Mots et couleurs

textes auto-biographiques anciens et actuels, poésie, chansons, contes et nouvelles

07 janvier 2017

déjà en ce temps-là


Lysistrata grandiloquente  - Si Eros et ses mots doux, si Aphrodite au septième ciel insufflent du désirs à nos seins et à nos cuisses, et provoquent chez les hommes des raideurs délicieuses, dures comme des bâtons, un jour viendra où la Grèce nous appellera Mesdames Armistice.
Le ministre –Et pourquoi donc s’il te plaît ?
L- pour avoir mis fin à la folie des hommes et à leur habitude de se promener dans les rues en armes.
Calonice – ça c’est vrai. En ce moment on n’arrête pas d’en voir, au marché aux légumes, au marché aux marmites, qui font les cent pas avec leurs armes, comme des détraqués.
Le M : bien sûr, c’est le devoir des braves.
L : n’empêche que c’est ridicule de voir un homme acheter du poisson avec son bouclier à la main.
C : moi j’ai vu un chef d’escadron, à cheval, mettre la purée qu’il venait d’acheter à une vieille, dans un casque. Et un autre, armé jusqu’aux dents, secouer son javelot pour effrayer une vendeuse de figues et mordre à ses beaux fruits.
Le M- Mais dites-moi comment allez-vous mettre fin au désordre dans ce pays ?
L, attrape un pelote, elle mime - c’est comme une pelote lorsqu’elle est emmêlée, on la prend comme ça, et on la démêle, un coup par ci, un coup par là. On fera pareil avec la guerre, si on nous laisse faire, on la démêlera en envoyant des ambassades, un coup par ci, un coup par là.
Le M- alors c’est comme ça, c’est avec une pelote de laine que vous pensez mettre fin à cette situation tragique !
L : c’est ça, c’est ça ! et vous, si vous étiez moins stupides, vous vous inspireriez de nos pelotes de laine pour gouverner ;
Le m : Dites-moi comment.
L :- comme on fait pour la laine brute. Il faudrait donner un bain à Athènes, pour éliminer sa graisse, puis l’étendre et la frapper pour tirer les poils durs et de mauvaise qualité, notamment ceux qui s’agglutinent en petits groupes au sommet, ceux-là il faudrait les arracher, qu’on ne voie plus leur tête. Il faudrait ensuite mélanger dans une petite corbeille toute la bonne volonté générale, en y faisant entrer les résidents étrangers, nos alliés des autres pays, et même ceux qui fraudent le fisc. Quant aux villes peuplées de colons athéniens, il faudrait reconnaître qu’elles sont des brins de laine tombés à terre chacun de son côté, et les ramasser, les amener ici, les réunir en un seul tas. Avec tout ça , il faudrait faire une énorme pelote de laine et tisser un manteau pour le peuple.
L M : C’est quand même incroyable qu’elles parlent pelotes de laine et petites corbeilles, elles qui ne connaissent rien à la guerre.
L : Mais enfin, crétin, on la supporte plus de deux fois plus. D’abord en tant que mères des soldats envoyés au front…
Le M soudain ému - oh ! tais-toi, ne remue pas le couteau dans la plaie !
Aristophane traduit par Laetitia Bianchi et Raphaël Meltz ( LYSISTRATA)

1 commentaires:

Blogger Solange a dit...

Intéressant ce texte, je ne connaissais pas.

vendredi, 13 janvier, 2017  

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