Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

06 avril 2007

PLEINE TERRE


La terre est basse. Je l’ai entendu bien souvent de ma mère et cette évidence voulait tout à la fois dire « Je suis fatiguée de gratter cette terre si basse. Serais-tu une paresseuse de rechigner à descendre jusqu’à la terre ? ne te rebiffe pas contre la terre. Elle est basse, elle te nourrit. Baisse-toi. Courbe-toi. »
Je m’amuse de ces retours à la terre que je vois chez mes compagnons de misère. Il semblerait qu’en elle ils vont retrouver leur force de vie chancelante. On plante sur des balcons tulipes et mimosas. On monte la terre dans les étages et à hauteur de vasques et de jardinières, de jardinier. La terre : s’en salir les mains, la tasser en petits pots, nettoyer à la balayette, curer ses ongles et terminer à la salle de bains avec « Chèvrefeuille » d’Yves Rocher.
On a des jardins du Dimanche. On dit « mes carottes » en ajoutant « biologiques » mais il n’y a aucune nécessité à cela. La paye assure confortablement les pommes-de-terre et bien d’autres fantaisies hivernales. Tous les vergers du monde sont à portée de nos bourses. Ecartelés, dispersés, sans racines, nous revenons à la terre pour nous refaire l’âme alors qu’elle était là pour nos parents pour nous nourrir, avant que toutes les notions se confondent. Notre agriculture est une philosophie, du moment, quand nous avons épuisé les autres.
La terre, quand on en vit, on ne l’aime pas. On la laboure, on la pioche, on la retourne, on la charrie bref, on la manipule à bras le corps, à pleines mains. On l’injurie « Bon Dieu d’bon dieu ! » quand elle résiste. La vie est dure, la terre est basse. Et tout en râtelant, arrachant, semant, on n’en continue pas moins ses amours rêvées, ses mélancolies, ses bagarres intérieures. J’ai vu mes parents, tout en se battant avec la terre pour en tirer notre subsistance, continuer leur querelle quotidienne entre eux et en eux-mêmes. Je les ai vus aussi heureux. Ma mère, au printemps, a la fébrilité des graines qui se mettent à germer toutes seules dans les sachets. Elle plante, elle plante. Son jardin qui fut longtemps son œuvre exclusive – bêcher, planter, casser les carouches jusqu’à ce que la terre soit « bien prin », poser le rateau, reprendre la pioche, tirer une racine, jeter un caillou, et puis sarcler, couvrir contre le gel, découvrir pour le rayon de soleil, tempêter, tailler, resemer ce que la taupe ou la courtillière a détruit, tailler, fumer … - était un beau jardin.

1 commentaires:

Anonymous Anonyme a dit...

Que non : je n'écris pas aussi vite que l'impression que je j'ai pu donner.
De mes cinq chapîtres de premier jet, le premier était déjà écrit et le second dans ma tête...
Les trois autres n'ont fait que suivre, mais seulement en premier jet.
Après la lecture que j'en ai faite d'un trait, j'ai eu à enrichir et corriger les trois premiers : normal ! Par contre, le quatrième est complétement à remanier et le cinquième est sorti du sujet...
J'ai donc à recentrer et clarifier avant de reprendre et continuer
Très joyeuses Pâques en chansons et chocolats.

samedi, 07 avril, 2007  

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