Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

22 juillet 2010

la permission


photo : graffiti à Sète
atelier d'écriture
Non non non ! je ne veux pas, je ne veux plus, plus jamais, plus ... demander la permission. ah ça non ! non ! non! non! La permission de quoi mon maître ? de parler quand on m'interroge ? de me taire lorsque vous parlez ? de ne pas aller à l'école quand j'ai perdu mon encrier ?
De ma première colère contre les maîtres je me souviens très bien. J'avais reçu 100 lignes à faire, il était très fort pour les lignes le maître de cinquième, surtout à mon égard car il avait deviné à mon regard que je ne l'admirais pas assez. Chaque matin je l'affrontais, il doublait la mise. A bout d'arguments et sentant qu'il allait perdre la partie devant la classe il me flanqua à la porte jusqu'à ce que j'ai aligné la somme totale de la semaine. Je commençais à griffonner fébrilement dans le couloir puis, soudain très à l'aise avec les règlements, j'allais décrocher mon vélo sous le hangar et je pris la route pour rentrer chez mes parents. Impensable à l'époque pareille insoumission ! L'affaire se termina par un arrangement, en fait une capitulation réciproque. Il transigea . J'obtempérai à moitié. Et je repris, bécasse, le carcan des obéissances. " oui not'bon maître, oui notre monsieur! " Depuis c'est toujours dans la douleur et l'extravagance que je refuse de demander la permission, après avoir humblement courbé l'échine. Je quitte le domicile conjugal, je déchire ma carte. Quand la dernière heure va arriver je vais encore essayer de me débattre pour ne pas passer sous leurs fourches caudines

Grignan/ festival de la correspondance



Quand un rosé s’installe à la table à écrire
Et se met à parler en gouttes occitanes
Qu’un fin brouillard descend rafraîchir les délires
De quelques mots cachés dans le fond de nos âmes
Quand de jeunes mariés, à moi qui suis grand-mère
Ont des sourires si doux qu’on dirait des enfants
Quand le mur recrépi réverbère la lumière
Sur des corps dessinés qui touchent à l’horizon
Non je ne doute pas ! Non je n’ai peur de rien !
Je sais boire et chanter, je sais lire et écrire
Tout ce que j’ai rêvé je le tiens dans mes mains
Et la pointe d’un sein équivaut à la lyre
Pincée par quelque Dieu ou par quelque satyre
Qu’importe le passé, le présent, l’avenir
Le temps a posé patte sur le bord du chemin.

Dimanche après-midi . Je ne voulais pas quitter le festival sans une halte d’écriture dans une de ces chambres du même nom que les habitants de la ville offraient aux visiteurs. Courettes qui s’ouvraient à l’invitation, fleurs tranquilles dans leurs couleurs d’été, fruits même, abricots, mûrs au dessus des murs …
Celle-ci devait être la dernière. A 6 heures j’avais rendez-vous avec Pierre et Michèle pour rentrer chez nos hôtes. Je ne voulais qu’y déposer la lettre que je venais d’écrire à Frédérique, assise sur un seuil de pierre en dessous du château
C’était un atelier de peintre.
J’ai posé la lettre dans une des boîtes de récupération. Bien garnies déjà. Ça sentait la fin décrétée pour six heures. Se trouvaient là, un bébé endormi dans une poussette, un festivalier au travail dans un angle, quelques observateurs devant les tableaux et une poignée d’écriveurs autour d’une longue table en bordure d’un bassin. Je fis un tour de salle pour regarder les tableaux de nus qui mêlaient à mon goût la maîtrise classique à une fantaisie rythmée. Il y avait une petite brise qui circulait dans ces images et je reçus sur le visage, passant d’un espace ouvert sur la ville et le ciel à celui qui contenait la table et le bassin, un agréable nuage de gouttes rafraîchissantes. Un rideau d’eau descendait du plafond.
Je m’assis à la table. J’avais oublié l’heure.
Le peintre nous offrit un petit rosé, reliquat dit-il de son vernissage. Je ne savais pas si j’allais écrire, ni à qui. J’ai posé mon sac, mon chapeau, mon tabouret. Les mots sont arrivés doucement entre deux gorgées. Les tableaux continuaient leur brise légère, le bébé son sommeil … les visiteurs ne respectaient pas le silence des attelés à la correspondance mais l’atmosphère était à tous les possibles.
J’adressais mon texte brut à qui avait préparé pour nous ce lieu d’accueil. Jean-François Blanc 14 rue St Louis Grignan. Il m’a suffi de lire l’affiche.
J’étais bien. J’étais là.

21 juillet 2010

remuer terre et ciel


est une mauvaise habitude pour les titans
je connais une femme qui s'appelle Titane
il m'est arrivé d'improviser avec elle ... nous nous amusions bien, ça démarrait au quart de tour et ça s'arrêtait naturellement. Nous tissions des écharpes de mots pour nous en couvrir les épaules ou les jeter au vent

ce que je préférerais plutôt que remuer terre et ciel c'est que la nuit se taise tout bonnement et s'endorme ...
petite nuit confiante
en suçant son pouce

quand je serais capable d'utiliser mes insomnies au mieux des mots et des couleurs ( je n'ai JAMAIS osé peindre la nuit, Pourquoi ?) alors la terre et le ciel, le jour et la nuit auront repris leur place légitime, la lune et les étoiles ... le tutti et le fruiti ... côte à côte, coeur à coeur, sans opposition majeure, comme sans courtoisie exagérée ...

04 juillet 2010

JEU



proposition de l'atelier:
"c'est pas de jeu! " l'interlocuteur proteste. "Tu es une tricheuse" quelquefois rit, chahute, affirme sa force, son intelligence, veut en réalité prolonger le jeu en y logeant ses propres règles. " jeu de l'amour et du hasard" Toutes les règles ne sont pas connues d'avance même si les ancêtres les ont répertoriées, mis en musique. Carte du tendre. A qui perd gagne. La vie n'est pas un jeu mais alors, ma mère, comment m'y faire à cette vie si ordinaire ? Laisse-moi partir sur la place publique et déclamer mes choix en vers, envers et contre tout. Et même contre toi.
Au jeu de l'oie, au jeu du canard à trois pattes, au jeu de saute-mouton, à la roulette, aux cartes ... Est-il trop tard ?
J'aimais cette séance des dimanches pluvieux quand sur la table de la cuisine on sortait la boîte de jeux. Cela se terminerait par les mêmes fous rires et empoignades. Mon frère Roger, en transe, parce que le dé lui est plusieurs fois de suite favorable, hurle " 6 ! Et je rejoue !" Il ne joue plus. Il a abandonné la partie quand le dé s'est mis à rouler du mauvais côté. Mais je l'entends encore ...
Ecrire est un jeu. Comme tout jeu demande de la joie, de l'entrain. Ecrire est un travail.
L'amour est un jeu. A n'importe quel âge. Comme tout jeu demande de la patience, de l'audace. Le goût du risque.
Aimer écrire, Ecrire l'amour est une gageure. Toujours la partie est perdue d'avance, les dés sont pipés. Est gagnée, recommence. A charge d'en changer les règles selon l'expérience et la chance.

illustration Ils applaudissent. Nous avons bien joué ?

03 juillet 2010

une île


une île ... entre le ciel et l'eau
c’est vrai que le refrain surgi est bon observateur.
C’est bien sur une île entre le ciel et l’eau que je suis. Ici à Sète.
Je cherchais mes lunettes, suis allée jusque sur la terrasse où hier au soir j’avais tenté un crobar en prévision de ce matin. Pas là ! Nulle part les lunettes … une fois de plus
Mais une île que je vois, que je sens autour de mes vieux os, L’ILE. La protection, l’isolement, la douceur de vivre. Pas de pb, cool Raoul, qui vivra verra … le bateau : cet appartement.
Participe à la reconnaissance le fait qu’il appartienne à Gisèle, la femme première de Pierre, que de tel prêt soit possible du passé au présent …
Je L’ADDDORE cette chanson douce, pas celle que me chantait ma maman. D’ailleurs ma maman n’avait guère le temps pour les chansons. Mais l’essentiel des notes et de la cantilène à me transmettre.
« ce sera là face à la mer immense
là sans souci d’espérance »
L’ai-je assez répété avec Claire, intransigeante sur la mesure, jusqu’à la chanter une fois ou deux pour d’autres, seule ou avec elle, mais tant et tant d’instants seule dans ma tête, à tue-tête, au piano … pour m’en saouler et en renaître. Elle disparaît de l’horizon, réapparaît comme ce matin.
Réalité des îles à mi-chemin de la mémoire, de l’imagination, de la vie insubmersible. Une fois de plus.

J’ai trouvé mes lunettes. Une fois de plus, après trois ou quatre tours d’appartement, invraisemblablement planquées hors de ma vue défaillante, de mes frousses et de mes désespoirs.
« J’ai perdu mes lunettes
En allant dans les bois
j’aurais bien dû les perdre
Une autre fois »
Une autre chanson d’Elle, de son cru cette fois.

Elle, Frédérique, c’est celle qui se perd sans lunettes, se retrouve grâce à sa bonne foi, sa constance, continue bon an mal an, ses dérives en les prenant pour des approches intelligentes.
Je L’ADDDORE.
Elle me fait rire quand elle pleure, au bout du rouleau réembobine, quand Elle compte les pertes, les profits et essaie de résoudre l’équation impossible. Elle a toujours été si mauvaise en math. Elle m’amuse vraiment quand elle reprend place, avec des lunettes retournées, retrouvées, devant l’écran de sa myopie et tente, une fois de plus, de la soigner.

Tout seul face à ma destinée
Plus seul qu’au cœur d’une forêt …

Ce sera là ? … ta ra ta ta ? …
Hourra ! les paroles de la chanson se perdent dans l’eau de la mémoire enfin calmée.
Je me sens prête à rejoindre le continent. Je sais qu’il y aura des vagues à passer, des morts à affronter. Je sais que si j’ai pu régler son compte à la garce de camarde le temps d’un spectacle, elle réapparaît une fois de plus, indestructible comme sa sœur jumelle. Que chacune de ses grimaces se loge sur mon visage.
Camarde toute proche de camarade pourtant …
Une fois de plus les mots pansements.

02 juillet 2010

ROMANCIER-NE


Effet curatif d'un texte ami de l'atelier d'écriture sur moi. Me suis levée dans la grosse nuit noire, bourdonnante, accablée de mémoire. Branchée sur l'immuable bêtise humaine " Pourquoi ont-ils tué Jaurès ? ". Mais la fenêtre des mots qui transcendent, qui s'élancent vers ... eux aussi inlassables de curiosité. La prolongation du match. Reprise d'espoir. Reprise d'envolée. La nouveauté au tournant du déjà vu, déjà lu, déjà parcouru dans tous les sens. Reprise du romanesque. La nuit soudainement silencieuse, attentive et tranquille." L'inducteur est au masculin" ? Bah ! nous en ferons de la belle ouvrage. "Porter jupe et rire aux éclats." : ça peut marcher tant que l'on marche.
Allez ma belle ! en avant toute !
comme les bourgeons de sapin
comme l'air du temps sur tes tempes
comme le roman de demain
et le soleil dans la Tour Mente

01 juillet 2010

étendage !


tant qu'il y a des fils tendus
tant qu'il y a de la lessive
à faire sécher dessus les fils
tant qu'il y a un peu de vie
qui se régale et se prolonge
à manger et à boire cul sec
tant qu'il y a ! Tant il y a !
...
dire bonjour en passant