JUSQU'AU MOLE
Je sais parfaitement ce que je fais.
Je commence une histoire. Une histoire ou un conte ? Inventé de toutes pièces.
A sept heures, à Sète. Simple coïncidence du matin.
Deux pendules ont donné la cadence, l’une en face de mes yeux et l’autre légèrement sur la gauche
Les mouettes annoncent bruyamment la nouvelle et la rue, curieusement, se tient coite, à attendre l’histoire
Petit détail supplémentaire : c’est à l’envers d’un album de dessin que l’histoire s’inscrira , au crayon à papier et sans marges aucunes. En pleine page.
Je bois du thé Earl Grey et de marque Twinings
Il y aura un enfant dans l’histoire. Peut-être deux. Trois c’est plus difficile.
Un enfant de sept ans comme, dans tous les livres de raison, les bateaux courent vers l’horizon en larguant les amarres.
Un enfant rond. Jambes nerveuses et musclées bien que fines comme une cigarette. Mains qui pétrissent et triturent jusqu’à ce que la boule de glaise prenne forme. De bonhomme, de cheval et quelquefois des deux chevauchant les nuages
L’enfant n’a pas encore de nom
Puisque nous sommes réveillés, l’enfant et moi, nous partons jusqu’au môle car c’est le titre de l’histoire, ou du conte …
JUSQU’AU MOLE
Est-il d’hier ou de demain le bel enfant ? Personne ne sait encore. En tous cas il est blond, de peau et de cheveux, et il chemine. Mais sans bâton de pèlerin.
Il a le temps pour lui. Il a le temps pour tout.
Je sais parfaitement ce que je veux. Une histoire (ou un conte) sans les marges.
***
PAPY GERMAIN
Il (l’enfant) habite Rue Caron. La nuit, il faut bien qu’il habite quelque part. Il ne peut pas sortir. Mais le jour il fait jour : il s’en va.
Il entend venir par les fenêtres des airs qui ne ressemblent à rien, n’ont pas l’accent d’ici. Il file, il ne s’arrête pas. Tout juste s’il entend.
Il prend les escaliers à l’endroit, à l’envers. Il est content. Le soleil se dispose à prendre le contrôle de la ville au grand jour.
Pour manger il s’arrête de temps en temps : une pêche, un croissant. Il aime l’habitude. Il n’a rien à payer. La monnaie c’est pour lui. Personne ne réclame et les plus généreux ne calculent pas au plus juste.
Alors la mer est arrivée avec tous ses bagages, ses paquets … Il la connaît. Intérieur, extérieur. Il a tout visité. Y s’fait pas d’bile !
Pas la mer des bateaux ! Enfin, pas seulement ! Pas encore. La mer des rades. La mer toute entière. Et les quais sur les ports. Les escales …
Il a une petite sœur. Est-ce bien nécessaire d’en parler ? Bien sûr quand ils franchissent la porte de la capitainerie, on ne peut pas faire autrement. Il faut bien qu’il tienne la porte.
Le môle, quand on lève les yeux vers lui, il est dix fois plus grand que vu de St Clair. Juste à ses pieds il fait des mètres et des mètres, peut-être des kilomètres. Il ne l’a jamais demandé. Il pourrait, peut-être au papy pêcheur, au quai de Constantine, qui n’est pas son vrai papy mais qui l’aime bien ou au Père Germain qui n’est pas vrai non plus mais c’est tout comme.
- Combien il fait le môle ?
- le Môle ?
- Oui, au pied
- Le môle a pas de pied, qu’est-ce que tu me racontes ? En long ou en large ?
- En haut ! La tour au bout du môle. Le phare quoi ! Tu vois le phare !
- Ben explique toi ! Le phare c’est pas le môle, le môle c’est pas le phare. Je sais pas. On l’a construit en 1948. J’m’en rappelle. C’est écrit. T’as pas vu ?
- Ben je sais lire. Laisse tomber.
Il n’insistera pas. Papy Germain il n’est bon qu’à pêcher.
***
Il habite Rue Caron, ce gosse. C’est un môme. Un petit môme.
Pour arriver à la rue Caron, ça monte et ça descend en même temps. C’est sa mère qui le lui a expliqué.
Pourtant il sait ce qu’il dit. Pour arriver à la maison, les escaliers, ils montent. Faut voir comme son cheval ralentit.
- Là où ça monte, ça descend. Forcément. Fais pas l’idiot, c’est pas difficile à comprendre.
Pourtant, pour aller sur la jetée, à la capitainerie, les escaliers dégringolent sans arrêt vers la mer.
Ils ne montent pas, tout de même ! Il s’en serait aperçu. Quand il revient chez eux il ne passe pas par les escaliers. Il fait le tour. Il passe par l’autre côté où ça monte.
A côté de la capitainerie il y a le restau où maman travaille. Tous les jours ! Même le Dimanche mais le lundi, elle va pas au marché. C’est toujours ça de gagné !
Pour les escaliers le Père Germain est d’accord. Ils montent. Ils ne font rien que monter. Les quatre-vingt, ils montent pour son Papy : il ne peut pas aller jusqu’au bout. Il NE peut pas.
Il sait parler comme il faut ce gosse ! Même écrire. Il va à l’école.
Papy Germain entre deux paquets d’escaliers il s’arrête. Il se fait une cigarette. Il se penche par-dessus la rambarde. On dirait toujours que ses cheveux blancs vont s’envoler quand il y a du vent. Il n’en a pas beaucoup sur le caillou des cheveux mais derrière le cou un gros paquet tout blanc qui vole. Je me demande bien ce qu’il regarde par dessus, en dessous. Pour moi, il surveille … mais quoi ?
Papy Germain habite rue Caron. Au 4. Eux c’est au 2. Il n’y a pas de 1. C’est comme ça, des garages et puis c’est tout. Au fond de l’impasse le gros figuier. Quand il pleut le trou se remplit d’eau, on pourrait élever des canards, dit l’père Germain. Mais il ne pleut pas souvent à Sète. Si ça continue ce sera la sécheresse et la canicule.
- C’est quoi déjà la canicule ?
- C’est quand le pastis sèche dans ton verre avant que tu aies bu.
A son avis, le père Germain craint pas la canicule.
Ma mère le surveille quand même. Ils l’ont dit à la télé : surveiller les personnes âgées pendant la canicule, aller les voir, leur faire la bise.
Papy Germain, il ne veut pas qu’on rentre chez lui pour le surveiller. Jamais. Même eux et la petite sœur. C’est toujours lui qui vient à la maison. Des fois il garde la petite sœur mais la bouteille de pastis qu’est-ce qu’elle prend !
***
MADAME BISOUS
Ce matin le gosse part au boulot de bonne heure. Il n’ira pas se baigner au môle, tant pis ! Il n’a pas le temps. Madame Bisous lui a donné un papier à remettre à Jeannot à la criée. C’est loin. En bas, en ville. Au fait c’est un peu vrai que les escaliers descendent si on veut. Il s’en rend compte. Il part et Maman dort encore. Elle a encore mis la petite soeur dans son lit. Elles dorment toutes les deux.
Madame Bisous a tapé doucement à la porte. Il n’y a pas eu moyen de l’éviter, sinon elle les réveille. Il a ouvert la porte, 2 rue Caron à Sète, Hérault.
Il lui accorde machinalement sa frimousse de gosse. Elle lui glisse le papier dans la main. « Fais attention de pas le perdre ! Porte vite au Jeannot ! Dépêche-toi tu vas le rater s’il part faire les livraisons avec le camion frigorifique ! J’te payerai bien ! »
Il s’en fous un peu de la paye. Descendre à la criée c’est déjà cadeau !
S’il n’est pas rentré quand Maman se réveillera ( mais ça m’étonnerait ! elle est capable de dormir jusqu’à midi !) elle trouvera Madame Bisous pour la rassurer.
Il est à la criée. Il est avec Jeannot. Y craint rien. Ben voyons !
La matinée est à lui. Pas la peine de lui expliquer à Madame Bisous qu’on doit dire NE. Elle est pourtant allée à l’école. Peut-être le maître lui a pas appris. Laisse tomber !
En face de leur petite maison y a le mur, IL Y A le mur de la Place de L’Hospitalet. Même avec un escabeau, (bien sûr qu’il a essayé !) il NE peut pas regarder la Place à travers la barrière qui surplombe le mur. Le mur cache tout. La Place est surélevée mais l’enfant ne comprend rien à ces niveaux. Même un grand garçon, même Zidane, il ne verrait rien de la place en sortant de la maison.
Madame Bisous entendra Maman. Maman quand elle l’appelle, tout le monde l’entend, mur ou pas mur. Sur le môle, à la criée, rue Caron. Et pourtant elle a pas l’accent Maman ! Elle est pas née là.
Madame Bisous habite de l’autre côté de la Place, juste vers La jeune lance Sétoise du quartier Naut. LO quartier Naut. Lui aussi il portera les couleurs du quartier, le quartier Haut. Que je t’explique ! C’est notre langue. LO. La langue des jouteurs, des pêcheurs, d’il y a bien longtemps !
Elle s’en fous bien Madame Bisous des frimousses qu’elle connaît pas! Des moches ou des belles, des sales gueules ou des boutons de rose, elle veut des bisous rien que pour elle. Des tonnes de bisous. Du facteur, de l’infirmière quand elle part au travail aux Pergolines, même de la Gitane, …
Tous, toutes, elle les bisouille avec le même entrain. Sauf le Père Germain. Lui y a pas moyen, même pour le jour de l’an. Faut pas lui en vouloir. C’est depuis qu’elle est … V … ouneuve. Paraît.
A part ça elle est gentille
Elle regarde pas à la dépense. NE . Elle le paye bien.
****
LALI
C’est le matin qu’on est drôlement bien. Maman NE peut pas se lever le matin. Elle travaille tard. Elle travaille trop. Elle travaille tout le temps. Elle est bien obligée de travailler.
Maman rigole tout le temps. Elle se marre. Pas la nuit quand elle rentre. Quelquefois il est réveillé. Elle NE sait pas qu’il est réveillé. Elle NE se couche pas tout de suite. Elle prend une cigarette. Des fois elle pleure.
La petite sœur, c’est pas pareil. Elle fait exprès de pleurer. Déjà c’est une fille. J’ai pas que ça à faire de m’occuper de c’te fille.
J’achète un gâteau.
- Oui, celui-là, un sablé ? ah bon ! Avec du sable ?
- Bien sûr le môme, avec un coquillage au milieu tu verras. Je garde la monnaie ?
- Et puis encore ! J’tai donné 1 euro. Tu me dois 20.
- Allez casse-toi ! la voilà ta pièce de 1 euro.
- Non Mounir ! J’ai du fric ! Je veux payer !
- Casse-toi j’te dis! J’irai me faire payer chez ta mère !
- Non ! Lui dis pas ! NE lui dis pas à ma mère. T’as pas l’droit ! t’as pas !
Avec la pièce je vais m’installer à la terrasse du Cristal, juste au dessus de l’Esplanade. Aujourd’hui c’est pas mon circuit entre le môle et la rue Caron.
- Aïcha je sais où elle a dormi ! Je sais. Elle dort dans le parc à jeux !
Et pour Monsieur ce sera ?
C’est du chocolat froid. J’aime pas le chaud. J’écoute avec le sablé, le chocolat. Zidane à la télé. Il va tout nous expliquer.
***
Il est temps pour moi d’arrêter de me mettre à la place du gosse. Qui de lui ou de moi ce matin a changé d’itinéraire ?
Tellement grande cette tête d’enfant que je vais m’y perdre. Déjà je ne suis plus tout-à-fait sûre qu’il ait sept ans. Hier, sur la plage, quand je l’ai photographié en train de monter un château de sable on l’aurait pris pour un bébé de cinq ans, comme la petite sœur. Bien qu’on lui voie toujours les omoplates saillantes, ses épaules se sont élargies. Il approcherait les neuf ans que ça ne m’étonnerait pas.
Il est blond. Comme Siméon mon petit-fils. Etonnament blond et bouclé.
Il est vif, inventif, actif, créatif, naïf, comme Théotime le frère. Et malin et rusé !
Il monte et il descend comme cette histoire de Sète qui m’accompagne cette semaine.
C’est bien Zidane qui entame la journée par une mise au point. Je devine plus que j’entends, de l’autre côté de la rue où les tables sont installées en terrasse. Mon thé est trop chaud. Le gâteau à 80 centimes, bon !
80 comme le nombre de marches de l’escalier qui descend de la Rue Caron vers le Môle. En fait une Sétoise de 83 ans m’a précisé qu’aujourd’hui qu’elles sont 96 et que l’escalier en fait s’est légèrement déplacé. Je n’en ai compté que 93. Y aurait-il une légère pointe d’exagération chez les Sétois ? Ou est-ce que je ne suis pas assez attentive ? Je ne vais tout de même pas redescendre les escaliers pour les compter !
Ce n’est plus l’escalier de ses amours, à la vieille dame. Vieille ? Un peu plus que moi. Est-ce elle Madame Bisous ? Comme si la rue versait sur ma page à point nommé les images de mes mots en balade !
Tant de choses ont changé d’ailleurs qu’elle ne reconnaît plus sa ville. Mais c’est une belle ville oui, ça c’est sûr. Son fils au chômage n’a pu la quitter même pour trouver du travail.
Oui ! Elle pourrait être Madame Bisous, la sémillante octogénaire. Large jupe fleurie orangée jaune, corsage ensoleillé et cheveux roux flambant neufs la teinture …
Donc, Zidane, idôle des parents et modèle des enfants, entend bien donner à son coup de tête au joueur italien une dimension symbolique. Comment résister une fois, deux fois, aux injures qui touchent à ta mère, à ta sœur ? La troisième fois tu craques. Ce n’est pas bien mais voilà c’est un homme Zidane, pas un Dieu ! Il s’excuse. Auprès des enfants. Auprès du gosse. Qu’un président du sénat italien traite l’équipe de France de ramassis « de noirs, d’islamistes et de communistes « c’est pas grave ça ? »
Si c’est grave !
La mise au point de Zidane passe en boucle à la télé, cette fois je quitte ma place en terrasse pour mieux entendre. Puis je reviens m’asseoir avec ma deuxième tasse de thé.
Alors la conversation peut s’engager entre Lali et moi. Elle buvait son café dans mon dos. Une réflexion que j’ai mal entendue m’a fait retourner. Je l’ai interpellée. Elle quitte son amie aux deux enfants à qui elle a offert le café pour venir s’asseoir à ma table. L’amie s’en va avec les deux gosses, des petites filles.
Oui elle aime le foot ! Oui elle a pleuré pour la finale. Ces Italiens, elle ne trouve pas de mots assez durs pour les fustiger. C’est à elle-même que l’offense a été faite. Moins la défaite du ballon que l’injure en touche.
Zizou est son frère. Frère immigré comme elle. Elle est depuis quarante-cinq ans dans cette ville. Elle y est arrivée à 1 an. Elle est immigrée en France depuis quarante-cinq ans. Elle est toujours une sale arabe. Immigrée aussi en Algérie si elle y retournait. Zidane maintenant va retrouver ses racines et s’occuper des enfants. Elle l’approuve.
Elle est aide-soignante. Elle a passé la nuit à veiller une vieille dame en fin de vie. Elle lui a tenu la main autant pour la calmer que l’empêcher de la battre. Sale arabe elle va la voler. Les Arabes sont des voleurs.
Sans précipitation, et sans questions de ma part, Lali continue son tour de vie et ses réflexions. Elle n’est pas triste. Lucide : elle constate. Elle reporte sur Zidane le soin de parler à la télévision. Pour le reste, elle se fait confiante. Elle sait quoi dire. La jeune femme soumise a bien changé. Elle élève ses trois enfants. Elle a divorcé. Elle aimait son mari mais elle a compris. A ses fils elle dit ce qu’elle a à dire. Le petit comprend, a des tendresses pour elle. Le grand, c’est plus rude. Il est allé dépenser sa première paye avec sa copine à Marseille. 800 euros en intérim. Elle, pour les soldes, s’est acheté des chaussures à dix euros, et pour ses enfants des vêtements à trente. Mais elle n’a pas supporté que le grand les prenne comme un dû sans remerciement excessif. Elle a été très claire. Tu t’en vas si tu prends cette maison pour un hôtel. Il s’est mis en colère. Il a claqué la porte mais quand il est revenu à 1 h du matin elle l’attendait pour lui expliquer qu’ici, on ne rentre pas comme dans un hôtel justement ; qu’ici il est chez sa mère.
Elle lui a expliqué que ses échecs elle n’en était pas responsable. Fautive peut-être d’avoir moins insisté qu’auprès de sa sœur pour que les devoirs soient faits dans la cuisine avant de jouer. Mais majeur ou pas, il est responsable lui-même de sa vie.
Son père et sa mère sont morts quand elle était enfant. Elle a été élevée dans une institution catholique. Au moment de faire sa première communion elle a cousu sa robe comme toutes les autres mais on lui a dit alors qu’elle était musulmane et on a donné la robe à une autre. Elle ne savait même pas ce que ça voulait dire Musulmane ! Elle a pleuré.
Un moniteur lui a montré le Coran. Il lui a expliqué que c’était pour elle. Ce moniteur elle voudrait bien le retrouver pour le remercier.
Je suggère que sa nuit de veille à tenir la main de la vieille dame irascible, d’abord en protection, ensuite par tendresse humaine était un remerciement de retour au moniteur attentif.
- Non ! C’est mon travail ! dit-elle
Je prends auprès de Lali une leçon d’expérience de vie. Je lui parle de ma déception quand je sens mes petits enfants propulsés dans un monde de consommation. Mon inquiétude de me sentir coupée d'eux par l'âge, l'incompréhension réciproque. Oui Lali, oui Julie ! Vous avez raison . Il faut dire. Ne pas se résigner. Ici ce n’est pas un hôtel. Ici la table est mise pour le partage, pas pour le saccage des sentiments. Là, je n’exige rien que l’expression acceptée de moi-même avec mes limites, mes carences mais aussi mes qualités et mes cadeaux.
Lali, quand elle n’est pas de service, aime aller se baigner, toute seule, la nuit. L’eau est fraîche. Toute nue ! Quel délice !
- C’est la vie
- La vie est belle
- Au revoir Lali !
- Au plaisir !
2 commentaires:
En commencant par un petit garcon pour terminer d'oser et avoir du plaisir à nager nue la nuit toute seule! et nous tenir en halaine entre temps,
au revoir, je pars, je reviendrai, nous nous verons
continue ta magie entre temps
Gelzy j'étais absente quelques jours et je viens lire aujourd'hui et puis... je suis, comme d'habitude sous le charme de tes mots avec une émotion plus grande encore à l'instant. Je pars dimanche pour 2 semaines et me précipiterai chez toi à mon retour !
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