Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

07 novembre 2006

CADEAU 1:PERUS


Les perus ( les poires) sont en train de mijoter dans la casserole avec le vin rouge du Bugey et du sucre) ; Pas mal de vin et beaucoup de sucre. C’est que les « tringa viailla » sont coriaces. Ernest les a ramassées l’autre jour et stockées dans ma voiture tandis que je lui donnais des courges d’Ercole. Ce qui s’appelle une économie de troc. Cette année Ernest n’a pas de courges. Un sacré boulot d’enlever la peau des courges, idem pour les poires, mais la récompense est au bout de la préparation et de la cuisson.
C’est lui qui me rappelle que j’avais, il y a un an ou deux, trouvé le moyen de rendre les tringa viaya comestibles. Tringa viaya ( étrangle-vieille) c’est ainsi que les nommait sa grand-mère, les poires étaient ramassées plutôt pour les lapins. Je démontre deux jours après à Ernest que deux vieux comme nous peuvent s’amuser à s’y aiguiser les dents pour peu que les perus ( autre nom patois qui était commun à nos familles) aient longuement été attendris et imbibés du jus de la treille. ( chez nous UN poire, non Une poire) Je suis donc retourné pour la démonstration-dégustation mais aussi pour récupérer la bouteille de Clinton que m’avait donnée Ernest.
Le vin d’Ernest c’est tout un sonnet ! Ernest est vigneron de sonnets. Son vin et ses poèmes tournent rond, ont les pieds posés sur terre et des envolées lyriques, badines, coquines … dans les règles de l’art et dans la science des récoltes mûries, attentives. Quelquefois avec des inclusions patoises ou des citations latines.
Ah ce goût un peu âpre des tringa viaya, ce vin transmué par - ne disons pas le jus des poires, elles sont si dures qu’elles ne jutent pas - la rustique élégance du terroir. Comme le Clinton. Il me tire des larmes aux yeux. C’est le goût du vin que faisait mon père. Il n’y a que le vin d’Ernest qui puisse me le rappeler par le palais aussi puissamment. L’idéal serait de cuire les perus avec ce vin-là. Une expérience non encore réalisée. Je craindrais de gaspiller le vin par les poires.
Ernest m’a aussi donné ma première leçon de latin. Maître es-patois et es-latin et es-tringa viaya. Non ! Pour l’instant, c’est moi la « Métra Tringa Viaya » ! Je viens de dire à Pierre en allant les touiller dans la casserole. « Ecoute comme ça sent bon ! » à cause de l’odeur chuchotée du mijotement mitonné.
Pour ce parfum, pour le goût et le souvenir du goût, je ne peux rien pour vous mais une demande bien tournée pourrait peut-être, via l’autorisation d’Ernest, vous conduire jusqu’à un de ses sonnets. Pas un étouffe-chrétien ! Du goulèyant ! De l’authentique Clinton des vendanges à mots !

2 commentaires:

Blogger Julie Kertesz - me - moi - jk a dit...

des sonets d'Ernest, des sonets d'Ernest!

faudrait-il le tourner autrement?

merveilleuse image accompagnant ton récit qui a un gout esquis, on peut le sentir, le humer, c'est pour le palais et la vue et les senteurs aussi

mardi, 07 novembre, 2006  
Blogger David a dit...

j'ai faim...

j'ai soif...

jeudi, 09 novembre, 2006  

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