Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

28 octobre 2013

les mots 3



 Alès 30 mai 2013

Ne pas laisser les mots s’inscrire sur une page
mais les regarder s’ébrouer
en fleurs, en jeunes filles qui battent le pavé
la clope au bec, la jupe moulinant les fesses

Le soleil de ce jour est d’humeur charmante
a bien dormi, bien déjeuné
Pas de clé sous la porte et aucun compte en banque
à rassurer

À la vitesse de la lumière deux voix pianotent
Trop de mots s’y bousculent, trop de hâte, trop de notes
Si peu de paix
Puisse Chopin calmer la fièvre de ce gosse
et grand-père Paul et grand-père Serge
du fond de leur tombe ou du haut du ciel
doucement lui parler

Un pigeon rame
puisque c’est un ramier
Voleur de l’heure
puisque c’est un voilier

26 octobre 2013

les mots

quand ils viennent d'ailleurs
ils portent des mirages
isba-well-hidalgo-arriba-viderzen
en touristes pressés ils vont
effleurer quelques lèvres
et voler en chansons

ils peuvent appareiller
en mariages superbes
on entend résonner
des fanfares dans la nuit
mais ils savent se taire soudain
et trembler de tendresse
et pleurer de chagrin

il est des mots si beaux
que s'inclinent les ombres
et des mots galvaudés
ou vendus sans pudeur
demain nous reviendrons je crois
chercher les mots simplets
mais tendres et courtois

*
Michel Serre lance une grève des mots anglais sur nos murs, dans nos pubs, nos boutiques

25 octobre 2013

les mots


« Les mots, voilà les seules choses qu’il me plaît de collectionner. Ils ne m’encombrent pas. Jamais n’ont provoqué en moi cette sensation d’étouffement que me donne l’accumulation des objets. Je me demande pourquoi, par quel miracle ils échappent à la règle commune. Peut-être qu’en nommant on se débarrasse de l’aspect pesant du monde. On l’allège, et pour quelques phrases écrites noir sur blanc, c’est un soldat de plomb qui se remplit d’hélium. « 
Marie Nimier «  La Reine du silence »

Pour moi c’est selon le temps et l’état corporel, le jour ou la nuit. Quand ils deviennent obsessionnels, quand ils charrient des tempêtes affectives qu’ils essaient de cerner, les mots m’encombrent. Curieusement il leur suffit d’avoir été déposés à la banque, imprimés en belle et due forme, pour qu’ils me soient respectables et plutôt sympas ; chaque fois que je les ai honorés en recueils les mots m’ont quittée d’un coup d’ailes. Les revoir, les redécouvrir, me souvenir de l’instant où ils s’étaient regroupés en famille me les rend paisibles et fraternels.
Certes comme pour tous mes biens collectionnés ( tasses, habits, bijoux…) il me vient la pensée qu’un petit coup de balai serait nécessaire. Ils encombrent mon héritage. Que deviendront-ils après moi mais bah : l’interrogation n’est jamais acerbe ni urgente : qu’ils se débrouillent sans moi !
Si bien qu’après chaque vacance sans eux je leur reviens avec affection : comme aujourd’hui
Et en chanson car c’est encore ainsi qu’ils sont le plus durables et légers
«  Si fous que soient les mots
ils veulent dire je t’aime
et si je dis je t’aime
je t’aime encore plus fort
on les sent palpiter parfois
comme bête craintive et curieuse à la fois …

22 octobre 2013

il est né le divin enfant


Deux petits pieds de plus dans la ronde du monde
                                    Bonjour Nolan !
De les savoir plantés dans mon jardin de joie
mon cœur n’a fait qu’un bond
A ri à haute voix
Deux bonnes joues sucrées pour y poser mes bises
Deux lèvres pour mes joues
Deux mains pour m’appeler
Pour me serrer : deux bras
                                    Nolan Alleluia !
Merci à ta venue ! Merci au grand mystère
qui fabrique l’amour au ciel et sur la terre
et de l’homme à la femme
fait une éternité d’une éphémère flamme

                                    À ta santé Nolan !

21 octobre 2013

daurades et dauratiens


 À LA POINTE COURTE Ribambelle de pêcheurs le long du canaL : c’est la saison de la daurade ; sur trois rangs et de chaque côté  ils pataugent en cuissardes. Gare à un geste trop ample, à une réflexion trop haute : on sort les griffes, les injures, peut-être les couteaux. De temps à autre un éclair argenté ! en voilà une qui s’est laissé prendre et a confondu l’appât avec une bise de maman. Interdiction de la prendre si elle n’atteint pas la maille, les autres vous surveillent !
J’en connais un qui en a pris une de 2kg500.

Les pêcheurs  à la daurade
De la nuit comme du jour
Jette le bernard l’hermitte
D’un geste si pur
Que les petites daurades
Sans expérience encore
Se prennent dans le décor

Les pêcheurs à la daurade
Quelle que soit la prise
Oublient pour une saison
Les emmerdes et les questions
Faut dire que le temps est lourd
Les impôts aussi
Et la pointe, courte !



19 octobre 2013

premier matin


 Salut oh mon premier matin !

 J’ai trouvé le crayon pour capter ta lumière
ou je l’ai emprunté à la table à côté
C’est un crayon qui file comme une flèche claire
Comme la balle de ping-pong sur la table Dimanche
sans ratures, sans regrets
peut-être même aussi sans équivoque

Je ne me lasse pas à 75 passés
de célébrer le jour avec mes deux cervelles :
celle de mon enfance et celle de la veille,
celle des hiers heureux ou des hiers blessés
             et celle, toute nouvelle, -c’est la meilleure nouvelle !-
d’aujourd’hui, premier jour,
d’aujourd’hui, premier jour de mon éternité 

J’ai tant voulu
J’ai eu tant d’espérance
J’ai tant aimé
qu’il me fallait l’espace, oui ! l’espace et le temps tout entiers
pour dire les jours qui passent
et pour les retenir dans mon panier percé

17 octobre 2013

ohé matelot !


Le Belem
C’est un fameux trois-mâts
Dès que je l’ai vu il m’a chanté la chanson hisse hé o et ne m’a plus quittée pendant toute son escale à Sète
Aussi quand j’y suis montée ( une des 4000 visiteurs) je me suis imaginé aussitôt que tu aimerais en faire autant mais il est reparti. Tu trouveras tous les renseignements sur www.fondationbelem; j’ai glané d’une jeune fille en stage à bord qu’on y mange bien, que c’est formidable. Il suffit pour devenir matelot d’avoir 16 ans, l’autorisation des parents bien sûr. Les tarifs sont de 150 euros par jour. Un minimum de trois jours.

En attendant cette BD t’en donnera le goût peut-être
jean yves delitte la dernière traversée

Du 18 au 21 avril fête des traditions maritimes à Sète, on en parle déjà dans la ville
Ça va être grandiose ! 

15 octobre 2013

ma de moi selle



 Ma de moi selle

La voix découpe les syllabes et de la chambre ouverte sur le couloir les projette méthodiquement dans le service des urgences comme dans le service communicant des hospitalisés
Une à une les syllabes retombent, sans autre bruit qu’elles-mêmes, affalées, inutiles, pas plus gênantes que des mouches qu’on chasse d’un revers de main 
Parfois, après un court silence, où je vois la silhouette allongée tirer sur les fils qui la relient à une potence, tenter d’arracher le pansement, la voix se fait plus explicite
Ma maison, oh si ma petite fille savait ça, je ne suis pas malade, y a-t-il un responsable ici, je vais tomber malade, c’est bientôt la nuit, par pitié un verre d’eau

Ma de moi selle
Les ascenseurs déversent leur lot de brancards, de brancardiers, jeunes garçons aux tatouages apparents explicites, jeunes femmes bardées des mêmes chasubles fluo ; la voix, lancinante pour qui l’entend, ne les empêche nullement d’échanger des plaisanteries, de laisser partir des rires sonores, d’insister sur leur indifférence à la voix et leur parfaite adaptation  au milieu hospitalier, leur champ habituel

Ma de moi selle
Mais non ! c’est trop ! passant près de moi, une infirmière ou apprentie se met à imiter la voix en exagérant son côté institutrice diplômée en formes interrogatives et négatives adéquates,  je vous en prie, j’interviens pour proposer qu’un verre d’eau peut-être 
- Oh ! c’est comme ça depuis ce matin ! ça ne sert à rien de lui donner un verre d’eau !
Je n’insiste pas : d’un côté le cours normal des choses, de l’autre la vieillesse immense, désemparée, interminable vieillesse qui ne veut pas finir 
On charrie le lit pour examen à un autre étage, la voix disparaît dans le transport, puis est réintégrée
Elle reprend  la même antienne, les mêmes couplets
Oh si ma petite fille savait ça !
La petite fille fait passer par téléphone un bisou qu’on veut bien servir à la chambre
-       elle n’a rien dit d’autre ? qu’est-ce qu’elle a dit encore ?
la soignante est déjà loin.
une autre obsession est apparue
Mon collier, j’y tiens c’est ma mère qui me l’a donné, on me l’a volé 

Ma de moi selle
Dans le cerveau  qui fuit entre les rails de la mémoire, l’explication fait suite à la demande :
Je suis seule


14 octobre 2013

les grands voiliers


selon la formule consacrée ils ont gagné le large
gagné aussi quelques euros ( 5 par personne) à se faire admirer, photographier de près ( x tout sète :4oooo)
hier au soir c'était le gulden leewn dont voici le nez en proue
ce matin le fameux belem dont il sera question              ultérieurement

j'aime que les bateaux aient des ailes à leurs voiles
alors je monte à bord et navigue en plein ciel

12 octobre 2013

splash !


Splash !
Sans savoir ni pourquoi ni comment
Elle se retrouva sur l’macadam
Les voitures firent pile poil
Les gendarmes, les pompiers
Autour d’elle s’en vinrent pour bavarder

En sachant et pourquoi et comment
Aux urgences attendit sagement
Puis le bras en écharpe
Regagna ses pénates
Sans autre splash et autre événement

Dans l’affaire il restait une quiche
Préparée pour le club des sophistes
C’est l’équipe de nuit
À l’hosto qui la prit
Les bolets n’manquèrent pas d’appêtit

La patience maintenant elle travaille
D’une seule main et sans faire de détail
Fait glisser ses pantoufles
la journée prend son temps
Sans savoir ni pourquoi ni comment

11 octobre 2013

les bateaux



les bateaux dans le port ont affalé leurs voiles

Ont laissé les cordages dessiner sur le ciel
On vient les voir en troupe, du quai on les mitraille
Clip de ce qui ne peut jamais se prendre à bord
Et pourtant, redressés du dos, les yeux plus clairs
Les badauds s’en retournent, les photos dans les poches
Déplier la grand voile et conter à leurs proches
Comment fut le voyage de ce qui reste à faire

10 octobre 2013

diagonale 2

à Solange:
Pas moyen de dialoguer madame
entre la Pélagie des Terres froides
et la Gie de Sète au soleil
Rien qui ne vaut ni rien qui vaille
Pas moyen d'accélérer la charge
d'alléger la vitesse, de trouver le tempo
Bah c'est pas grave ! tout est nord mal
aux quatre coins de l'horizon
la nuit plante un drapeau bancal
et le jour souffle l'aquilon
***
Dans le port les bateaux à voile
lancent des diagonales
entre mât de misaine et misère d'artimon
le ciel  la terre, l'eau les nuages :
on dirait un tableau peint par des enfants sages
qui auraient oublié de tailler leurs crayons

09 octobre 2013

faut rigoler




Je suis une drôle de bonne femme
D’ailleurs c’est un pléonasme : être femme c’est être drôle, c a d incompréhensible, bizarre, multiple et contradictoire, pas marrante du tout
J’aimerais changer la donne
Être drôle, vraiment drôle, comique, joyeuse et délivrée
Tenez ! Écrire par exemple sans façons et sans pantalons

JE VAIS DONC COMMENCER AUJOURD’HUI UNE TENTATIVE, LA MILLIEME, POUR ANALYSER LE PHÉNOMÈNE.

Etre moi, la Gie, c’est être un phénomène
Maman l’a dit. Elle s’y connaît Maman parce que je suis la cinquième de la famille.
La nuit, quand je ne dors pas et Dieu sait que ça m’arrive souvent !- j’appelle Maman. C’est comme d’appeler Dieu, ça ne sert à rien, personne ne répond jamais la nuit. Tout le monde dort la nuit. Sauf moi. Mais pourtant il m’arrive de repartir plus mollement dans les bras de Morphée.
Ah vous avez dressé l’oreille ! c’est normal. Pléonasme et Morphée vous ont signalé mes antécédents. Oui je suis une petite intellectuelle.  J’ai fait des petites études, grâce à quoi j’ai pu devenir celle qui sait et qui l’enseigne. Ça m’a permis de gagner ma vie à ne rien faire. Entendez, selon les gens du coin avec qui j’ai grandi, ne servir à pas grand chose, si ce n’est à rien. Mais passons !
Je ne vais pas répondre à mon frère chaque fois qu’un mot croise dans le coin qui pourrait me le rappeler. « N’épiloguons pas ! » ( c’est lui qui le dit)
Je suis une intellectuelle  au petit pied. Pas la peine d’en dire plus.
Je suis même devenue, sans que mon frère s’en rende compte, une intellectuelle vieille. Libre à lui ! qu’il continue à m’en vouloir pour mes quatre années de jeunesse en avance sur lui ! ça le regarde ! c’est vrai ça ! je ne vais tout de même pas trimbaler dans mes bagages la jalousie de mon frère ad vitam eternam !

La citation latine ne vient pas des écoles. Encore ma mère ! elle la logeait en signe de mépris et péremptoire, c’était ma mère, la jetait aux orties ou la vouait aux gémonies. Nous ne savions pas ce que gémonies venaient faire chez nous et pourtant, à nous arracher le ventre à remuer la terre, nous les sentions nous condamner ad vitam eternam.
Sauf que le matin nous relevons la tête. Et là les unes et les autres, les gémonies et les apôtres n’ont qu’à bien se tenir. Les poireaux pousseront, les vaches donneront du lait que tèteront les veaux, les enfants iront à l’école pour se sortir de devant et plus tard, qui sait ?, ils raconteront leur histoire telle que jamais personne ne l’a racontée.
Nom de Gu on va pas se laisser faire, surtout tant qu’on a deux souffles de vie !

08 octobre 2013

Diagonale

De deux mots de hasard faire une diagonale
Mépriser l'habitude comme l'horizontale
Partir par le travers rejoindre les deux bouts
Et plus heureuse peut-être d'un sou ou d'un centime
écouter la colombe ou la chouette intime
jusqu'à ce que ses ailes se pendent à mon cou