PLEINE LUNE
Je titube un peu. Saoûle de lune bleue. Ivre de l’exploit d’aventure d’aller cueillir la lune avec mes pieds.
Spectacle inouï. Les primevères, si fournies, si nombreuses cette année, s’éclairent dans l’herbe comme des cataphotes. Le buisson d’aubépine a l’allure effarée d’une mariée qui perd son voile. Les chiens à mon passage se mettent à aboyer. Transmettent un message d’alerte jusqu’au sommeil des maîtres. Les pompons jaunes des cornettes ressemblent à des houppettes pour repoudrer la lune quand elle sera trop vieille. Un seul camion laboure la grand route. A propos de labour, ceux fraîchement retournés, luisent par les cravates des raies parallèles. On y distingue des retournements de socs. Les arbres, pas encore sortis de l’hiver, déploient leurs bras noirs sur le ciel aux nuages voluptueux. Parfois coiffent la lune d’une résille. Bataillons de peupliers d’argent préparant la parade ou l’attaque du lendemain. Si j’ai la lune devant moi, elle projette ma silhouette immense sur le côté. Rencontrant les fossés celle-ci se disloque puis repart dans la trace de lumière. Je retrouve ma taille normale ombrée en avant avec la lune derrière moi. Vu l’heure insolite, tout est insolite à mes yeux. Une exclusivité. Et avant de rejoindre mon lit, un bien-être respiratoire et musculaire s’installe, dénoue, repose les neurones.
« Aucun oiseau n’a le cœur de chanter dans un buisson de questions » J’ai lu cela chez René Char.
Au buisson de questions je préfère celui d’aubépine.
Pleine la lune et moi, entière.
Un rythme m’accompagne et fait parfois frissonner mes lèvres. J’ai rencontré le souvenir d’un baiser entre La Loue et le Vernatel. Je le couche avec moi.
Le chemin s’inscrit sous mes pas. Repu de lumière douce et abreuvé d’attente.
Il y a encore des mots pour dire.
1 commentaires:
Merci de nous rappeler ce vers de René char que j'aime beaucoup,le poème tout entier est beau et ta ballade à la lune aussi
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