LA JOIE
Dans ta nuit de passage de gué, tu ne trouves pas, Colombe, plus malheureux que toi ! Regarde bien !
1921 On inaugure un monument aux morts de 14 dans le village. Andrianne, député et ancien combattant, est là.
« D’où venaient alors, ces frissons courts qui le contraignaient à serrer durement les mâchoires ? D’où venait ce sanglot nerveux qui lui monta tout à coup dans la gorge ? Il regardait les rangs serrés des mutilés, les manches vides, les yeux de verre, les pilons de bois. Il y avait tous ceux de Saint-Gervais, beaucoup d’autres aussi venus des communes voisines. Ils s’étaient rapprochés les uns des autres, avec leurs vêtements du dimanche, leurs poignets gourds, leurs rudes visages naïvement attentifs : et l’on voyait combien ils avaient souffert – les manchots, les boiteux, les borgnes, ceux à la face déchirée, ceux dont on n’apercevait d’autre blessure que leur pâleur cruelle ou leurs rides trop vite creusées, - de la même souffrance fraternelle et terrible, dont ils ne parlaient point, eux qui l’avaient subie ensemble, et que pourtant ils n’oublieraient, quoi qu’il fût, jamais. »
J’ai trouvé « La Joie » un roman de Maurice Genevoix dans une brocante, une édition J FERENCZI et fils de 1926, Prix : trois francs cinquante, pour 2 euros. C’est le nom de l’auteur qui m’avait fait le dénicher. Et j’ai bien été payé de retour. Dans les soubresauts d’après-guerre, dans la maladie ( tuberculose), la jalousie dévorante envers la femme aimée, l’homme va se redresser et retrouver le sens de sa vie, la joie de vivre. Il écrit à son ami de la Ligue des Droits de l’homme, nouvellement créée pour décliner l’invitation à la vie publique. Il reprendra du service dans l’enseignement.
« Que dire de nous, alors, qui avons nos yeux, notre voix, et qui sommes deux pour éprouver tous nos bonheurs, les partager et les multiplier ? …/…/ cette lettre qui prétendait convaincre n’est rien qu’une effusion lyrique, cent fois trop courte si je veux épancher l’allégresse de mon être profond, /…/ Je ne veux rien prouver /… ma lettre va , comme elle est, comme je sens. Je ne vous la donne pas pour une révélation, pour une évangile du bonheur. Si même vous le vouliez, il vous serait facile d’ironiser, de la tourner en ridicule, de la traduire en refrain de romance ou en vérité de La Palisse « il faut vivre jusqu’à sa mort » mais vous n’aimez pas ce genre d’ironie.
Souhaitez-moi bon courage : j’en ai besoin, car il en faut pour tâcher d’être heureux, pour conquérir et sauvegarder sa joie. Se répéter » je suis heureux » se satisfaire d’une rumination béate, cela ne saurait suffire. Vouloir être heureux est une autre chose, infiniment plus difficile, et qui mérite le respect : persévérance, attention, indulgence, force d’âme, pureté, tout cela est-il suffisant pour ne pas créer de mauvais souvenirs ? /…/ »
Je te laisse sur l’interrogation Colombe, mais avec ou sans joie aujourd’hui, tu sauras trouver une réponse qui te convienne. Ton désespoir a trop la marque de la vie ardente voulue pour te paralyser longtemps.
Allez ! Encore une citation qui occupe en permanence mon esprit et se rappelle à moi en cas de manque. Elle est d’Alain, le philosophe dont la découverte me fut tant précieuse en classe de philo. Elle est courte, simple, évidente :
« … ET CULTIVER LA JOIE, SEUL TRESOR HUMAIN »
Bon jardinage !
3 commentaires:
J'aime beaucoup ce récit et la citation me convient.
beau recit....oui la jie est un vrai trésor
besos
tilk
et cultiver la joie ,seul trésor humain..On devrait se réveiller avec cette pensée chaque matin,nos journées auraient de plus belles couleurs
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