UNE CARTE POSTALE III
III- DEUXIEME JOUR : LES DOUCHES PHARYNGEES
Elle est repassée par le parc à peu près à la même heure. Moins quart, moins dix … Il n’y avait personne sur le banc. Pourquoi n’était-il pas là comme tous les jours ?
Elle est entrée immédiatement, sans perte son temps comme hier, et s’est assise à attendre le docteur Mariton dans la file avec les autres. Elle aime bien le docteur. Toujours de bonne humeur, toujours à plaisanter et avec elle particulièrement. Avec les filles du service aussi ! Quelquefois un peu trop, à son avis, il est trop familier, trop … mais … il est jeune … il faut que jeunesse se passe …
Elle a commencé une conversation avec la vieille dame qu’elle avait aidée lundi et qui tendait toujours vers elle son plus beau sourire reconnaissant dès qu’elle la voyait. Elle avait le numéro 29, celui qui a été perdu en carton bleu glacé et remplacé par une vulgaire fiche de papier troué. Elle aime bien tomber sur le 29, avec son air de pauvre diable à réconforter. Quelqu’un a dit « chut ! » parce qu’elles parlaient trop fort toutes les deux. Alors elle s’est tû. C’est normal on ne doit pas parler sinon le couloir d’attente aux douches pharyngées ressemblerait à une volière. Déjà qu’avec le toit vitré ! Mais il fallait bien qu’elle réponde à cette pauvre vieille qui est sourde. Et le docteur Mariton, lui, ne se gêne pas pour faire du bruit ! Il rentre et sort de sa cabine à la moindre occasion, pour un café ou pour dire des bêtises … il boit beaucoup trop de café.
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Il est allé directement aux douches pharyngées sans s’asseoir sur le banc. Il n’aurait pu dire ce qui l’avait poussé à retarder son heure. Il n’aurait pas aimé qu’une autre carte le signale aux passantes. Exceptionnellement le docteur Raymond était absent. Il n’a rien dit, à quoi sert de protester. Ils font comme ils peuvent. Le docteur avait été retenu par un empêchement professionnel, c’était écrit sur la pancarte. Alors il est ressorti aussitôt dans le couloir central. Et machinalement il a tourné la tête de l’autre côté du couloir pour voir, à gauche, s’il y avait d’autres médecins absents. Mais c’est elle qu’il a vue. La femme. Il l’a vue, même furtivement, il l’a vue, c’était bien elle. Elle était en grande conversation avec une vieille dame. On aurait dit Maman dans les dernières années de sa vie, la vieille dame. Chapeautée, élégante mais très vieille. A se demander si les cures, à cet âge ?
Quelqu’un a dit « Chut ! » et il s’est éloigné.
Tiens ! Elle avait changé de robe. Aussi jolie d’ailleurs ! Toujours aussi jolie !
2 commentaires:
je ne connais pas les douches pharyngées mais j'imagine et vous lire est un régal...
oui, c'est une régale!
aujourd'hui, j'écris avec wifi et je me rappelle de votre maison en haut et de la chaleur m'entourant pendant l'hiver...
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