendre à belles dents
Tous les fruits défendus

J’ai volé un figuier
De deux coups de crayon
Larges feuilles échancrées
Fruits comme des grêlons
Et j’ai croqué le ciel
Et les croix des tombiers
Qui portent chacun sait
Des fruits jamais gâtés
Et des anges épilés

JULIETTE


Juliette se promène
avec sa maman
avec son chien si blanc
qu’on dirait de la neige
d’hiver en plein été

Juliette est toute rose
de la tête au pied
Jolie comme une rose
qui se promènerait
avec un chien en laisse

Juliette sait écrire
son nom en attaché
son long nom à huit lettres
Elle sait aussi compter

Moi je suis bien contente
d’avoir croisé Juliette
et qu’elle m’ait dit : « de rien ! »
et qu’elle m’ait embrassée

C’était comme une aubade
Et Rue de la Peyrade

PLEINE LUNE


Comme une page sur le ciel
Comme un discours qui ne dit mot
Comme une page à ciel ouvert
La pleine lune

Comme une femme qui se dessine
Des yeux, des rires et des douceurs
Un sein tout rond

Comme une femme
Qui joue à l’eau
Et s’y reflète
Sur le théâtre de la mer
Une lanterne, un feu follet
La pleine lune

Une musique horizontale
Marya Andrade la jeune fille
La femme mûre Césaria
Un chant aigu comme une flamme
Un chant profond comme les flots

ST JULIEN



L’homme tient son ombre
Il n’a pas le choix
Soit il la pourchasse
Soit il la côtoie
Si grande soit-elle
Il peut habiter
Toutes ses ramures
Il n’a pas le temps
Simplement il marche
Son pas l’accompagne
Pétri de lumière
Il va vers son ombre
En apprivoisant
Le chemin de terre
L’homme tient son ombre
Pêcheur d’une main
Et poisson de l’autre

Il tient son ombre
Son ombre tient à lui
Confiante en ses possibles

16 août 2006

TOURNESOL


Sait se tourner le tournesol
Sait faire comment
Sait faire avec
Et si se penche vers le sol
c’est pour planter
graines à soleil

Autour de lui l’air s’effiloche
Et qu’il soit vif
ou qu’il soit terne
se fait pétales ensoleillés
se fait lumière apprivoisée

Qui inventa pour nous leurrer
et pour nous plaire
(Aussi pour beurrer nos tartines)
pareil refrain au cœur charnu
pareils couplets en chevelure
jupes gitanes d’or volé
et multiplié sur les routes ?

Sait se tourner le tournesol
vers moi quand je manque de ciel
en bon professeur de chimères
et de confiance à ras le sol

05 août 2006

VIEUX

Benoite Groult LA TOUCHE ETOILE

« Ce n’est pas méritoire d’être jeune, quand on est jeune on ne sait rien faire d’autre. Mais le tour de force que ça représente d’être jeune quand on ne l’est plus, ça me tire des larmes. Salut les acrobates ! /…/

Eux, les vieux, cumulent tous les âges de leur vie. Tous ceux qu’ils ont été cohabitent sans compter ceux qu’ils auraient aimé être et qui s’obstinent à venir empoisonner le présent avec leurs regrets et leur amertume. Les vieux n’ont pas seulement 70 ans, ils ont encore leur 10 ans et aussi leur 20 ans et puis 30 et puis 50 et en prime les 80 piges qu’ils voient déjà poindre. Et tous ces personnages qui récriminent, qui vous font reproche et n’ont jamais eu la part assez belle, il faut savoir les faire taire.
/…/
Vous êtes la première génération à avoir fait une découverte terrible en effet : ce que vous aviez de précieux et d’important à transmettre n’intéresse plus vos descendants.

PETITE FILLE


A une jeune fille de 11 ans à peine, assise à ma table hier au soir

Ne grandis pas trop vite
Petite fille fleur
Ne trouble pas tes yeux
d’un éclair qui provoque
un regard sur tes formes !
Entre Papa, Maman
ne cherche pas trop vite
où pourra prendre place
ta fuite dans les bois !
Ne confonds pas trop tôt
les contes à la télé
avec la voix des anges !
Ne sois pas impatiente
de remplir un contrat
signé par publicistes !
A surveiller d’un œil
ton destin de princesse
tu risques de passer
à côté des bergères, tes sœurs,
sans entendre le chant
qui parle de pain tendre
et d’eau claire aux fontaines !

04 août 2006

UN CHALET


J’ai rêvé d’un chalet
où tu viens me rejoindre
J’ai rêvé d’un chalet parfois …
La montagne attentive
acquiesce à nos étreintes
Les sapins veillent sur le toit …
On entend un chevreau
bêler après sa mère
on dirait que l’orage approche …
J’ai rêvé d’un chalet
seul dans la lumière
et dans la nuit

J’ai rêvé tout un jour
d’un chalet de montagne
aussi caché qu’un voyageur
qui a trouvé sa voie
qui a trouvé sa pente
et qui ne rêve plus d’Ailleurs

J’ai rêvé d’un amour
Où tu viens me rejoindre

Et j’ai rencontré un chalet

01 août 2006

LES CARROZ d'ARRACHES


Comme un chapiteau
Un grand cirque de pierre
La montagne s’est plantée pour un soir de lumière
Et sur la piste, à plat, sur le sable ou tout comme
Les sapins sont posés en petits acrobates
La tête sur leurs pieds et leurs bras sous les pattes
Les maisons-clowns se déchaînent
A qui sera la plus marrante, la plus obèse-obscène
Griffent la pente
Risquent de se faire flanquer à la porte
Du grand cirque de pierres vibrantes
Les grillons de l’orchestre
Tenaces et Discrets
Comptent les points
Les points rouges des chapeaux-toits et des toits-anicroches
L’orage arrive et je décroche
La toile de chapiteau du grand cirque Peint d’air