Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

30 novembre 2007

ALPHABET V





4 Août
VENEZ … VIENS … Je n’en peux plus de discrétion et de silence. Envahissez l’espace de ma retraite. Envahis-moi de demandes stupides et de fantaisie. Allons danser ! Viens me rejoindre sur le banc de la serre dans la chaleur du soir. Enfin de la vraie chaleur d’Août qui cuit et fait transpirer. Venez me dire n’importe quoi, des banalités ordinaires sur les chiens, les chats et le gouvernement. Explosez de rire et racontez à la petite vieille des blagues salaces. Viens m’embrasser dans le cou. N’aie pas peur de bousculer mes rides ! Arrête de te rendre utile, de brûler les détritus, de filtrer le vin de noix ( 5 litres !). Viens donc voir ces deux dahlias fuchsia qui viennent de fleurir sans souci, sans aucun souci de m’envahir !

29 novembre 2007

DEMI LUNE VIVE


L’homme :
C’est la lumière de la nuit qui éclaire le chemin et aplatit ses bosses et creux. Surprise de nos pieds qui bousculent les cailloux avant de les voir. Ciel d’autant plus noir que les étoiles sont plus pointues. Les rochers de Pucelles droits dans le froid s’habillent d’ombres crues et de blancheurs blafardes, dressées comme un cri sous le ciel. Dans le silence il n’y a que le murmure de nos pas et le bourdonnement de nos cœurs. Sans autre but que de boire la nuit.

La femme :
Demi Lune éclaire
Bombarde les Trois Pucelles
Demie robe de mariée

« Tous les dragons de notre vie sont peut-être des princesses qui demandent à être réveillées »

Etoiles étincellent
Des chariots, des casseroles
Et l’Ours quelque part
Qui grommelle et qui rouspète

Tais-toi Ours Polaire
Viens entre mes bras
Je te chanterai
Des chansons à moi

« quand on ne va pas à l’inconscient, l’inconscient vient vers nous »*

Brr il fait moins 3 !
J’ai mis mon gros pull over
Eclairée de l’intérieur
La nuit est un paradoxe
Et une bonne affaire !

* Les Rêves et la vie Etienne Pernot

28 novembre 2007

J'AHANE !

Que faire ?
Si silencieuse la nuit
J'écoute
je prends chez le poète d'à-côté
la pierre qui roule
l'eau du puits
j'ahane
"et l'heure de vérité n'est pas toujours la mort"
***
j'ai ouvert les volets
à quoi bon clore la nuit au-dehors
elle passe la frontière
Sortir la nuit de son sommeil
pour atteler Phoebus au char des transparences

ALPHABET U



4 Août
UNE réminiscence n’est pas UN souvenir. Il y a plus qu’une différence de sexe entre eux, encore que je crois que la différence de sexe soit irréductible. Une réminiscence s’infiltre en moi, jaillit sur une forme, une odeur, même dans mes rêves, sans que je l’ai convoquée. Quand j’ai volé cette nuit dans l’éther souple, neutre de couleurs comme une algue délivrée d’attaches, dans une certitude bienheureuse de mes aptitudes à voler, contemplant la neutralité bienveillante du cosmos, était-ce réminiscence de l’état embryonnaire ? Je ne me souviens pas d’avoir fait antérieurement un tel rêve. Aucuns poings crispés à la Goldorak, la position instantanée horizontale, aucun besoin de regards extérieurs pour remarquer ma performance. Je volais. C’était simple, beau et bon.

27 novembre 2007

VRAIE DOUCEUR


"Est-ce que la vraie douceur a besoin de violence ?" s'interroge Julie à propos de mon écho d'hier

Ce matin je réinstalle les coussins après avoir lavé les enveloppes. Ils me servent à caler mes bras, ma tête, sur le tapis du matin pour installer ma carcasse dans la douceur d'une journée active et tranquille.
Ce sont de vieux coussins que j'aime bien, toujours neufs après chaque lavage.

Installer la douceur dans le renouveau et l'habitude, dans la danse spontanée et la technique respiratoire.

Récit de femme en partageant le thé. Une vie cahotique : des maris, des enfants, à chaque fois l'amour transformé en cauchemar, en coups et blessures, en jugements, en démarches à n'en plus finir pour retrouver un peu de paix et d'espoir.

et pourtant, au delà de la souffrance, du désarroi, une douceur de traits sur un visage pacifié, la ferveur d'un poème que l'on m'offre.

Installer la douceur du poème sur la violence de la vie, les mots ailés plus forts que les pierres, les afficher au tableau près de moi.

Douceur des voix, douceur de ta voix. Elle a retrouvé l'enfance à dire son émoi, sa joie.
Que de colère encore dans la mienne quand elle éclate pour dire NON ! Non ce n'est plus possible. Je ne veux plus. Je ne peux plus me battre; Je ne veux plus me justifier, rendre des comptes. Je ne veux plus qu'une longue caresse ...

Installer la douceur du jour sur la nuit inquiète

" alors j'arrache à la nuit sa lumière
Il dort peut-être ...
Peut-être il se retourne en geignant
il ne sait pas ... Peut-être il se doute ...
Dissoudre le silence, la distance
mon flanc manque à son sommeil
Il tend la main
peut-être il me touche
Je sens son nom prendre mes lèvres
Ma main qui trace des sillons dans la nuit a l'odeur de sa voix claire sous le soleil ..."

26 novembre 2007

PREMIERE HEURE


" Les contraires
Un jour j'ai découvert
que c'était cela ma tache
mon chemin
ma joie
Le jour a besoin de la nuit
le feu a besoin de l'eau
La dureté de la pierre appelle la caresse
La terre appelle le ciel
Sans violence pas de vraie douceur
Sans larmes pas de vrai sourire
Et sans ombre pas de lumière"
blog de Gazou
première lecture, premier lien, première union des contraires...

Le soleil s'est levé après plusieurs jours de brûme intense. Pas fatigué le soleil, juste en convalescence. La chaîne de Belledonne encore cachée mais la ville qui pointe son nez en bas dans la vallée ...
Délicieuse cette gelée de coings sur la pogne de courge
Lisant ces contraires je retourne à ma lecture de la nuit

Erri De Luca "Première heure"
"dans l'écriture sainte construire est important au point que ce verbe en hébreu donne vie au mot BEN "fils"
et quand une femme stérile, Sarah, épouse d'Abraham, offre à son mari sa propre servante pour lui donner un fils, elle lui dit : "je serai construite par son intermédiaire/.../ Pour une femme de l'histoire sainte, avoir des enfants est un acte de construction. Maison est un mot important au point de remplacer le mot famille.

Stérile, l'envers de fertile que j'interrogeais hier. Comme il y a des stérilités douloureuses, il y a des fertilités catastrophes. Je fus le produit de l'une d'elles. Je ne m'en plains pas.

Il y a des ouvriers de la dernière heure que l'on méprise en général. Je suis née d'un pays où on bosse de bonne heure. La bonne heure c'est le matin qu'elle se lève tôt. C'est l'enfance de l'art. Dans la gloire du soleil s'il se peut. Sinon on fait avec ...
Aujourd'hui jour de chance.
Passage d'un vol de corneilles.
"quatre pattes d'oiseaux
ont écrit sur le ciel
Message ..."
je m'en vais construire en maçon consciencieux, en piano laborieux mais confiant. Mais pour construire il faut parfois faire tomber, n'est-ce pas Louis ?

25 novembre 2007

FERTILE


de l'atelier d'écriture

Fertile : un beau mot qui ruisselle, qui abonde ... la terre est fertile, la femme est fertile. La journée de ce dimanche est fertile de toutes les semences passées. J'irai chez Jacques mon fils, Siméon, Théotime, Elouan, mes petits fils. Le temps gris en est bleu, mon espoir en est plein. Je ressens, de façon très nouvelle, cette attente confiante de la terre arrivée à son hiver. Elle laisse venir à elle. Elle nourrit selon ses ressources et son savoir. Elle attend. Elle sait attendre. Elle mesure le prix d'avoir été choisie pour porter.
Oh elle sait bien la terre du nord que dans ses boyaux de 14-18 on a logé des os qui ne renaîtront jamais ! Elle les a inclus aux labours. Oh elle sait bien la terre du Sud que la tempête de la semaine dernière l'a labourée mais l'a dévastée sans planter ! Elle nettoie les feuilles, les incorpore à l'humus. Oh ils savent bien les quatre points cardinaux que je ne sais pas de quel côté me tourner quand ma tête s'en va à vau l'eau, quand mes forces fondent, quand le passé grippe-sous me demande des intérêts impayés ! Mais cette page ouverte par volonté et à-propos est fertile d'énergie et possibilités. Prendre un mot, le hisser au sommet de son échelle mentale comme si le danger n'existait pas, comme si les jambes ne flanchaient pas, pour le seul plaisir de grimper, c'est une jouvence, c'est une jeunesse. Fertile sont les moissons, les fenaisons, les lectures, les écritures, les araignées, les couleuvres, les récoltes ...

24 novembre 2007

MALADIE DE A

" Depuis hier j'ai été prise d'une douleur lancinante dans l'épaule droite, une douleur autrement diffuse, qui me réveille et se précise dès que je me mets à écrire. Je peux localiser le muscle incriminé à un spécialiste de l'anatomie, lui demander d'appuyer où ça fait mal, et avoir mal en effet quand il appuie. Je connais le lieu de la douleur et je connais le nom de la douleur, le spécialiste me le confirme, le diagnostic est bon, et je connais aussi le remède à la douleur, décontractez-vous, tenez-vous droite, relâchez vos dorsaux"

Sauf que le spécialiste ne sait pas que j'écris sur la maladie de A"
/.../
Que vais-je faire avec ce corps rétif, avec ce corps raide et crispé et tendu qui se refuse à mes envies ?

Je vais écrire sur la maladie de A."

Extrait de "On n'est pas là pour disparaître" d'Olivia Rosenthal ( juillet 2007 ed. Verticales.)

J'avais emporté le livre avec moi." il est dur" m'avait dit Pierre qui l'avait acheté. Je suis resté deux jours sans le toucher mais j'ai commencé à en parler et dans la foulée je l'ai sorti de la valise. Faute de pouvoir dormir je l'ai commencé en soirée, continué dans la nuit, achevé le lendemain. Ce matin au téléphone je dis à Pierre que je vais en écrire sur le blog. "Dur oui ! et en même temps comme l'annonce la couverture "optimiste et désespéré" ". De ces livres dont je ne me dis pas que j'aurais pu les écrire puisque j'y trouve une nouveauté d'écriture, une sincérité intransigeante, une force et une sensibilité qui s'abandonne à sa faiblesse, à ses désarrois pour mieux les surmonter ... bien différentes des miennes.
Du bien être trouvé dans ma tournée Contes ( mais pour le préserver en présence des enfants je ne suis pas allée rendre visite à la Maladie d'Alzeimer) je rapporte un projet, une intention. Le titre :" MERCI M'SIEURS DAMES" le titre même de la chanson que les blogs m'avaient inspirée. Dire MERCI à tout ce, à tous ceux, que j'ai rencontrés et qui m'ont donné. La liste en serait longue. Je ne veux pas faire de liste. Les Merci viendront à ma rencontre quand ils seront mûrs, tranquilles, joyeux. Je veux écrire joyeux, même sur les maladies, les miennes et celles des autres, même sur l'injustice des maladies et des morts. Et donc pour celà je dois écouter ma carcasse, restaurer mon corps joyeux quand il s'effondre ou s'apitoie sur lui-même, apprivoiser mes douleurs de droite et de gauche, d'âme et de muscles, logées ici ou là. Prendre mon temps et en même temps ! ne pas trop attendre ! Le temps presse !
La brûme enveloppe la maison, page blanche à transpercer d'écriture comme toutes les brûmes.
ce samedi 24novembre

un livre d'acquièsement, de remerciements ...
un livre au fur et à mesure ..
un livre "comme ça", sans se bouliguer, sans s'en faire
un livre de tout-repos
Quand le livre est fini, on le dépose au cimetière. ça aurait de la gueule un livre comme ça en plaque mortuaire vivante. MERCI M'SIEURS DAMES ! avec un point d'exclamation !
Au moins en m'aspergeant d'eau bénite ou en jetant la rose rouge laïque les visiteurs du soir ou du matin souriraient. ça devrait leur faire plaisir que je les congratule dans un moment pareil ! les faire rire peut-être ! les soulager ... si le temps n'est pas beau, je parle du temps qu'il fait non de celui déjà vécu ...

En attendant je ferai mieux de dormir parce que demain je serai vivante et les petits Riquiquis qui viendront en car, spécialement pour m'écouter, les Boucles d'Or et les Tifs Noirs délurés, c'est pas des Merci qu'ils veulent se mettre dans les oreilles !
(la nuit de lecture sur la maladie de A. le mercredi 21)

ALPHABET T'



T

3 Août
« TU ES BELLE », toujours aussi belle, ai-je dit à Natacha. Touchée par sa jeunesse teinte en roux pour en paraître plus éclatante. Elle sourit de l’apostrophe en guise de Bonjour. Elle a arrêté la voiture au bord du chemin, est descendue avec Léo sa mère pour nous saluer Sylvie et moi. Ce pays est un pays de connaissance réciproque. Ce pays est ouvert au bonjour, à l’arrêt sur rencontre, à l’échange du regard, de la beauté et de la voix. Entre Sylvie, 94 ans et Natacha, 20 ans, il n’y a pas la moindre jalousie, le moindre jugement. Chacune est à sa place. Tu es belle la vie, comme le proclame le feuilleton sur la trois, à Marseille. Et beaucoup plus calme ici que là-bas !

23 novembre 2007

EN DIRECT DU PAYS DES OURS


- le coin de l'exposition où j'avais installé mon étal de conteuse
- le diapo chanté AU POINT DE CROIX a été supprimé pour cause de protection de l'image des enfants, il sera rétabli sous peu avec les modifications nécessaires


Retour après une promenade de quelques jours au pays des ours et des enfants. Pas question que j’aille me coucher avant d’en avoir fixé le bonheur. Comme c’est bon d’être accueillie par les petits et un peu plus grands avec la considération due à une personne venue d’ailleurs spécialement pour soi. Bonjour, Merci … même des bisous !
A avoir vu défiler 9 classes j’ai reçu l’impression réconfortante que oui ! il y a encore de bons instit, de bons parents, de bons enfants, doux turbulents, remuants joyeux, bavards silencieux, attentifs et impulsifs …
A m’enfoncer avec Machenka dans la taïga russe à plusieurs reprises je devenais résistante au froid et à la fatigue. Je n’avais, je n'ai ... même plus de douleurs dans le dos. Ça doit s’appeler la contathérapie !
Bonsoir ! Bonne nuit les petits !

ALPHABET T



T

3 Août
TOUT A COUP J’AI LE SENTIMENT que la lenteur est bien le point vers lequel je dois hisser mes voiles. L’écriture au stylo sur ce cahier, l’assiette du buste sur la chaise, la hauteur bien réglée de ma main et de mes yeux : tout doit concourir à renforcer ce sentiment-là de passion contenue, d’équilibre trouvé. Le dosage de l’unité d’une page, les lignes anglaises uniquement horizontales donnent à la lancée de l’invite des mots-amorces le temps tranquille du marcheur prudent et volontaire. Mais d’écrire « tout à coup » n’est-ce pas déjà un caillou sur le chemin, un nid de poule ? l’irruption de la hâte ? Non ! Tout à coup je suis sage, tout à coup je suis vieille mais j’aime ma sagesse, ma vieillesse et ma hâte.

19 novembre 2007

ALPHABET S



S

2 Août
SERVEZ-VOUS. Prenez dans mes chansons ce qui vous fait rougir, rêver, rire, attendre que l’orage soit terminé … je veux entendre dans mes oreilles ce qui a plu aux vôtres, voir dans vos yeux mon plaisir de les avoir sorties des miens. Car mes chansons, avant de venir à ma rencontre, sont d’abord une quête de rencontre avec vous. Elles regardent avant d’écouter. Elles sont une couleur qui me vient au teint, une forme indistincte qui cherche vos mains. C’est mon plaisir que vous repreniez de ce que j’aime. Comme chez Valéry, ma table est la vôtre et j’en suis honorée. Oh mes recettes sont simples ! les produits à ma porte, une gamme universelle de 7 notes et laisser faire la cuisine à la joie de la petite qui sautait à la corde sur ce même chemin.

UN REPRESENTANT

à l'atelier d'écriture

Un représentant se présenta à la porte de la nuit et m'en demanda l'ouverture. "Que représentez-vous lui demandai-je ? » intriguée qu'à une heure si inaccoutumée la société générale m'envoie un de ses représentants. "Rien que moi-même", me répondit-il humblement. Touchée par cette modestie peu coutumière à l'époque, j'acceptai qu'il entrât. J'examinais sa collection. Vieux souvenirs ( y a-t-il des souvenirs qui soient jeunes ?) vieux formulaires ( toujours les mêmes renseignements : date de naissance, couleur des yeux, taille ...) mais enfin il était là, vivant, à cette heure si solitaire et je n'allais pas faire la fine bouche. Et puis il me regardait, sans peur et sans reproches, honnêtement, comme un bon représentant de commerce qui ne demande qu'à faire son métier. Je lui proposai le café ( puisque ni l'un ni l'autre n'avions sommeil). Il me dit qu'il préférait une petite cerise à l'eau de vie et je dus bien avouer que je ne savais pas s'il m'en restait des années passées. Je tentais de lui expliquer mon désintérêt pour les cerises à l'eau de vie et la difficulté de se procurer de la gnole. Celle qu'a laissée mon père est toute consommée maintenant, le privilège de bouilleur de cru n'est pas héréditaire. "Bah ! Tant pis ! dit-il en souriant, je vais le noter." " Ah bon ! " Je m'aperçus qu'il cherchait son carnet de contravention. Je me sentis agacée et j'allais le flanquer à la porte quand le jour se leva. Ce n'était qu'un représentant de l'avenir. Et il resta.

18 novembre 2007

PETITE ABEILLE

Dimanche ensoleillé, on casse la cheminée en prévision du poèle RONRON PARFAIT, on décroche les tableaux. Poussière intense, espoirs chaleureux ...


Bien des choses
M’étonnent

Mais que dans l’air du jour
L’abeille inscrive
Un chemin de nuit,

C’est là une ouverture
Vers d’autres labyrinthes »
Guillevic
***
Je dois être une abeille la nuit ?
Frotter l’air de mes ailes
Ne pas laisser de miel au hasard du sommeil
Alors je me réveille, la métamorphose accomplie …
Je rentre dans la ruche.
Je fournis, je fourbis …
Programmée pour cela ?
D’y penser me rassure.
J’accepte l’ouvrage. Je distille.
Si petite et utile ! ben dis donc !
***
« Essaie
D’imaginer l’hiver

Venant vers toi
Tout sourire. »
Guillevic

16 novembre 2007

3 HEURES


Le cahier est plein
Comment faire, mes amours, pour inventer des pages blanches à noircir encore ?
A noircir et à colorer de vive voix
Comment, dans ma chapelle, rendre la croix perdue ( frisson du rêve) ?
3 heures sonnent. Sonner les heures et les entendre sonner donne à la nuit des dimensions raisonnables, apprivoisées. Les mesurer de près sans décamètre, hectolitre … les écouter sonner, apprécier leur musique. Même inutile. Apprécier l’inutilité des heures de la nuit, leur noirceur blanche. N’écouter que la foi vacillante qui s’échappe du balancier des heures …

Un jour viendra …

15 novembre 2007

POINT DE CROIX

LA FEMME PATCHWORK


La femme patchwork

Elle est la nuit qui crie et tremble
Elle est le jour qui prend lumière
Elle est ce frisson sous la tempe
Elle est le pays, la frontière

Elle est la fille, elle est la mère
Et toutes ces femmes ensemble
Qui ont enfanté avant elle

Elle est le pain, elle est la miette
Elle est déchirure et couture
Volontairement elle est le puzzle
Qui apprivoise et qui rassemble

Et parce qu’elle est joie et colère
Et parce qu’elle est feu sous la cendre
Elle s’endort comme l’eau première
Qui ruissela entre ses cuisses

Elle est la quête, elle est l’obole
Ne la laissez s’en aller seule
Elle a tant besoin de parole
Elle a tant besoin de prières

14 novembre 2007

AU POINT DE CROIX

Toute chaude la chanson, toute fraîche la neige, à peine commencé le canevas. Merci à Solange qui vient d'écouter au bout du fil blanc et en couleurs



Accrocher les jours au point de croix
Tirer l’aiguille
Compter les fils, piquer les doigts
En bonne fille
Et sur le sable et sur la neige
Question de chance
Croiser les journées à l’envers
Et à l’endroit

Reprendre à pas perdus la neige
Courber l’échine
Redresser le dos de l’hermine
Viser la flèche
A force d’allées et venues
Puce à l’oreille
Entendre le silence nu
Mer oh merveille !

J’aurais voulu, j’aurais voulu
A quoi bon dire ?
Parfois sur le canevas cru
Trouver à rire
Mais aux hasards de l’aiguille
Question de chance
J’ai fait naître garçons et filles
Et des romances

Permettez-moi de les chanter
Elles veulent faire
Tapisserie à points nommés
Et sans mystères
Peut-être y rencontrerez-vous
Question de chance
Un peu de votre âge à vous

piquer les jours, croiser les doigts
sur la balance
le temps arrêté à genoux
et en silence

13 novembre 2007

SALLE D'ATTENTE

SALLE D’ATTENTE
Il y a tout ce qu’il faut pour attendre confortablement, les sièges blancs, l’écran de télé branché sur le Ténéré, son en sourdine, de l’eau pour boire et des gobelets, les derniers numéros des gazettes, mazette ! tout sur Cécilia et son divorce, je vais enfin savoir …
Train train d’une salle d’attente en milieu hospitalier, allées et venues blanches ou vertes, discrètes …
J’attends comme conductrice, j’ai apporté papier pour écrire, et pour lire, François Bon « Tumulte »
Le tumulte vient d’arriver directement dans la salle d’attente. Rondouillard, disons bien enveloppé, élégant juste ce qu’il faut dans le monde des affaires …
Car il a des affaires à faire, il me glisse la confidence juste avant de rejoindre sa salle d’opération, avec des excuses et sans me regarder et sans perdre de temps. Il peut. La salle d’attente est devenue pendant une heure sa propriété privée, son bureau, son hall de gare, sa salle de conférence, son aérodrome
« Ouais Georges ! Ok Georges !
Ouf ! Georges vient d’appeler ! il n’arrivait pas à joindre Georges. Il a mis sur le pont les secrétaires, les amis, les collaborateurs primaires et secondaires. Il lui fallait le no perso de Georges au plus tôt. De lui dépendait la situation internationale, la parité du dollar avec l’euro, le marché à conclure avant Juin pour 1600 000 pièces à 18 euros la pièce, vous voyez l’urgence …
« c’est que mercredi, il y a une grosse merde, et comment vous allez à Paris ? après mercredi j’ai la générale … »
Un temps je m’imagine que c’est un acteur qui répète pour la générale. Banal son jeu : se lever, s’asseoir, marcher de long en large l’oreille collée au portable, tourner le dos pour plus d’intimité, revenir à l’assaut des ondes. Il baille. Un silence donne l’impression bizarre que la terre va s’arrêter de tourner. Mais une sonnerie, le voilà ressuscité …
Je sais tout de lui, sauf son prénom …
« ah merde ! c’est l’infirmière, t’inquiète pas, elle va rappeler »
l’infirmière n’a pas osé déranger.
La générale c’était la banque ! Pourvu que la Banque écoute sa prière !
« un vieux con de soixante-huit ans » je ne vous le fais pas dire ! Mon pauvre monsieur, j’accepte vos excuses bien que je n’ai pas eu le temps de vous le faire savoir … ah si nous avions échangé ne serait-ce qu’un regard je vous aurais parlé des fleurs bleues, des petits oiseaux … c’est ma spécialité à moi, c’est mon affaire. J’espère que pendant la durée de l’intervention l’anesthésiste a réussi à vous mettre en panne …

12 novembre 2007

ALPHABET R


R

REVENONS … Revenons par le chemin de pluie à l’aube du soleil, par le soleil nouveau revenons à la pluie. Comme un jardin. Un modeste jardin sur le bord du chemin qui n’a même pas de nom. Un lieu-dit « Vernatel » pour les feuilles d’impôts, « La Loue » dans ma cervelle et pour tous mes voisins. Revenons-y avec ce goût renouvelé de la campagne et du silence. Chance. Un lieu pour accueillir et un lieu pour se dire. Revenons aujourd’hui jusqu’à notre naissance et de là repartons !

11 novembre 2007

AQLPHABET Q



Q

3 Août
QUELLE TENDRE LUMIERE du soir dans la cuisine, la pièce la plus ensoleillée de la maison au couchant. Quelle tendre lumière dans mon projet de tendre vers la douceur des soirs avec application et constance. Serait-ce la leçon de la souffrance ? Chaque instant recueilli dans mes mains comme dans une coupe offerte. Chaque regard lucide et clair sur les belles réalités. Chaque cadeau du jour à échanger. Quel tendre bonheur de se savoir mortel en harmonie dans la conque du temps.
J’ai tant voulu l’absolu de l’amour que je me suis enfin assise, non plus à le guetter, mais à le recevoir.

10 novembre 2007

J'ECRIS ... JE NE DIS PAS ...


J’écris … Je ne dis pas …

J’écris dans mon quartier la lune
J’écris du soleil sur les thunes
Que je n’ai pas gagnées déjà
Quand j’ai fini mes banqueroutes
J’inscris mes pas dessus la route
Que je n’ai pas marchée déjà

J’écris
Je ne dis pas pourquoi je chante
Je ne dis pas pourquoi mes rentes
Ont toutes fondu sous mes doigts

A force de pianoter l’échine
De mon chat jusqu’à ma poitrine
Je perds les poux que j’ai cherchés
J’aurais pu le quatorze juillet
Ecrire une autre Marseillaise
Mais ce jour-là j’étais aux fraises
Et les mettais dans mon cahier

J’écris … faute d’histoires
Je ne peux m’empêcher de croire
Qu’entre mes lignes ils vont tomber
Tous les boiteux, tous les apôtres
Et quand ma voix deviendra vôtre
Nous serons tous bien avancés

J’écris … Ne me dis pas
Que ça t’agace quand tu te penches
Sur mes phrases et que tes branches
Me font de l’ombre sur les pieds
Si je préfère écrire en somme
En tant que femme et en tant qu’homme
C’est pour multiplier mes chances
Et les tiennes en l’occurrence
Des œufs dans le même panier

J’écris c’est pas pour dire
Qu’est-ce qui peut m’arriver de pire
Qu’écrire en braille sur un piano
J’écris pour partie sur les touches
Pour partie sur les cordes et louche
En contre-point du trémolo

J’écris, je ne dis pas
Qu’un jour je cesserai d’écrire
Lasse des notes de ma lyre
Fatiguée des mots du dico
Qu’une nuit je resterai coite
Quand la lune me mettra en boîte
Pour quelques rimes en trémolo

A rimer par inadvertance
Il m’arrive de dire en novembre
Que dans mon livre il fait trop chaud
Je sors pour aérer mes fièvres
Mais sur le verglas de la grève
Je glisse et me casse le dos

J’écris, je ne dis pas
Qu’à force d’écrire on zozote
Un chat vaut bien une marmotte
Ses pattes courent sur les toits
Et sur les toits criera la chance
D’écrire en direct un Dimanche
La messe en ut, le psaume en do

Deux petits en tout point semblables
Jumeaux de cœur et frères d’âmes
Synonymes en alter ego
Dirécrire dans le même bateau

06 novembre 2007

FOIRE DE GRENOBLE

A LA FOIRE
On est allé à la foire. On a pu garer la voiture. On était nombreux. On était plein de gens dispo à aller à la foire. On a fait la queue (les queues, y en avait cinq). On rouspétait pas. A quoi ça aurait servi ? Y faisait pas froid. On parlait même pas. On faisait la queue pour payer le droit d’entrer ( 6 euros). Puisque c’était dimanche on n’avait pas le droit au réductions d’anniversaire ( Pour les 60 ans de la foire réduction pour les plus de soixante, c’est logique !) La caisse des chèques et cartes bleues n’acceptait pas le liquide ( ils n’avaient pas de seau pour le liquide) heureusement il ne pleuvait pas. Mais le truc pour les cartes bleues était bloqué, alors fallait faire des chèques, forcément c’était plus long. Tant pis, puisqu’on avait déjà fait la queue un bon peu, on a attendu.
Enfin on est passé à la caisse 5. On a traversé les caisses 1,2,3,4 pour entrer. On a fait la queue pour le contrôle des billets. Personne riait. Personne s’énervait. Les grands, les petits, personne râlait. Tous volontaires pour la foire.
On a goûté aux rillettes, au thé, au nougat mais pas aux petits gâteaux, ni au vin de Bordeaux, ni au Bourgogne. On n’avait pas le temps.
Quand on est revenu on était bien content. On avait acheté un poêle à bois. Ça valait le coup de poireauter. Enfin … je crois. On verra quand le poêle sera installé.

ALPHABET P

>
l'alphabet appartient à tout le monde Azalais, le mot amorce à Paul Valéry ( voir le démarrage de l'alphabet de La Loue en remontant dans le blog).
tous les prétextes dans le pré aux textes sont bons pour batifoler des mots

3 Août
PEUT-ETRE que d’avoir respiré la sentholine, recueilli dans mon carnet aux citations parfumées un brin dentelé toujours odorant, recueilli ce mot nouveau dans ma flore et l’adresse de ma voisine pour renouveler la sensation … peut-être que de ce minime enrichissement, de cette découverte capitale, mon nez s’en trouvera mieux. Sentholine câline, comme le petit vent câlin qui fait chanter les peupliers … il va sécher le jardin abondamment abreuvé hier ce vent que l’après-midi a grossi. Il frémit jusque dans la maison. Il ourle des bourdons sonores dans les arbres et fait tousser les portes. Sans compter cette chanson désormais rangée dans le classeur qui continue à affirmer à tout propos :
Même en fauteuil roulant
J’irai chanter le vent.

05 novembre 2007

CONFRONTER (suite)

A l'atelier d'écriture on peut rebondir sur le texte de quelqu'un d'autre et recommencer l'exercice. c'est chouette !
J'APPENDS A CONFRONTER LES COULEURS DE LA VIE dit Philomène
aussitôt, toutes cornes dehors, je fonce à la confrontation


C'est fou ce que j'ai appris à confronter les couleurs de la vie ! J'ai appris le pinceau, ses tendances à la valse, à la bourrée, à l'immobilisation sur le blanc de la toile. J'ai appris le mélange des couleurs dites pures mais qui, à se confronter les unes aux autres hésitent entre le beau vert et le jaune caca ... le marron, ah ce marron toujours sinistre d'un quotidien englué dans ses apaisements de lumière mais morne, morne à mourir ! J'ai appris les silences de la vie, J'ai souvent eu du mal à les accepter. J'ai gardé tout au long du chemin l'impatience brouillonne pour les feux d'artifice, pour les arcs en ciel chanceux. A force d'exercices j'ai appris la beauté des gris et des noirs, les mirages mais aussi les éblouissements des blancs, leur virtuosité à tout oser des rêves et des potentialités. Sais-tu ce qui me fait le plus peur dans la mort ? l'absence de coloration, la nuance intégrale fixée à tout jamais, une nuance que je n'aurais pas choisie évidemment, une nuance imposée. Merde alors ! Puisque j'ai tant appris dans la confrontation avec les réels des couleurs et leur illusion optique, puisque j'ai sué sang et eau à parfaire la palette, n'est-il pas injuste, alors que le sens des couleurs me parvient, m'éblouit parfois au delà de toute expression, qu'elles disparaissent dans la trappe !

04 novembre 2007

ALPHABET N



N

2 Août
NON, je n’ai pas tenu l’andante jusqu’au bout. Il a fallu que je succombe : un" Viager" annoncé le jour de l’enterrement de Michel Serrault à grands renforts de termes exhaustifs. Je m’y suis laissée prendre. Ensuite, calée dans le fauteuil, la vue fatiguée, la tête flageolante, j’ai cru de mon devoir de tenir jusqu’à la fin. Pschtt ! le feu d’artifice final était un bouquet de sottise. Toutes les célébrités cinématographiques entourant la vedette du jour qui voulait, paraît-il, nous donner une fête pour son enterrement, ne faisaient que souligner l’inanité des images dansantes sur l’écran par rapport à celles, vivantes qui avaient embelli ma journée. Une seule Sylvie de 94 ans tellement supérieure à un soi-disant centenaire farfelu.

03 novembre 2007

TOUS SAINTS


Il a plu ce matin sur les dernières roses
Tous les saints cependant n’ont dit leur dernier mot
Ils murmurent dans la brume de bien curieuses choses
« toi aussi tu es saint, toi aussi tu es beau !
Toi aussi tu es belle ! Toi aussi tu es sainte »
Avec leurs chrysanthèmes j’ai fait taire mes plaintes
Et je suis repartie pour leur quérir de l’eau …

02 novembre 2007

ALPHABET M

M comme MICHELINE et MERCI


M

4 Août
« ME VOICI tel(le) que je suis, baignant dans l’air indispensable. Cet air semble si pur et délicieusement frais que je le sens me faire vivre, au lieu de vivre sans y penser, et que le mot très vide d’AME que l’on prononce à la légère, prend ici et à présent sa valeur personnelle et universelle. Et voici que je n’ignore pas non plus la présence de la terre sur laquelle je pose, marche et puis me coucher si je veux. Ceci est admirable, ainsi que la lumière qui m’entoure de choses vraies quoique lointaines. Je m’enchante de toutes ces richesses auxquelles on ne pense jamais. Je ressens que je suis fait de tout ce dont j’ai besoin et que je possède de quoi dormir si j’ai besoin de sommeil »
évidence de ce que Valéry a écrit pour moi hier et que je ressens et pense aujourd’hui. Nous avons donc en plus de Sète cette page en commun.

01 novembre 2007

AU JARDIN

À DANIELLE ET À SON JARDIN
à Claire pour hier et le travail sur la chanson
à Aujourd'hui qui s'ouvre en joie grâce à Pierre, Solange, Anne-Lise, Azalais ...





AU JARDIN

Tant je fus la parleuse
assise au jardin
à conter aux gamins
la splendeur de la rose

Tant je fus la brodeuse
au bord du jour penchée
à mimer pour des filles
les puits d’or des dentelles

Et tant je fus la reine
et l’esclave des livres
à en relire les pages
aux enfants sans mémoire

Je veux être aujourd’hui
seulement l’écouteuse
dans un jardin rempli
des murmures de la rose

Je veux être endormeuse
de mes propres chimères
Je veux être enjôleuse
de mes propres mystères

Et quitter le jardin
sans regrets, éblouie
calcinée, odorante
ivre de son ivresse

Et quitter le jardin
sans regrets, éblouie
Et le cœur incendié
Par les cent mille étoiles