Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

09 décembre 2005

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Car, ce jour-là, ma mère, le temps était gris. Tu guettais par la fenêtre l’annonce d’un printemps qui ne viendrait plus. Le plus rude dans ces avertissements d’un ciel plat sur les peupliers immobiles, était ce silence clos sur l’horizon. Tu m’en voulais de tenter d’échapper sans toi à la marque du temps posée sur le paysage. Ton regard disait « assez ! ». Je ne voulais pas entendre. Je lançais mon pinceau maladroit à l’assaut de la morgue de ce ciel en transit. Je voulais faire rire l’horizon, lui redonner une lumière-présage bleue. Peut-être découvrir dans un recoin une dernière fleur à t’offrir. Tu aimais tant les fleurs ! « Et dire qu’il faut quitter tout ça ! » Je savais que, dans cette grisaille d’automne, tu dénonçais l’injustice des saisons quand, précisément, on vient de découvrir la qualité de chacune. Tu désignais d’un geste las « tout ça ». Moi, continuant à saisir quelques traits d’arbres, quelques paroles à ranimer à l’angle froid des branches sur le ciel, je faisais taire mon sanglot.



Derrière la vitre un chant d’oiseau a retrouvé du temps la trace grise et bleue. Peut-être, dans sa voix, les notes de ton agonie ou le salut par delà les nuages que tu m’adresses.

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