Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

16 novembre 2010

HIER

Villeneuve, 15 novembre
-Combien étaient-ils ?
*Plusieurs, cinq ou six, deux seulement dont j’ai entendu la voix et senti le souffle
- Quel âge ?
*Des gamins ! 12, 13 ?
- Quels mots prononcés ?
(Arrachés, criés, vitupérés, déchirés, jetés comme le sac)
- Des sous ! donne des sous ! des billets !
- Fais pas de bêtise, je te donne des sous ! laisse-moi mes papiers !
- Encore ! des sous ! des billets
- Tiens c’est tout ce que j’ai !
- Casse-toi ! casse-toi !
Le mot de la fin : « excuse-le Madame ! »
Le lieu : la galerie de L’Arlequin à La Villeneuve
Sûr que c’était pas malin que la vieille dame avance, un sac à la main, le sac dit à main à l’épaule, à découvert dans la galerie ventée et pluvieuse, d’une main avec le parapluie, le capuchon de l’imper rabattu sur son front.
Possible qu’elle ait un peu anticipé en apercevant les silhouettes, une dans le renfoncement, les autres groupées en face mais hop ! c’était déjà en route, le sac à main arraché de l’épaule, elle titube, elle ne s’affale pas, elle court après le gamin qui a chopé le sac et entrepris de le vider. Casse-toi ! lui conseillent les autres ! mais elle s’obstine à récupérer ses papiers. Il a fait glisser la fermeture éclair de la poche intérieure du porte-feuille. Elle lui donne le billet de 1O euros qui s’y trouve, le paquet de pièces. Elle récupère le sac, le porte-feuille, se retourne vers le pilier d’où a surgi l’agresseur, se baisse pour ramasser son permis de conduire, attrape quelques tickets de bus qui ont volé …
Casse-toi !
Elle prend par le travers pour s’éloigner de la petite teigne irascible et frustrée. Heureusement qu’il n’a pas vu la liasse de billets tirés du distributeur et logés dans une autre poche du porte-feuille !
A l’arrivée chez Marie, son amie du 150 qu’elle venait visiter, venant de l’avenue La Bruyère où elle s’était réjouie de voir ses amis C. en forme, elle vérifie qu’elle a l’essentiel du contenu, la carte bleue, les carnets de chèques, le permis mais … Merde ! pas la clé de voiture !
Toutes deux retournent dans le vent et la pluie pour chercher la clé. Tiens ! la voilà ! soigneusement posée à ras du pilier, bien en évidence … le garçon protecteur qui l’a mise là ? un passant …

Ben oui ! c’est la ville ! c’est la vie ! des gosses, des gamins pris dans l’étau des contradictions, menacés qui menacent … ce pourrait être mes petits-enfants
C’est la Villeneuve vieillie, défraîchie, l’Arlequin qui a perdu ses couleurs vives.
- Excusez-le Madame !
je le plains. J'ai peine pour lui.

3 commentaires:

Blogger Marico Renaud a dit...

C'est aussi l'horreur des sociétés qui s'éloignent à trop grands pas des valeurs du coeur, parce que c'est plus facile, parce que la consommation prend le dessus sur tout. Il y a des valeurs de base qui sont bafouées au plus haut niveau... alors!
Merci de ton témoignage.

mardi, 16 novembre, 2010  
Blogger Solange a dit...

C'est bien dommage mais les jeunes sont le reflet de cette société qui n'a plus aucune valeur morale.

mardi, 16 novembre, 2010  
Blogger micheline a dit...

c'est bien dans sa banalité un exemple significatif de la société de notre temps, en effet et ce gamin à plaindre autant qu'à blâmer .
plus de valeurs morales: et pourquoi donc? et quelles valeurs? c'est tout un débat de société que cela implique .On ne décrète plus les valeurs comme des impératifs venus du ciel ;il faudrait les justifier en regard d'autres valeurs plus démocratiques .....

mercredi, 17 novembre, 2010  

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