Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

31 janvier 2009

PAS à PAS

17-
La brume indocile
bien décidée à descendre
jusqu’à nos épaules



18-
Une page blanche
Des lignes à écrire
Tiges et feuilles s’en inspirent
pour exprimer leurs tourmente



19-
Bûcheron tu exagères !
Trois troncs en travers
Tu as acheté la sente ?



20-
Tristesse des branches
Elles meurent à l’horizontale
Elles qui défiaient le ciel

30 janvier 2009

PAS à PAS

13-
Ce chien noir en peluche
Quatre pattes enneigées
Non ! ce n’est pas ce molosse
Qui a jappé à nos chausses




14-Il lui faut rentrer les bûches
pour le feu qui les dévore
La brouette en est grinçante
et ces genoux qui soupirent




15-
Les lauzes en ardoise
La pointe de pierre
Mais les tôles en alu
et l’antenne en télé


16-
Bottes ou ballots ?
Que contient leur toile
Quel cadeau oublié
par quel Père Janvier ?

29 janvier 2009

PAS à PAS

9-
On dirait bien que la brûme
va tout avaler
Pourvu que de ce côté
elle patiente encore !


10-
Je m’allonge sur le talus
mon oeil photographique
s’accroche aux fils barbelés


11-
Dépêche-toi Œil de Lynx
de ramasser le hameau
entre deux lignes acérées
surmontées de bleu encore



12-
Les piquets désaffectés
n’ont plus à garder les vaches
mais vaillamment ils soulignent
que le chemin monte

28 janvier 2009

PAS à PAS


5- Quelles pattes ont inscrit
pour quelle direction nouvelle
l’arc bandé des voyages ?



6- Toujours aussi désolé
l'arbre du sentier à gauche
On lui a coupé la tête



7- D'en bas v’là la brume qui monte
Hé encore un peu Soleil !
Maintiens tes hauteurs de vue !


8- Chaque fois une première :
Tissage des branches
de la neige au ciel
et de mes pieds à mes hanches

27 janvier 2009

PAS à PAS

Promenade du dimanche revisitée en photos, de pas en pas, de jour en jour cette semaine

PRELIMINAIRES :
1- « Une route inquiète
Qui s’endort sous nos pas
Mais s’accroche à la terre »



2- La plante dans l’ombre
s’étonnant à la lumière
fait le premier pas



3- Bougie brûle par les deux bouts
l’allumette encore ardente
et la mèche enflammée



4-Vois ! Derrière les volets
cette page blanche
où la nuit t’invite
à écrire ta trace

26 janvier 2009

DOUCEUR


rien que d'en répéter les syllabes, ça fait du bien ! j'ai essayé pendant les mouvements de gym !

pour renforcer la thérapie, ce texte découvert sur le site de PHILIPPE FORCIOLI

« LA DIVINE DOUCEUR est paix, profonde paix, paix miséricordieuse, apaisement. C'est une main douce et maternelle, qui sait, qui conforte, qui répare sans heurt, qui remet dans la juste place. C'est un regard comme celui de la mère sur l'enfant naissant. C'est une oreille attentive et discrète, que rien n'effraie, qui ne juge pas, qui prend toujours le parti du bon chemin d'homme, où l'on pourra vivre même l'invivable. Elle est ferme comme la bonne terre sur qui tout repose. On peut s'appuyer sur elle, peser sans crainte. Elle est assez solide pour supporter la détresse, l'angoisse, l'agression, pour tout supporter : sans faiblir ni dévier. Elle est constante comme la parole du père qui ne plie pas. Ainsi est-elle le lieu sûr, où je cesse d'être à moi-même frayeur. C'est pourquoi c'est sottise de la croire faiblesse. Elle est la force même, la vraie, celle qui fait venir au monde et fait croître. L'autre, celle qui détruit et tue, n'est que l'orgie de la faiblesse. Mais la divine douceur est une douce fermeté, car pas un instant elle ne blesse le coeur, elle ne meurtrit ce qui est au coeur de l'homme, où il trouve vie. La divine douceur sauve tout, elle veut tout sauver. Elle ne désespère jamais de personne. Elle croit qu'il y a toujours un chemin. Elle est inlassablement inlassable à enfanter, soigner, nourrir, réjouir et conforter. La divine douceur est charnelle, elle est du corps. Elle ne se passe pas en idées et discours, en décisions, en états d'âme. Elle ne se soucie pas d'exhorter ou d'expliquer.
Elle est dans les mains, le regard, les lèvres, l'oreille attentive, le visage, le corps entier. Elle est dans les gestes du corps. Elle est l'âme aimante du corps agissant. Elle est la beauté aimante du corps humain. La divine douceur est sans preuve. Elle ne se donne pas par des arguments, des explications, des justifications. Elle paraît naïve et désarmée devant le soupçon; en fait, elle y est indifférente. Car elle se goûte. Pourquoi divine ? Parce qu'elle ne serait pas humaine ? C'est tout l'inverse: elle est divine d'être humaine, entièrement humaine en vérité. Elle est l'amour d'amitié. Elle est l'amour par-delà l'amour, parce qu'elle ne cherche ni preuve, ni satisfaction, ni possession, ni rien de semblable. Elle ne se donne pas par devoir, mais par goût. Elle ne sait même pas qu'elle se donne. Elle est d'un naturel exquis. Elle peut se faire service, et de mille façons. Mais elle est d'abord elle-même, ô douceur divine, et ce don-là précède tous les autres. Elle est présence, elle est hospitalité, elle est parole échangée. Elle est compassion. Elle est la discrétion même. Oh, qu'elle est désirable ! Elle est le sel de la vie. Le moment où on le sait, c'est celui de la douleur. »

L'épreuve. Ou le tout petit livre de la divine douceur, Desclée de Brouwer - Paris, 1988, pp.13-15.

25 janvier 2009


Nous vieillissons, c'est vrai
et nous n'avons plus l'âge
de partir le matin
sur un avion de pluie
décrocher les nuages

mais puisque le soleil
aujourd'hui sur les cimes ...
Prenons bottes cloutées
et bâton qui chemine

24 janvier 2009

SYLVIE


photo par Julie

Je suis dans la salle d’attente des micro-kinés. Je viens à mon rendez-vous mensuel. Une femme entre. Sur notre bonne mine, notre ouverture du regard, nous entrons facilement en relation. Nous expliquant notre présence ici. Nous tombons rapidement sur ce mois de janvier si difficile à franchir pour l’une et l’autre, de là à des explications possibles. Elle est une enfant née « en remplacement » …
- Quel est votre prénom ?
- Sylvie !
Je souris et répète : S’il vit !

Par le canal d’Internet, c’est la photo de Sylvie, prise par Julie, qui a circulé et touché plusieurs internautes. Sa présence bienveillante au monde, sa vieillesse volontaire et lucide. Une photo qui attire la sympathie, le respect. J’ai à peine eu une appréhension en la publiant sans en demander permission. Je suis ravie que Sylvie soit allée réconforter par sa force de vie plusieurs d’entre vous.
C’est d’ailleurs pour le même effet que je lui rends aussi souvent que possible visite, la dernière au premier de L’an, comme à chaque premier de l’an. Elle m’a connu depuis ma naissance et je crois n’avoir jamais oublié de lui souhaiter la bonne année depuis le temps où j’allais chercher mes papillotes dans sa cuisine. Elle continue à me donner un paquet de biscuits ou des chocolats pour l’occasion … En été ce sera une salade, des haricots, une plante, une fleur …
Derrière le sourire de Sylvie arrière grand-mère ( elle a 95 ans) il y a, je le sais, le drame de son enfance : sa mère morte en couches d'un frère, espoir conçu après 18 au retour de son père. Elle m’en a fait récemment le récit.
Derrière le sourire de Sylvie il y a sa lutte opiniâtre pour aller bien. Elle vit chez elle, fait son dîner elle-même. Le jour où Julie l’a photographiée nous l’avions trouvée en bottes et veston en train de passer du désherbant sur le bord du chemin. Pour ne rien oublier, elle fait des mots fléchés, des sudokus, elle me consulte sur celui du jour, elle s’énerve si un mot lui fait défaut …
Sylvie fut la marraine de mon frère. L’un et l’autre ne l’oubliaient pas, ne l’ont pas oublié jusqu’à la mort de mon frère. A l’enterrement elle était derrière moi dans l’église et son baiser fougueux à l’entrée, sans un seul mot, me soutenait.
Je réalise, aujourd’hui seulement, que ma nièce, la dernière enfant de mon frère, reçut elle aussi le prénom ambigu de Sylvie. C’est une femme pugnace de même acabit.

La rencontre de Sylvie 1 cette semaine qui s’intéresse à la psycho généalogie ( elle me conseille de « m’occuper » de ma grand-mère ), le sourire encourageant de Sylvie 2 qui m’éclaire même sur le net ( je lui ai adressé copie des si nombreuses et belles réactions), l’envie de téléphoner à Sylvie 3 pour l’entendre : autant de promesses pour la journée.

23 janvier 2009

MES SEMBLABLES !


Je les aime bien mes semblables
Quand c’est Dimanche et qu’il fait beau
Il y a la brocante à St Lo
Oh hisse et ho !

Je les aime bien mes tout comme
La neige est tombée sur Belledonne
Il y des flocons, des flocs
Ici et oc !

Comme je les trouve charmants
Les vieux chanteurs, les vieux amants
Tombés d’on ne sait quelle étoile
Hissez la voile !

Et pour tout dire en raccourci :
Comme je vous aime les amis
quand vous rétrécissez l’espace
entre vos voix, entre mes bras !

J’aime chanter dans vos haubans
J’aime courir dedans vos champs
d’honnête blé, de folle avoine

Solange, Micheline, Gazou
Marie-Andrée, Pierre, Marie-Jo
Toutes les Marie à gogo
Et tous les Pierre sans distinction

Les Jean aussi, les Adonis
Même les Narcisses, les Jocrisses
Tous ceux qui tombent dans mes lisses

Comme je les aime à foison
Mes semblables et mes différents
Pas seulement au Jour de L’An

Chaque jour qui rime en chansons

22 janvier 2009

MANEGE



à assortir avec une photo de Julie, ( Flickr ) la première du calendrier 2009

Tourne le petit manège
Tournent les couleurs en cortège
Les parents sur la touche attendent
Tournent les années sur la neige …
Mais il restera cet instant
saisi par les doigts attendris
d’une femme prénommé Julie
qui apprivoisa l’air du temps

et de mon calendar perso : sur le manège des contes de noël, des installations confortables ...

21 janvier 2009

LA QUALITE DE L'HOMME


"de l'homme ou de la femme ..." Photo Julie

Proposition de l'atelier d'écriture
La qualité d'homme que je préfère tient aux chaussures du candidat. J'aime qu'il soit bien dans ses baskets, ses bottes ou ses souliers vernis. Un exemple ? J'aime que le vigneron chez qui nous nous servons en vin du Bugey ait un peu de temps à perdre avec nous, sourit à l'objectif de Julie, nous conduise vers les installations pour nous expliquer la dernière vinification. Depuis quelques quarante ans que je le connais, j'aime que son sourire n'ait pas changé. Certes son visage a pris quelques rondeurs supplémentaires, ses vins quelques médailles, mais cette qualité de naturel, de satisfaction du monde et de son travail, n'a pas pris une ride. A propos de rides je ne sais quel auteur ( Camus ?) dit qu'après un certain âge on est responsable de son visage. J'aime sur les photos de Julie lire cette responsabilité d'homme ou de femme d'assumer paisiblement sa vie, son oeuvre, quelles qu'elles aient pu être. Sans battre sa coulpe, sans pleurnicher sur les tracas et les tourments. Je sais bien que ce n'est pas tous les jours évident mais à chaque fois que je rencontre, que je retrouve cette qualité je m'en sens moi-même capable, investie par ceux qui la diffusent. La qualité d'homme donnée à la naissance à tout un chacun est à préserver jusqu'à la vieillesse. Elle dépend aussi de la qualité du regard porté sur vous tout au long de la vie. Et ça peut-être est-ce davantage une question de chance que de volonté ?

20 janvier 2009

JULIE IS ...


photo Julie, Bas-Dauphiné

Julie est une cavalière photographique :
Toujours le pied à l’étrier

Julie est une chasseresse en images :
Toujours le doigt sur la détente

Julie est un franc-tireur du partage
Elle met la vie à l’étalage
Fruits et légumes, silhouettes, visages …

Julie voyage
Du Maroc à l’Irlande
D’ici de là, d’ancien en nouveau monde
Julie abonde
Elle emplit ses cahiers, ses yeux, ses bagages
Rétrospectivement s’amuse de ses naufrages
Nage et surnage

Julie bavarde,
avec les choses et les gens
en échos, en images
comme les oiseaux
font ramage

mais chut ! Ecoutez !
Julie raconte en photos ce que les mots ne peuvent donner :
Le silence d’azur dans l'or des peupliers

19 janvier 2009

Sol SOL SOL RE bis

Il arrive qu'une symphonie naissante au matin se casse la gueule au soir. C'est bête. Un coup de Bordeaux en trop, un navet à la téloch, un thé à la mauvaise heure ? l'impossibilité foncière d'appliquer à la lettre les conseils enjoués que l'on donne aux autres ?
Bon ! repartons d'un bon pied ! Sol Sol Sol Re



M'est revenu le motif de l'accord.
Maurice Genevoix encore.
J'avais entendu à la radio une lecture d'un de ses textes : le départ à la chasse, les trompes sonnaient : sol sol sol ré. C'était la première phrase, l'envol du texte. J'avais donné à entendre l'émission à mes élèves et interrompu pour leur laisser écrire eux-mêmes une suite. En somme j'avais inventé le mot inducteur si banal aujourd'hui en atelier d'écriture. Le résultat de mes élèves m'avait paru si prometteur ( des Maurice Genevoix à la pelle) que j'avais envoyé ces textes au secrétaire alors de l'Académie Française. Nous étions donc dans les années 1970 puisqu'il en démissionna en 74. Je reçus une réponse aimable et un autographe que j'ai perdu, oh la la ! Il n'en fallut pas plus pour que je me sente à vie sous l'aile du grand écrivain.
C'est amusant que l'anecdote au demeurant bien insignifiante dans une vie de pédago ( mais pas n'importe lequel !) ressurgisse sur un accord. Je suis retourné lire hier du Genevois." Jeanne Robelin", une histoire de femme dans la guerre et "La mort de près" un récit autobiographique. Je progresse doucement à travers les deux et la journée. Comme à chaque fois que je trouve une écriture qui me touche profondément j'y puise une peu d'énergie pour écrire moi-même, surtout pour me défaire du sentiment défaitiste que l'écriture, si bonne soit elle, ne sert à rien contre le malheur, la bêtise, la dégradation physique ... et puis c'est si agréable de trouver là une citation estampillée. Les pedago adorent les citations. Eux qui ont tant à corriger des fameuses "fautes" de français comme ils sont heureux de témoigner pour la langue, la splendide, la limpide, l'harmonieuse langue française ! Il leur faut toute une vie pour y mettre eux-mêmes la main à la pâte sans permission, sans références. Pour sortir de l'obéissance passive. Pour bloguer à tire-larigot !

"Aujourd'hui comme alors, c'est ainsi que je voudrais témoigner. Seulement, entre mon témoignage d'homme jeune et celui qui me requiert maintenant, il y a la durée d'une vie, son poids et peut-être sa sérénité.
Je voudrais revenir sur ce mot. Certes je reconnais le garçon du temps de guerre, le soldat que j'ai été ; mieux sans doute et plus fraternellement que je l'euse fait en ma maturité. Mais je sens comme au premier jour les émotions qui l'ont secoué, ses indignations, ses révoltes, sa pitié, son courage et sa peur, Il me semble aujourd'hui que nous pouvons lui et moi, confronter nos témoignages, les unir, en accroître ainsi la force et en prolonger l'écho.
A ce garçon qui était moi, je devrai dans cette tentative l'apport d'une connaissance marquée au vif de sa chair mortelle. Il me devra, peut-être, celui de cette sérénité dont je parlais il y a un instant et à laquelle, au long des années, la connaissance qu'il m'a léguée aura certaienement contribué. Ainsi se définit et se précise le but qui me sollicite aujourd'hui;"

Et si j'avais retiré les guillemets, changé le "garçon" en la "fille" m'auriez-vous reconnu ? auriez-vous reconnu vos propres intentions d'écrivains à cette place modeste et changeante . Mais je ne puis ! Pas de capture frauduleuse, une appropriation.
" Tout homme est solidaire. Il est ainsi comptable de ce qu'il est en mesure de transmettre. et il l'est dans la mesure même de ce qu'il a personnellemnt reçu. L'heure est venue pour moi d'y songer."
Quand Maurice Genevois écrit ceci en 1972, il a 82 ans. J'ai encore du temps devant moi !
Sol Sol Sol ré !

18 janvier 2009

SOL SOL SOL RE



SOL SOL SOL RE

Un lever de soleil à casser la baraque
à faire péter la sous-ventrière des chevaux (du soleil)
Belledonne en étincelle de tous ses pics et fondrières
Vingt dieux ! La belle cathédrale !
Un vol de corbeaux s’exaspère
Quel intrus dans leur ciel ? Quelle pie dans leur pénates ?

C’est Dimanche au long cours, Dimanche à la maison
Peut-être le calendrier a changé de saison ?
Ah ! Le rouge est parti. Le bleu s’engage
résolument dans l’intervalles des nuages …

Sur la tintaine Pierrot remonte à l’étymologie
Joute énergiquement dans le latin et ses débris
Sol, solis, solelz, soliculus … Sol sol sol ré
C’est une quinte sous mes doigts qui vient chanter


• tintaine sur le bateau la plateforme où les jouteurs s’affrontent
• viendrait de la « quintaine » des Romains, voie (la 5ième) sur laquelle s’entraînaient les cavaliers

17 janvier 2009

DROITS DE L'HOMME


« - Et ces Droits de l’Homme ; qu’est-ce que c’est ?
- C’est une ligue généreuse. Depuis la guerre, elle a combattu, opiniâtrement, pour obtenir la réhabilitation de pauvres types victimes de conseils de guerre. Il y en a eu, mon Dieu, un certain nombre /…/ les sentences des conseils de guerre ont une implacabilité divine : elles sont immédiatement exécutoires ; et il suffit d’une toute petite seconde, le temps d’un éclair ou à peine davantage pour que douze balles soient parties des douze fusils d’un peloton d’exécution. Les réhabilitations sont plus longues /…/ tout de même c’est une noble tâche que celle de purifier certains souvenirs monstrueusement salis, de lacérer certaines petites affiches infâmes qu’on a collées pendant la guerre aux portes des mairies françaises. On en a mis une à Gency : un soldat Bayet, décrété déserteur, et condamné à mort par contumace. Sa femme est morte de celle-là. Et ses gosses … les autres gosses s’acharnaient sur eux, excités par les parents /…/ et puis un jour, après la guerre, on a retrouvé le corps du soldat Bayet, tué bravement pendant une attaque … Celui-là, la Ligue de Droits de l’Homme l’a fait réhabiliter /…/ »
Du livre pré-cité LA JOIE Maurice Genevois
Photo d’un bois gravé qui accompagne le texte

16 janvier 2009

LA JOIE


Dans ta nuit de passage de gué, tu ne trouves pas, Colombe, plus malheureux que toi ! Regarde bien !

1921 On inaugure un monument aux morts de 14 dans le village. Andrianne, député et ancien combattant, est là.
« D’où venaient alors, ces frissons courts qui le contraignaient à serrer durement les mâchoires ? D’où venait ce sanglot nerveux qui lui monta tout à coup dans la gorge ? Il regardait les rangs serrés des mutilés, les manches vides, les yeux de verre, les pilons de bois. Il y avait tous ceux de Saint-Gervais, beaucoup d’autres aussi venus des communes voisines. Ils s’étaient rapprochés les uns des autres, avec leurs vêtements du dimanche, leurs poignets gourds, leurs rudes visages naïvement attentifs : et l’on voyait combien ils avaient souffert – les manchots, les boiteux, les borgnes, ceux à la face déchirée, ceux dont on n’apercevait d’autre blessure que leur pâleur cruelle ou leurs rides trop vite creusées, - de la même souffrance fraternelle et terrible, dont ils ne parlaient point, eux qui l’avaient subie ensemble, et que pourtant ils n’oublieraient, quoi qu’il fût, jamais. »

J’ai trouvé « La Joie » un roman de Maurice Genevoix dans une brocante, une édition J FERENCZI et fils de 1926, Prix : trois francs cinquante, pour 2 euros. C’est le nom de l’auteur qui m’avait fait le dénicher. Et j’ai bien été payé de retour. Dans les soubresauts d’après-guerre, dans la maladie ( tuberculose), la jalousie dévorante envers la femme aimée, l’homme va se redresser et retrouver le sens de sa vie, la joie de vivre. Il écrit à son ami de la Ligue des Droits de l’homme, nouvellement créée pour décliner l’invitation à la vie publique. Il reprendra du service dans l’enseignement.

« Que dire de nous, alors, qui avons nos yeux, notre voix, et qui sommes deux pour éprouver tous nos bonheurs, les partager et les multiplier ? …/…/ cette lettre qui prétendait convaincre n’est rien qu’une effusion lyrique, cent fois trop courte si je veux épancher l’allégresse de mon être profond, /…/ Je ne veux rien prouver /… ma lettre va , comme elle est, comme je sens. Je ne vous la donne pas pour une révélation, pour une évangile du bonheur. Si même vous le vouliez, il vous serait facile d’ironiser, de la tourner en ridicule, de la traduire en refrain de romance ou en vérité de La Palisse « il faut vivre jusqu’à sa mort » mais vous n’aimez pas ce genre d’ironie.
Souhaitez-moi bon courage : j’en ai besoin, car il en faut pour tâcher d’être heureux, pour conquérir et sauvegarder sa joie. Se répéter » je suis heureux » se satisfaire d’une rumination béate, cela ne saurait suffire. Vouloir être heureux est une autre chose, infiniment plus difficile, et qui mérite le respect : persévérance, attention, indulgence, force d’âme, pureté, tout cela est-il suffisant pour ne pas créer de mauvais souvenirs ? /…/ »
Je te laisse sur l’interrogation Colombe, mais avec ou sans joie aujourd’hui, tu sauras trouver une réponse qui te convienne. Ton désespoir a trop la marque de la vie ardente voulue pour te paralyser longtemps.
Allez ! Encore une citation qui occupe en permanence mon esprit et se rappelle à moi en cas de manque. Elle est d’Alain, le philosophe dont la découverte me fut tant précieuse en classe de philo. Elle est courte, simple, évidente :
« … ET CULTIVER LA JOIE, SEUL TRESOR HUMAIN »
Bon jardinage !

15 janvier 2009

LIERRE



une idée neuve : pour illustrer les prénoms des invités à la table du banquet dont il était question précédemment pas besoin de Platon ! Ecrivez-les sur une feuille de lierre.

ELLE AVAIT PRIS DU LIERRE
la feuille annonciatrice
aux prénoms de baptême
Elle avait ramassé sur le chemin
la branche
et donné à couper l’an nouveau
pour le bûcher des jours
Et elle avait semé au cœur
la plante rouge et verte
aux couleurs de Noël
Pour faire bonne mesure
Elle avait mis guirlandes
Trois fois rien … Tout ensemble
Cela fit un bouquet pour en orner la table

Elle s’appelle Michèle
Ça rime avec les ailes
des oiseaux
Avec le chant aussi
Car Michèle chante après minuit
(chrétien)
comme le rossignol au nid.

09 janvier 2009

OSTRACISME



proposition de l'atelier d'écriture
oh qu'il est dur au contact ce mot savant ! Il y a de l'os là-dedans. Quand à la chair du mot voyons ? c'est le refus de partager la pitance non ? Faire preuve d'ostracisme c'est prouver aux autres qu'on leur est supérieur et donc qu'on doit avoir la première place au banquet. En fait on ne cherche rien à prouver : l'évidence de cette supériorité on ne veut que l'imposer sans discussion. Mais la question principale ne se pose pas à On mais à Moi. Ai-je fait montre et usage d'ostracisme ? sans doute ! Petite, pour participer à la guerre à ma manière, j'ai chanté " la DCA tire et ne touche rien, Les Boches se retirent comme des p'tits lapins" fort satisfaite des applaudissements ! il a fallu que le vent change pour que j'appelle Allemand ce qui était Boche, merveille ce qui était moche. Idem pour les bohémiens "les bouèmes" les voleurs de poules, il a fallu que j'atteigne la retraite pour apprendre à chanter en "rom". Changement de vocabulaire, changement de point de vue. Ai-je été victime d'ostracisme. Oui ! ma volonté de me couler dans le moule pour y échapper vient de là. Mon application à être du bon côté de la barrière. Une lutte pourtant pour comprendre, pour accepter, voire pour aider l'autre si différent. Même sans menace, sans chantage aux allocations familales, j'ai signé les fiches de passage à l'école pour ces enfants. Ces enfants-là, ces gens-là ! je pense à Brel ! Lutte entre les extrèmes, les contraires pour qu'ils se rejoignent, y compris en moi !

08 janvier 2009

LA BOUGIE


imperceptible sourire de la bougie en plein jour

de l'allumette à la bougie
provoquer la flamme
c'est déjà acte de foi
en sa propre capacité de lumière

si le corps de la bougie progressivement se tasse
sa flamme reste la même jusquà sa fin

accepter que certains jours gris la petite bougie se taise
Carpe-bougie oublieuse de mots

aucune interrogation pour la bougie
toujours point d'exclamation tourné vers le haut !

Bijou, bougie
de chacun prendre l'étincellement et laisser la cendre

07 janvier 2009

PAS DE PAIN ! PAS DE JUS !


oh ben dites donc ! quel malheur ! ce matin ça sentait pas le pain dans la cuisine. Le bon pain chaud qui donne chaud au coeur ! c'est que le Pierre avait oublié de mettre le pétrin ( le truc métallique qui tourne) dans la machine ! alors, forcément il a retiré un troyon dur comme du bois ! Ah mon père, lui, il ne ratait jamais le pain dans son pétrin, vous savez la maie en chêne où on brassait à pleins bras sans électricité.
Bref ! y fait froid ! ah ben dites donc ! c'est jour de pointe ! l'courant qui est au courant des décisions de EDF est rare, est taré, est tarifié, est raté. Va falloir chauffer au bois !
bref de bref je vous résume la situation désastreuse sans tarder : ça va me réchauffer !

J’ai voulu désespérément
écrire mes joies et mes tourments
pour en multiplier les signes

J’ai voulu être, sans queue ni tête
aussi légère que l’astronef
aussi passionnée qu’hirondelle

J’ai voulu, vieille, être gamine
J’ai voulu accrocher des rimes
jusqu’au sommet de la colline

Fussent des rimes en patois
ou de vulgaires assonances
J’ai voulu entrer dans la danse

J’ai voulu moi sans feu ni loi
rallumer sous mon tas de bois
le souvenir de mes bouteilles

Je les cachai il y a longtemps
si bien que j’en perdis la trace
et que j’en oubliai la treille

J’ai voulu dans mon tas de blé
gardé le levain de mon père
Las ! le pain est fichu aujourd’hui !

Pas de pain, pas de rime altière
Pas d’ailes pour échapper au froid
Pas d’autre solution. Que faire ?

Secouer ce tas de vieux os
jusqu’à devenir un chameau
qui passera par la chatière ?

06 janvier 2009

OS à RONGER !


Un os à ronger
« Ion pense que chacun doit trouver dans la vie l’os qu’il aimerait ronger. On peut bien vivre d’un os comme ça. Ion dit qu’il reste toujours de la viande que l’on peut en détacher. Aucun os n’est jamais nettoyé à blanc. »
« Le masseur aveugle » est de CATALIN DORIAN FLORESCU

Mettant les reliefs du repas à la poubelle je me suis étonnée hier de tout ce qui restait sur les os. Il s’en est fallu de peu pour que je les retire de l’assiette de mes invités dans la cuisine et les « rouzigue » encore un peu comme ils le méritaient.
De mon enfance paysanne j’ai gardé le goût de ronger l’os en le saisissant à deux mains et en le portant à ma bouche. Oh je sais aussi, de la fourchette et du couteau, lui enlever élégamment les fibres de viande de lapin, de volaille … mais si les circonstances le permettent je rouzigue en direct, c’est tellement meilleur !
Pierre m’a expliqué que quelque part en Occitanie ( là où on « rouzigue » au lieu de « ronger » en français) il y a un chien sculpté et la devise « je mords qui m’a mordu » Le chien ronge un os.
A propos du Québec je trouve cette autre citation sur un bas-relief :
« je suis un chien qui ronge l’os
En le rongeant je prends mon repos
Un temps viendra qui n’est pas venu
que je morderay qui m’a mordu »

Puisque nous avons encore tout Janvier pour échanger des vœux
Que 2009 vous offre moult os !
Gardez vos dents pour les ronger ! »

05 janvier 2009

CE QUI ECLABOUSSE


Ce qui éclabousse aujourd’hui
C’est le soleil sur le givre
C’est le givre sur le sapin
C’est l’abondance de la journée à la cuisine
C’est l’espérance des correspondances d’opinion malgré la variété de vents qui soufflent
C’est les livres tout enclins à s’ouvrir à la bonne page :

« Pardonnez-moi de vous aimer à travers moi
De vous perdre sans cesse dans la foule
O crieurs de journaux intimes seuls prophètes
Seuls amis en ce monde et ailleurs. »
René Guy Cadou

Dans les désordres des traversées de la nuit noire, au matin, c’est la phrase légère qui s’éclabousse de la lumière à travers la vitre et ne retient plus rien de ses éclaboussures …
C’est le givre consentant à fondre dans cette lumière-là

04 janvier 2009

LE DON DE VOIR


Le don de voir

Ion dans le livre « Le masseur aveugle » est un jeune garçon condamné à devenir aveugle, par dégénérescence. Aussi engrange-t-il dans sa mémoire jusqu’à son dernier jour de vision tout ce qu’il peut lire (extrait précédent). Le reste de sa vie, formé dans un centre spécialisé au massage, il obligera ses patients à lui enregistrer des livres. J’ai expédié ce livre sans en prendre la référence mais je vais la retrouver dès qu’il sera parvenu à son port. J’ai aussi en réserve d’autres extraits scannés et enregistrés sur mini disque. C’est un livre récemment traduit du Roumain et avec son seul titre vous devriez vous le procurer chez votre libraire. C’est un livre superbe d’écriture et de contenu.
Dans la réalité j’ai connu Aurore atteinte du même mal, qui continue à se battre pour maintenir ses souvenirs grands ouverts. Elle a ainsi un ordinateur en braille qui transcrit les messages qu’elle reçoit. Elle écrit, chante, transmet sans problèmes. Elle sculpte et dessine. Elle a aussi des études en psychologie et une expérience d’écoute avec lesquelles elle aide les autres à « voir clair » dans leurs problèmes.


Quel don celui de voir ! Je m’émerveille que nous puissions voir aussi bien en rêve avec une acuité telle que nous recevons de l’image intérieure autant de beauté, de présence que celle en direct. Voir en photos, avec cette extension merveilleuse des appareils électroniques. Voir en grossissements comme nos yeux ne peuvent le faire. Voir en abondance, en multiplicité par tous les canaux modernes qui charrient jusqu’à nous des flots ininterrompus. Il nous faut parfois nous défendre contre un envahissement de toutes ces images qui brouillent nos pistes. Et lire, lire, quel cadeau !

A cause d’un rêve luxuriant, où je voyais et peignais ce que je voyais, et voyais ma peinture, ce matin je me suis réveillée en joie, aussitôt en projets … m’a visitée la citation de Valéry « le don de vivre est passé dans les fleurs … »
Je me suis souvenu comment enfant je m’exerçais à être aveugle en marchant, voire en courant sur le chemin. Un jeu de cache-cache avec moi-même tant je savais que je pouvais y mettre fin quand je voudrais. Me faire peur et me rassurer aussitôt sur ce que la vie continuerait quoi qu’il arrive !

Le don de voir en givre, en neige, en blanc et noir, en couleurs, en patience et en espérance, en avant et en arrière. Que ce don-là accompagne votre année et la mienne !

03 janvier 2009

JOLIE CARTE


JOLIE CARTE

s’annonce elle-même
jolie par devant
jolie par derrière
par e-mail ( prononcer y mêle !)

C’était à l’épicerie
que dans mon enfance
(vous savez l’époque bénie
plantée d’innocence)
qu’on les achetait
les joie jolies cartes
de vœux adoucis
avec de la neige froide

Maintenant que voulez-vous
Les anges dans les campagnes
N’ont plus rien à faire
Ni par devant ni derrière
Tout passe sur Internet
Les jolies cartes toutes prêtes
Hop on clique et c’est fini !

Maman où es-tu ?
Papa que fais-tu ?
Parrain as-tu mis tes œufs
dans le même panier ?
Marraine dans un seul sabot percé
Ne flanque pas tes deux pieds !

Au royaume de Joie-jolie
Le roi a la grippe
Et tous ses sujets
Sont déboussolés
Bonne année et poil au nez !
Atchum !
A vos souhaits !

02 janvier 2009

ET CELLE QUI VIENT ...


« Il voulait rassembler
Le monde dans sa tête avant qu'il fut trop tard. Il gravait dans sa mémoire les environs de Borsa, le doux paysage et ses collines, ou 1'abrupt et ses rochers, et toutes les couleurs, les tons de vert et de brun.
Les seins, les hanches et les mollets des filles.
Les cheveux tressés que l'on portait en nattes devant la poitrine quand on n'était pas mariée.
Les yeux bleus du frère et le visage tanné de la mère.
Comment on souriait, pleurait et regardait d'un air fâché.
Un visage endormi et un somnolent.
Le sombre bois de sapin dont était bâtie la maison. Le toit de bardeaux.
Le père dans l'ouverture de la grange, quand il sculptait
Les pruniers qui fleurissaient.
Les fourmis qui grimpaient en haut des lambourdes.
La couleur du sang et la couleur du ciel.
Des lettres sur le papier. »
« Le masseur aveugle » Roumanie,( quel est le nom de l'auteur Julie ?)

Ion va devenir aveugle, il le sait, il s’y prépare …
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« Au Mozambique, la révolution de la patate orange
Riche en vitamine A, le tubercule a permis de diminuer le nombre de cas de cécité chez les enfants.
L’initiative est partie d’un constat : près de 7O o/o des enfants âgés de 6 mois à 5 ans présentent une carence en vitamine A, ce qui conduit une partie d’entre eux à perdre partiellement ou totalement la vue. Quelques 125 millions d’enfants sont affectés dans le monde. »
« Le Monde » mercredi 24 décembre 2008