Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

31 janvier 2010

LE PETIT MATIN


le petit matin guilleret
se lève au-dessus des montagnes
a du soleil dans sa besace
et de la bonne neige aux pieds

je m'en vais pour le transplanter
sur la plaine avec mes échasses
de roues cloutées

Prenez-en soin ! Surveillez le !
Gardez-le moi toujours alerte
et si je rencontre l'été
je vous en ferai profiter

30 janvier 2010

IMAGINAIRE


Réel du Moucherotte
IMAGINAIRE DU ROMANCIER
De l'atelier encore
Imaginer un romancier n'est déjà pas mince affaire. Les romanciers ne croisent guère dans nos montagnes quoiqu’il me soit assez facile d'imaginer un romancier escaladant le Moucherotte de bon matin pour se retrouver en haut juste au lever du soleil et là, trempant sa plume dans l'encrier, il commence une description sublimée de la fille des cimes. Celle dont le chapeau est tombé dans l'abîme et il se sent prêt à l'aider à le retrouver. Le dos calé à un rocher, il se contente d'imaginer la valse du chapeau, d'arête en colonne vertébrale, d'Alpes en Pyrénées. Intuitivement il sait que le jeu n'en vaut pas la chandelle et sa plume tremble un peu dans sa main droite, cependant que de la gauche il dirige un rayon incandescent vers le soleil. Alors tout flambe, les sommets, les creux et les bosses, les campanules et les trolls. Il s'enflamme pour le personnage qui ressemble bien un peu à sa première femme mais qui saura le rejoindre sans pension alimentaire excessive quand il sonnera. Cette fille des cimes, Fleur de Soleil, est d'ascendance Vierge et de descendance Scorpion. Il l'enlace. Elle prend le risque d'insolation, refuse qu'il hasarde sa vie pour un chapeau de toile acheté 2 euros à Prisunic hier. C'est vraiment une fille épatante, tout dans le galbe et rien dans la cervelle. Il n'en est encore qu'au premier chapitre qu'il s'aperçoit que l'imagination ne suffit plus. Il a oublié ses dico, la recharge d'encre, le code d'accès à sa boîte e mail. Il panique, la fille gigote …

28 janvier 2010

NU


de l'atelier:
Nu. Alors le sens des mots change. Nu. Sans crainte et sans peur. Du bout de l'oreille jusqu'au coeur.Nu n'a rien gardé des reliques, des chaussettes et des sous-tifs. Nu n'a pas honte d'en être là. Tel qu'en soi-même il se change, Nu ne prétend pas être un ange mais Nu sourit au paradis qui par ses yeux semble sourire autant que dans la poêle à frire le gardon ou les salsifis.
Nu. Reprenons ce qu'est être nu. Sans fausse rime ou assonance. Il va falloir nuancer. Est-on nu de même manière quand on est seul, deux ou plusieurs ? Est-on nu sans aucun prétexte quand on voudrait bien voir ailleurs ? La vérité, qu'on s'en souvienne, serait nue en sortant du puits mais qui l'a déjà rencontrée pourrait, sans peur ni reproches, n'avoir pas les yeux dans la poche quand il s'agit d'en témoigner ?
Nu. Projetez-donc cette syllabe à haute intelligible voix ! A voix nue, c'est plus difficile lorsque l'on veut tenter le pire qu'avec les flûtes et les hautbois. Nu comme un vers, un long poème, n'est-ce pas aussi téméraire que d'avancer des arguments devant le tribunal suprême qui a déjà tranché avant ?
Nu. J'enrage de chercher à comprendre comme un tel parfum sans fard, comment un tel goût sans caprice, a bien pu entrer dans la lice sans que je donne le départ.
Non ! Nu ne vaut noyé dans la masse ! Nu ne va sans quelques grimaces, Nu ne nomme qu'un peu de pudeur quand, détournés des artifices, le haut et le bas sont complices. À porter aux nues la déesse, Nu s'occupe bien de ses fesses !

26 janvier 2010

SEULEMENT ...


Seulement pour dire un peu plus
je referai le même signe
de tendre ma main vers les mots

Seulement pour boire la lumière
j’ouvrirai tout grand la fenêtre
qui donne sur le paradis

Seulement parce que je respire
j’irai vers la forêt des livres
et je m’y perdrai sans remords

Et s’il y a trop de lumière
j’agrandirai avec ma tête
avec mes mains et ma poitrine
la brèche de mes illusions
jusqu’à rejoindre le frisson
originel.

25 janvier 2010

JOLIS MOMES



JOLIS MôMES

C’est la chanson de Ferré qui me revient en regardant les photos de Samedi. Inauguration de la nouvelle mairie au village. Le temps beau, la neige dure mais avec des crampons, mon bâton ferré ( lui aussi) … je m’arrêterai chez Nicole : trois « choses chéries » pour ajouter à l’album.
Sur le chemin vers la ferme Jalla deux garçons s’exercent à devenir titans. Ils décrochent les stalactites-mites qui tombent du toit de la grange et rejoignent le sol. La lutte est difficile mais à deux on est plus fort ! l’un découvre pour épater l’autre sa réserve d’anciens météorites cachés sous la neige.


Je poursuis mon chemin vers la forêt avec leurs frimousses en poche. Suffisamment lointaines pour qu’il n’y ait pas de capture d’image.
L’inauguration est superbe, le ruban tricolore découpé, les kirs à la châtaigne et à la myrtille sublimes, le buffet préparé par l’équipe municipale elle-même somptueux de goûts et de couleurs. Je rentre par la grand route en voiture amie pour cause de jambes un peu flageolantes …
J’ai encore eu le temps de photographier les fiancés de 4 ans mais celle-ci je la garde pour les mamans.

24 janvier 2010

de Etty


ETTY P 90
L’essentiel est d’être à l’écoute de son rythme propre et d’essayer de le vivre en le respectant. D’être à l’écoute de ce qui monte de soi. Nos actes ne sont souvent qu’imitation, devoir supposé ou représentation erronée de ce que doit être un être humain. Or la seule vraie certitude touchant notre vie et nos actes ne peut venir que des sources qui jaillissent au fond de nous-mêmes. Je dis en cet instant avec beaucoup d’humilité et de gratitude et je le pense profondément (même si je sais que tout à l’heure je serai redevenue rebelle et écorchée vive) : « « Mon Dieu, je te remercie de m’avoir faite comme je suis. Je te remercie de me donner parfois cette sensation de dilatation, qui n’est rien d’autre que le sentiment d’être pleine de toi. Je te promets que toute ma vie ne sera qu’une aspiration à réaliser cette belle harmonie, et d’obtenir cette humilité et cet amour vrai dont je sens en moi la possibilité à mes meilleurs moments »

23 janvier 2010

LA LAINE ET LE PAIN


de Marico :
« Comme j'aime l'univers que tu décris. À distance, le mien y ressemblait d'une certaine manière. Le nom du père était le même! Chez nous, c'était le jardin, les vaches et la basse-cour, le verger, le beurre et le pain de ma mère, l'Angèle à Alphonse. Lui, travaillait fort à la terre et aux animaux. Elle, nourrissait et habillait tout le monde. Les deux ensemble, ils fabriquaient un cidre sec et pétillant vendu d'avance. Ils me manquent encore tous les deux ! J'aimerais les retrouver, que nous ayions le même âge, pour ensemble regarder la nature et jaser doucement !
Merci pour ce bon moment à sentir l'odeur du vrai pain. »

Quelle bonne coïncidence ! Nos pères sont deux Alphonse, nom de roi !
Et ton Angèle est chez moi la Marcelle.
Le vin remplace le cidre.
La table est mêmement mise : tout ce qui y est posé ( ou presque) est produit par la maison. Cela a donné un goût unique aux pommes de terre pour longtemps. Ainsi hier quand je les ai servies en robe des champs ou de chambre à Marie-Laure arrosées d’huile de noix s’est-elle extasié sur ce goût simple et tonique. Elle en rajouté dans son assiette avec du fromage blanc relevé de sel et poivre comme mon père !
La chanson, Solange, est aussi de mon cru. Si j’étais plus dégourdie avec l’ordi je vous la passerai « en vrai » mais il faudra que j’aille vous rejoindre pour la chanter ! Inventez-lui un air, il sera très proche du mien ! je vous sens, les Québécoises, si proche de ma longueur d'onde !

Je suis faite de laine
Que tricotait ma mère
De chaussettes, de bas
De chandails et bonnets
Je suis faite de laine
Chemise américaine
La guerre se finissait
L’pull-over arrivait

De cette laine encore
Parfois la peau me gratte
Le cœur se tient au chaud
La mémoire me revient
Et sur les cinq aiguilles
En fer qui se dégradent
Mes doigts tournent en rond
Jusqu’au petit matin

Je suis faite du pain
Que pétrissait mon père
Dans la maie, à cinq heures
Nommée ailleurs pétrin
Du pain de nos javelles
Du bon blé de nos terres
La batteuse au soleil
Alors battait à plein

Parfois de ce pain blanc
Je lèche encore la croûte
Brûlée par le dessus
Ferme par le dessous
Et sans faire de grimaces
Puisqu’il faut bien grandir
J’avale un gros chagrin
Sur mon morceau de pain

Je suis faite de rien
En somme et confidence
Pour confidence je n’ai
Jamais cru en manquer
Je suis faite bien sûr
De quelques brins de chance
Et la laine et le pain
M’ont toujours acceptée

Il se peut que demain
Je retourne garder
Dans le pré de mon père
Les vaches de ma maman
J’aurais soin ce jour-là
D’enfance buissonnière
De nourrir mon repos
Du chant de la maison

Je suis d’une maison
Unique, intraduisible
Je m’y perds parfois
À vouloir m’y loger
Une maison si belle
Une maison si grande
Que je m’y cherche encore
De la cave au grenier

Pardonnez-moi Amis
ce regard en arrière
Il paraît que ce n’est
Pas bon pour la santé
Et pourtant ce refrain
D’enfance buissonnière
Convient à mes neurones
Agrée à mes couplets

Je suis faite de tout
Ce qui vient de famille
Ce qui vient de la lune
Ce qui vient du soleil
Et s’il faut que demain
Du tout je me défasse
Je coucherai la laine
Sous le morceau de pain

22 janvier 2010

PAIN QUOTIDIEN fin



J'imagine que c'est le devoir de mémoire embellie qui fit choisir à Nicole la corbeille à pain dans les talismans incontournables.
Elle ne put pas m’en raconter l’origine. Qui l’avait faite ? Quand ? En quel bois ? Produit local ou d’importation ? mais sa place exceptionnelle sur la table du dimanche, des banquets, des repas de noces, oui elle en sait tout. Ce n’est pas tous les jours que l’on sert le pain dans cette corbeille qui est en elle-même un autel, une prière, une consécration. Un pain quotidien d’accord mais réservé aux jours de fête.
Pour graver ainsi dans le bois l’épi mûr et souple, la phrase en lettres carrées, il fallait plus qu’une gouge habile, qu’un long temps de réflexion et de concentration. Il fallait, j’imagine, une foi solide en l’homme et en Dieu.
En a-t-il fait plusieurs de cette qualité et de cette facture le sculpteur anonyme ? Je n’en connais pas d’autres. J’interrogerai un antiquaire, un brocanteur.

« Donnez-nous notre pain quotidien »
Aujourd’hui qu’il est si facile sur un ordinateur de superposer texte et image comment retourner à l’esprit qui lit la matière rebelle au verbe, qui se donne le temps pour mûrir.
L’essentiel en peu de mots, fussent-ils transmis pour des siècles et des siècles. Mots ramassés comme des miettes d’un geste sûr et repétris inlassablement.
La corbeille à pain. Passe-moi la corbeille à pain ! Passe-moi le pain ! Passe-moi l’essentiel !

21 janvier 2010

NOTRE PAIN


Et pourtant combien ce pain quotidien me coûtait à l’avaler. Je n’avais jamais faim. J’étais une « pouillante », une « grimacière ». on devait me « faire manger ». Il fallut bien trois années, quatre ou cinq peut-être, pour que je me décide à prendre la cuillère moi-même dans ma propre main. Pas faim le matin devant le bol de lait bourré de pain trempé, beurk ! pas faim à midi pour le pain qui doit « saucer », « pousser » dans l’assiette. Pas faim au goûter même avec chocolat incorporé ou mieux râpé sur la tartine de beurre. Et bien entendu pas faim pour la soupe qui elle aussi regorge de pain. Le pain est la base. Le pain est indispensable. Le pain est laïque à l’école, béni à l’église mais respecté partout. Dans les contes, dans les chansons, dans les comptines
Une poule sur un mur
Qui picorait du pain dur

Aussi est-ce par ce côté expressif que, finalement, j’ai fait alliance avec le pain, le pain de mon père, l’unique père qui est sur la terre :
Je suis faite de pain que pétrissait mon père
Dans la maie à cinq heures Qu’on nomme aussi pétrin
Du pain de nos javelles, du bon blé de nos terres
La batteuse au soleil alors tournait à plein

Parfois de ce pain blanc je lèche encore la croûte
Ferme par le dessous, brûlée par le dessus
Et sans faire de grimaces puisqu’il faut bien grandir
J’avale un gros chagrin sur mon morceau de pain
/…/
J’ai chanté la chanson toute entière pour les soixante ans de mon frère et il en a été ému aux larmes, lui qui ne me concède que très rarement quelques paroles sensées. Je l’ai chanté l’autre jour à la soirée « Mon voisin est un artiste » à Engins dans le Vercors et des personnes de mon âge sont venu saluer cette offrande à leur enfance. En particulier un Monsieur, Suisse, qui m’a remercié chaleureusement de lui redonner le goût de ce pain-là. Souvent dans les contes, dans les spectacles avec Claire, le pain quotidien revient témoigner de mon incomparable famille nourricière. Maintenant que j’ai gommé toutes ses exigences et ses exagérations !

( à demain si vous le voulez bien )

20 janvier 2010

NOTRE PAIN QUOTIDIEN



Nous sommes Nicole et moi, de la génération du Pain Quotidien. Nous avons été nourri pour le respect à la miche, à la couronne, au pain long, à la baguette …
Récemment j’ai découvert à Groslée, village de l’Ain, un monument aux morts orné, non de fusils et de canons, mais d’un attelage. Même attelage de vaches que celui de mes parents. Mêmes mancherons de la charrue. Même bras de chemise roulés pour dégager la main qui guide. Même « geste auguste du semeur » que nous avions appris à qualifier par Victor Hugo à sa juste mesure. Un monument, on pourrait dire, aux vivants, non aux morts. Témoignant par l’image, comme dans les églises romanes, de la qualité intemporelle de la vie.
Dans la simplicité de la sculpture il y a tout l’attachement à un mode de vie ancestral. Le soc avait été forgé par le forgeron du village, j’ai eu la chance d’interroger sur son art le dernier. J’en reprendrai le récit prochainement. Car j’ai gardé dans mes oreilles sa fierté et son humour.
La « biasse » contenant la semence, nouée sur la taille, est bien la même que celle dont mon père ceignait ses reins. Il n’y a que le chapeau qui diffère de la casquette sinon je pourrais croire à une photographie sur le vif.



Chez Nous, c’est-à-dire Chez Moi, mais j’imagine assez Nicole utilisant le même possessif collectif, Chez-Nous donc, au Bouchage, nous n’étions nourri que de NOTRE Pain Quotidien, ce qui signifiait très clairement que de l’épi de blé, puis de la javelle, à la botte, à la taïsse (la meule) en passant par la batteuse et le grenier puis par le levain, la farine, le coffre de la maie, deux fois, d’abord pour pétrir la pâte puis pour conserver les boules de la semaine, enfin le four du Père Cachard et finalement le couvercle de la maie où Papa le coupe en larges tranches et le pose à côté des sept assiettes, le pain est de nous, à nous, entièrement NôTRE.
Je me souviens de notre effarement quand, pendant la guerre, mon oncle Félicien rapporta des Avenières un « troyon » de mauvais pain. Ce n’était que pour nous faire voir ce que c’était ailleurs que souffrir de la guerre. Pain mêlé de maïs, jaune donc, d’un je ne sais quoi grisâtre, de la paille peut-être, écoeurant d’aspect, affreusement dur, incomestible nous en avions aussitôt décidé. Nous avons mesuré ce jour-là la chance que Dieu nous avait faite de nous faire vivre loin des combats et des villes affamées. Bien que Dieu n’apparut pas dans notre ciel pour cause de républicanisme anticlérical affiché de mon père. Notre père, le seul vrai, le seul à planter, faucher, lier, récolter, pétrir, cuire enfin et distribuer c’était Phonse le Grand, le meilleur en blé et en pain, reconnu par tout le quartier, le village même.

18 janvier 2010

le lendemain

Le lendemain Mamie est toujours souriante.
Le gai soleil aussi se souvient du dimanche
Et des garçons il reste mieux que photographie :
Du grand rassemblement de rires et de folies
la maison semble ouïr des murmures sonores.
Le chemin déblayé à coups de pioches et pelles
se souvient qu'ils furent cinq à lui tirer l'oreille
Même les Trois Pucelles commencent à se douter
qu'elles ne furent pas les seules à se faire déflorer

Et la bougie éclaire avec son reflet d'or


ce bonheur d'aujourd'hui qui demeure d'hier.

16 janvier 2010

née femme


les trois Pucelles hier à St Nizier
atelier d'écriture

Je suis née femme, n'en peux douter.
Je suis née fille de ma mère.
Me l'a-t-elle assez répété !
Je fus pucelle et aujourd'hui,
quand je regarde les montagnes
de même nom,
juste à ma porte bien plantées,
comme j'en ris !
Je devins mère
sans trop savoir
par quel bout les enfants se prennent
mais quelle fierté lorsque vint l'heure
et quelle peur !
Je le resterai jusqu'au bout :
fille, pucelle, mère et grand-mère.
Je suis donc comme la montagne : insubmersible.
Je suis donc comme l'océan : vagues et chansons.
Je suis donc comme fut ma mère : courage et opiniâtre audace.
Je fus parfois, et j'en ai honte : bête et soumise.
Mais aujourd'hui
que le rideau va bientôt tomber sur la scène
je suis l'icelle
qui met ses mots au féminin,
qui apprivoise la blanche hermine,
qui refait les couettes du matin
pour les glisser sous sa chemise
et partir d'un pas pèlerin.
Je suis née femme.
Je m'en souviens
dans chaque pore de ma peau,
dans chaque fibre de mon être,
dans chaque goutte de mon sang
Et si j'ai le droit de renaître ...
demain je recommencerai.
à prendre l'eau à la fontaine,
à vider les paniers percés,
à charrier le bois du bûcher
pour l'enfourner dans la cuisine.
Idem :
à taper sur piano à queue,
sur ordinateur,
sur malchance
jusqu'à ce qu'ils trouvent le do
et le logent dans ma soupente.
Je suis née femme.
Comme mes filles je suis née mère.
Et pour quelques détails obscurs
je suis née homme.
Comme mon père. Comme mes frères.
Comme mon fils et ses garçons :
penseurs subtils et gais lurons

15 janvier 2010

COLLAGE, COLLAPSUS


j'étais en train de greffer mes mots sur un texte trouvé dans un blog quand je fus interrompue. je ne pouvais refuser la visite. Je n'ai pas pris les références de ce qui a motivé ma broderie. L'astérisque et péril signale ce que j'ai ajouté


commencer par l’oiseau immobile, sa veille noire
*m’attribuer de l’oiseau l’immobilité et la veille
autour de lui les branches insistent
*ne pas savoir et accepter des branches le soutien
envoient des signaux incompris
*aveugle ce soutien et pourtant fraternel du moins j’aime à le croire
plus bas en fines lamelles se superpose ce qui s’efface
*rien que la neige blanche, ses couches successives, ses recommencements
les traces déliées dans la neige
*et rien que la patience de laisser traces
mêlées de sel
pattes ou virgules, mes pas en creux


là-haut l’oiseau entend les grondements les cris
évite de penser au pire
en silence
* l’oiseau est une pie, c’est plus qu’une évidence blanche et noire
l’oiseau est ce mélange, ce contraste, cette opposition radicale,
et j’accepte qu’elle aussi, la pie, ne pense pas au pire en silence.
Bien mieux : salue le matin et le ciel en harmonie.

13 janvier 2010

ETTY


« une intuition a surgi à travers les siècles, les hommes se sont éreintés, se sont meurtri les pieds à parcourir la terre de Dieu, dans le froid et la chaleur, et cela aussi c’est la vie. C’est une expérience de plus en plus forte chez moi ces derniers temps : dans mes actions, mes sensations quotidiennes les plus infimes se glisse un soupçon d’éternité. Je ne suis plus seule à être fatiguée, malade, triste ou angoissée, je le suis à l’unisson de millions d’autres à travers les siècles, tout cela est la vie ; la vie est belle et pleine de sens dans son absurdité, pour peu que l’on sache y ménager une place pour tout et la porter toute entière en soi dans son unité ; alors la vie, d’une façon ou d’une autre, forme un ensemble parfait. »
retrouvé sur l’étagère le livre de Etty Hillesum. Trop longtemps que je ne l’avais ouvert.
Dimanche c’était ses lettres de Westerbork qui étaient mises en scène au théâtre et portées par la voix de l’actrice
Pas de sacrilège. La salle transformée en baraque, les spectateurs alignés sur les côtés, à la fois en dehors de l’époque, du camp, et si proches des châlits de détresse qu’un silence total s’installa, participa au jeu de l’actrice pour lui donner sa vérité. Le texte s’inscrivait sur les murs et était projeté vers nous par la voix d’une même femme sans fards, sans artifices, arrivée au dépouillement ultime comme à un art maîtrisé : ETTY réincarnée.

"Westerbork, village hollandais proche d’Amsterdam, est devenu camp et lieu de transit pour les juifs destinés à être « émigrés » vers d’autres pays. C’est là qu’Etty Hillesum, jeune juive étudiante en droit, portée volontaire, rédige une correspondance, qui sera éditée sous le titre Une vie bouleversée.
Dans un dispositif scénique audacieux, l’actrice, installée au milieu des spectateurs, évoque les pages de ce journal, joies et peines, douleur physique, promiscuité .
Elle témoigne, et son discours, éloigné de tout appel à la compassion, étonne par la force du questionnement, la volonté de maintenir jusqu’au bout la dignité d’un parcours humain face à l’anéantissement, et de préserver sa foi en l’homme et en la vie.

« La joie malgré tout », c’est le message d’une grande figure de la spiritualité contemporaine, et également de ce spectacle, interprété par Nicole Vautier et mis en scène par Danièle Klein."

12 janvier 2010

MA MAISON HABITE EN PLEIN CIEL


Ma maison habite en plein ciel
Ainsi assiste chaque jour
aux pantomimes des nuages
Facilite aux Trois Pucelles
l’accès aux versants érotiques
Parfois se trompe à les compter
tant les brumes les multiplient
à l’infini de tous côtés

On peut parfois dans ma maison
voir entrer toute une forêt
de mélèzes et de bouleaux
de lourds sapins endimanchés
avec des neiges exotiques
Car tous les pays de l’hiver
viennent y flirter avec l’été
D’illustres illustrations s’emmêlent
dans livres d’images et B D
Car ma maison se bibliothèque
au cœur du ciel à se planter
Se projette, se répercute
Se duplique et se fend la pêche
Maison de reflets et d’éclats
Maison d’insolente assurance
à tirer le diable par la queue
Maison de rente et convenances
et église pour prier Dieu

Au plus près des châteaux hantés
Au plus loin des tours-prends garde
Ma maison habite en plein ciel.

10 janvier 2010

mots neigeux


Impossible de dire la neige
Avec des mots déjà servis
Ce matin le gel a raidi
Toutes les branches du dictionnaire

Le soleil se lève, échancrure
Rose sur veston de ciel gris
Le sapin bleu retient sa bure
Lourde de nuit

Ce blanc n’est pas une imposture
N’est pas régulier ni uni
C’est un blanc collé sur verdure
Un blanc de suie

Un avion sur la chaîne trace
Une ligne ininterrompue
Et le ciel cloue en même place
Ses bras dessus

Comment murmurer des mots tendres
A la neige froide au dehors
Sur la vitre je peins des cendres
Avec une allumette d’or

Les mots m’ont donnés leur accord

06 janvier 2010

PERVENCHE


Ne pas faire attendre !

Elle dort encore quand la sonnette de l’immeuble signale l’arrivée de l’infirmière. Celle-ci, la remplaçante, est matinale. Chaque matin la toilette. Je la réveille doucement. Elle s’ébroue, coupable de sommeil. J’essaie de moduler un réveil en quelques minutes, au moins cinq, bien que l’infirmière vienne de passer la porte d’entrée.
Elle s’efforce d’entrer précipitamment dans le courant « Il ne faut pas la faire attendre ! »
Il ne faut pas ! Femme de devoir, de responsabilité jusqu’au bout. 97 ans de « il ne faut pas» « il faut » « je dois » …
Une pervenche, si bleue de sa candeur printanière. Un perce-neige si blanc d'un hiver intérieur sublimé.

04 janvier 2010

des voeux on en veut!


Reçus de TATILLI
"Si je dis Amis, c'est que je vous aime et si je vous aime, voilà ce que je vous souhaite pour 2010 :

- le parfum d'une corbeille de pommes jaunes
- le goût d'une sucette à l'ylang ylang
- le plaisir d'un bon bouquin
- le sourire d'une dame, dans la rue, qu'on ne connaît pas
- la douceur d'une joue d'enfant qui attend un bisou
- l'écoute d'une musique si belle qu'une larme s'échappe ..."

Souhaits exhaussés partiellement :
1- les pommes jaunes, cuites entières au four= parfum, couleur et saveur
2- l'ylang ylang ne demande qu'à connaître ... mais rien que le nom déjà !
3- Marie Rouanet "Trésors d'enfance" tient dans la poche "alors la joie franchit le temps et réjouit le coeur avec un sourire tremblant"
4- dans le tramway à Grenoble, elle portait des gâteaux-maison à une amie. j'aurais dû lui demander son adresse pour la recette ( gâteaux au sourire)
5- joue jointe pour ample usage
6- sur Arte chants irlandais à Durham hier : bonheur des voix multiples et singulières, tous âges et sexes confondus
+
7- une Tatilili aussi ponctuelle et enjouée ( nb :chaque semaine)
+
http://www.mediapart.fr/club/blog/dianne/241009/el-sistema-dudamel-moment-de-bonheur

03 janvier 2010

COCORICO


de l'atelier ... MIEUX NOUS CONNAITRE
Mieux nous connaître ? Ok je ne demande pas mieux ! mais de quel temps disposez-vous ? Le train ne va pas tarder à entrer en gare. Bien que je ne spécule ni sur la durée, ni sur la distance, êtes-vous bien sûr de votre intention ? Par quoi commencerons-nous ? Mon prénom ? Là encore je vous le donnerai volontiers mais lequel ? j'en ai plusieurs voyez-vous, de ma petite enfance à celle-ci, j'ai aimé en changer autant que de parures. Ah vous voulez m'en offrir un nouveau, assorti au vôtre dites-vous ? Pourquoi pas ! ce sont mes yeux qui ont attiré votre regard ? ça ne m'étonne pas ! depuis que je les porte ils sont les meilleurs portiers jusqu'à chez moi. Quant aux vôtres - dites donc !- ils ne sont pas pas dans votre poche. Au point que j'en suis gênée. Vos yeux, mon cher ( ça ne vous dérange pas que je vous appelle" Cher" si rapidement ? ce n'est que formule un brin précieuse, cela n'engage en rien, rassurez-vous ... vos yeux donc, d'amour mourir me font beau marquis. Mon âge ? Mon Dieu ... euh ! j'ai 104 ans ! Ah ! cette tranche-là n'entre pas dans votre enquête. Goujat ! vous ne pouviez pas le dire plus tôt ?

2010. ce que j'aime dans les sollicitations de l'atelier c'est l'imprévu. Ce que j'aime aussi c'est lire ce que l'inducteur a provoqué sur les autres membres du collectif. ( mais je n'oserai le communiquer ici, je suis propriétaire de ma prose mais pas de celle des autres) Bref ce que j'aime en 2010 comme en 2009, un 3 janvier comme un premier de l'an, c'est mon aptitude à rebondir par dessus les moulins, malgré les rhumatismes !)
le coq qui accompagne le besoin de communication était perché à Valaurie dans la Drôme au faite d'un toit dominant la vallée.

02 janvier 2010

COUCOU


Finies les papillottes, les voeux doux ?
Au cas où vous ayez encore un petit creux ...
BONNE ANNEE ! BONNE SANTE !

de l'atelier : ARTS dimanche 27 à Sète
Ils sont efficacement au pluriel, et singulièrement parfois au singulier. Arts primitifs, arts nouveaux, arts culinaires ou arts cuculnaires, il y en a pour tous les goûts. Ils se vendent dans les musées mais aussi sur les trottoirs, ils font le trottoir. Il faut bien vivre. Savoir pourquoi, à quel moment, ils enflamment les foules ou refroidissent les mafieux ? Impossible de déterminer à temps la tendance. On les a vus fréquenter les critiques et se moquer de leur avis. Gauguin s’en va cultiver le sien, le sein, dans les îles. Mais toi la belle, ce matin qu’as-tu pratiqué ? oh ! pas grand art, le marché, j’ai conversé avec le marchand persan : art de la conversation, plaisanté avec le fourbisseur de macarons : art de la plaisanterie, photographié les bateaux de pêche arrêtés à Sète pour trêve de Noël : art de l’à-propos du lieu-dit … pris grand plaisir à préparer la table pour la nichée. Quand vont-ils arriver ? avec eux tout est possible : art de la patience et de l’acceptation. Et, conjuguant le soleil sur la page, la plage, j’ai nagé jusqu’à toi oh mon tendre et doux, mon Mac à toute épreuve afin de retrouver la consigne au bureau des consignes. Merci Mr le préposé pour la proposition à tout casser ( la grogne, l’envie, la fatigue …) : art de vieillir. Merci pour la liberté laissée en laisse à ce créneau du temps. Et pour l’amusement des mots : art de l’écriture et du tricot.